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Katoto, un mal pour un mal
Coup dur pour les Bleues, qui devront poursuivre l’Euro sans leur buteuse désignée Marie-Antoinette Katoto. En attendant de voir à quoi ressemblera le plan B de Corinne Diacre pour la suite du tournoi, la Parisienne est déjà certaine que les mois à venir seront loin d'être une partie de plaisir. Mais MAK peut déjà se concentrer sur le Mondial 2023, son prochain objectif en bleu. Après tout, impossible n'est pas français.
Ça a claqué dans l’air, comme un coup de revolver : « Touchée lors du match face à la Belgique, Marie-Antoinette Katoto est forfait pour le reste de l’Euro 2022. Les examens réalisés ce jour confirment une entorse du genou droit avec lésion du ligament croisé antérieur et ménisque fissuré. Elle est remise à la disposition de son club. Le staff et les joueuses de l’équipe de France féminine ainsi que la FFF lui souhaitent un bon rétablissement. » Cinq lignes on ne peut plus synthétiques, pour annoncer la nouvelle que tout le monde craignait : les Bleues ont perdu leur buteuse attitrée. Alors que c’était son premier tournoi majeur. Alors qu’elle était dans une forme étincelante. Alors qu’elle avait fait son job en y allant de son pion face à l’Italie. Alors qu’elle incarnait le visage de l’EDF next genfaçonnée par Corinne Diacre depuis trois ans. Ce vendredi après-midi, tout cela a volé en éclats.
À Ashby-de-la-Zouch, au lendemain de ce désormais funeste France-Belgique, les Bleues se sont réunies avant la séance de décrassage pour apprendre la terrible nouvelle de la bouche même de leur sélectionneuse et de leur partenaire. « C’est triste, parce que Marie est une compétitrice. Elle nous a dit qu’elle serait derrière nous pour le reste de l’Euro et veut qu’on soit performantes, c’est ce qu’on va faire pour elle », promettait Sakina Karchaoui. « C’est dur de perdre un des meilleurs éléments de l’équipe, j’ai l’impression qu’on est limite plus triste qu’elle, ajoutait Ouleymata Sarr. Mais derrière, ça nous surmotive encore plus pour ramener la Coupe, c’est notre objectif depuis le début. » Entrée à la place de Katoto, Sarr a souffert face à la Belgique et sait qu’elle doit désormais « peut-être faire un peu moins de courses et être mieux placée pour faire le bon geste » face au but adverse. Le dernier match de groupe, prévu face à l’Islande le lundi 18 juin, aura l’avantage de compter pour du beurre et de lui servir de répétition générale avant le quart de finale du 23. Un match pendant lequel Corinne Diacre pourra aligner les coiffeuses à loisir, et déjà anticiper la marche suivante en travaillant sur le plan B censé pallier l’absence de sa pépite.
Foutu métabolisme
On pensait que les gros mots qui entoureraient cet Euro 2022 seraient la taille des stades, ou le montant de la dotation accordée par l’UEFA. Pourtant, après Alexia Putellas et la Nord-Irlandaise Simone Magill, MAK est venue ajouter son nom au triste palmarès des joueuses ayant dû jeter l’éponge à cause de ces maudits croisés. Une hécatombe qui a commencé avec le championnat d’Europe, et qui ne doit rien au hasard : les footballeuses sont, en effet, quatre à six fois plus sujettes à une blessure aux croisés que leurs homologues masculins.
Selon une étude menée par le Guardian, les principaux facteurs aggravants sont les conditions dans lesquelles jouent les joueuses (comprendre des infrastructures souvent de moindre qualité que celles réservées aux hommes), mais aussi le métabolisme féminin (fragilisé notamment par les œstrogènes) ainsi que le stress (qui pourrait être lié aux deux éléments précédents). Sans oublier que la plupart des blessures ne se produisent pas à la suite d’un contact avec un adversaire, mais à la suite d’un mauvais geste (comme une mauvaise réception à la suite d’un saut, par exemple). Ce fut le cas de Marie-Antoinette Katoto, qui sentit son genou (déjà fragilisé par un coup reçu la veille à l’entraînement) tourner à la suite d’une action pourtant banale.
Briser la spirale infernale
En attendant, le verdict final sera brutal. Selon la moyenne établie par le Guardian, la période de convalescence après une blessure aux croisés oscille entre six et neuf mois chez une footballeuse. Malgré sa récente prolongation au PSG, MAK pourrait aller faire un tour du côté de Manchester et tailler une bavette avec Chloe Kelly. Il y a un an, l’ailière des Three Lionesses (24 ans) connaissait le même sort avec Manchester City lors de l’avant-dernière journée de Super League face à Birmingham. Un coup d’arrêt brutal pour l’Anglaise à quelques semaines seulement des Jeux olympiques de Tokyo, pour lesquels elle était qualifiée avec la Team Great-Britain. Dans une interview accordée au Daily Mail, Kelly a expliqué que cette blessure ne l’avait pas affaiblie. Au contraire, elle l’a transformée : « J’ai un regard complètement différent sur les choses, maintenant. Je m’amuse, je vis le moment présent et j’en profite. Quand vous êtes victime d’une blessure comme celle-là et que vous êtes éloignée du terrain pendant si longtemps, je pense que rien ne vous perturbe vraiment après. »
Katoto devra également surmonter les craintes mentales inhérentes au processus de retour à la normale : balayer les questions culpabilisantes comme « Pourquoi moi ? », « Oserai-je rejouer un jour ? » ou encore « Serai-je capable de retrouver mon niveau ? » Là encore, Chloe Kelly semble être l’exemple à suivre. Au mois d’avril 2022, soit près d’un an après son jour noir, elle est rappelée en sélection par Sarina Wiegman et compte parmi les 23 Lionesses présentes à l’Euro. Avec le Mondial 2023 en ligne de mire, pour lequel les Bleues sont déjà qualifiées, Marie-Antoinette Katoto peut garder confiance : son moment de briller sur la scène internationale viendra, tôt ou tard.
Par Julien Duez, à Rotherham
Tous propos recueillis par JD, sauf mentions.