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Kang-in Lee, le gros bang de Valence
Malgré une intersaison délicate à gérer, le FC Valence peut compter sur quelques éléments pour sourire. Notamment un : Kang-in Lee, qui est en train de s'imposer comme la plus belle promesse du club.
Malgré le soleil, la mer et la plage, tout n’est pas rose à Valence. En cette période de pandémie, l’Espagne reste plongée dans l’inconnu avec un état d’urgence de six mois, entré en vigueur depuis le début de la semaine. Sur le plan sportif, le FC Valence, club le plus prestigieux de la communauté autonome, vit un début de saison 2020-2021 contrasté en Liga : quatrième meilleure attaque du championnat avec onze buts marqués, mais aussi antépénultième défense avec treize buts encaissés. Pourtant, une lumière attire l’attention au milieu de ce décor : Kang-in Lee, numéro 20 des Blanquinegros, de plus en plus influent au sein d’un collectif qui fait confiance à La Paterna, son historique centre de formation. Cela tombe bien : Kang-in sort de ce moule.
Incheon, émission télé et rencontre avec Ji-sung Park
Mais comment un garçon d’origine sud-coréenne est-il parvenu à rejoindre la pépinière du FC Valence ? La réponse se trouve entre un consensus familial et un talent hors du commun rapidement médiatisé. À Incheon, l’enfant Lee, déjà dingue de foot, participe en 2007 au show télévisé Fly Shoot-Dori où il affronte des adversaires de tout le pays. Vainqueur du concours, l’équipe du gamin fait forte impression à Yoo Sang-Chul, son directeur durant l’émission, et Lee va intégrer dans la foulée le centre de formation privé de l’ancien international sud-coréen (123 sélections entre 1994 et 2006, N.D.L.R). Toutefois, ce prix remporté engendre également une récompense collective, puisque l’équipe de Kang-in est invitée à tourner une publicité à Manchester en compagnie de Ji-sung Park, l’icône du pays. Accompagnant leur fils durant l’expérience en Angleterre, les parents comprennent que leur progéniture est véritablement douée.
Dans les faits, Kang-in est sans cesse en avance sur sa catégorie d’âge. En 2009, il intègre les U12 du Incheon United FC à huit ans. L’année suivante, il revêt la tunique du Flyings FC pour enchaîner avec un essai au FC Valence. À cette époque, la barrière de la langue est si difficile pour le gamin né en 2001 qu’il se retrouve à passer des tests au sein de la génération 2000 où évolue déjà Ferran Torres, Abel Ruiz, Víctor Chust ou Hugo Guillamón. Sur la pelouse pourtant, l’écart générationnel ne se ressent pas. Xavi Mocholí, son premier évaluateur au sein du FC Valence, tombe instantanément sous le charme du gaucher. « C’était lors de la saison 2014-2015 que j’ai pris connaissance de sa présence au centre, évoque Paco Cuenca, actuel entraîneur adjoint des U19 du FC Valence. Lors de mon expérience en tant qu’entraîneur des U15, je l’ai ajouté dans mon effectif, alors qu’il n’avait que treize ans. C’était déjà un joueur très talentueux et créatif, il compensait son manque conditionnel par une habileté footballistique et une vision du jeu bien au-dessus de la moyenne. Les deux forces de Kang-In sur le terrain, c’était sa technique et son intelligence. Le contrôle, la passe et la frappe constituaient de réels atouts chez lui, sa marge d’erreur était ultra réduite. »
Cuenca : « Kang-in ne laisse rien au hasard »
Avant de s’engager chez les Murciélagos (les Chauves-Souris, en VF), Kang-in Lee a vu ses parents réaliser des efforts conséquents pour lui offrir une formation européenne précoce. Après un déménagement familial avec ses deux sœurs aînées à Puçol en proche banlieue de Valence, le garçon intègre un collège de proximité et La Paterna où son père, Un-seong, professeur de taekwondo, l’amène et vient le chercher tous les jours d’entraînement. Au départ, Kang-in communique avec son traducteur de téléphone portable pour se faire comprendre, mais rapidement, ses interlocuteurs lui conseillent de stopper cette technique et de passer par l’oral. Discipliné depuis son plus jeune âge via les préceptes de l’art martial enseignés par le paternel, Kang-in s’exécute et s’imprègne de la culture locale sur le terrain comme en dehors pour permettre à sa graine de champion d’éclore. « Quand il devait se préparer à un match, que ce soit dans le vestiaire ou pendant les voyages, c’était un joueur focalisé sur l’objectif de devenir professionnel, rembobine Cuenca. Il se dédiait à plein temps là-dedans, comme un étudiant modèle va préparer ses examens de façon ordonnée et régulière au quotidien. Il connaît tous les chapitres sans exception. C’est une personne capable de te demander des explications supplémentaires sur le profil du prochain adversaire, le type de système dans lequel nous allions jouer et la justification de ce système. Même après chaque rencontre, il souhaitait débriefer dans la foulée pour savoir là où il devait s’améliorer. Tu lui disais « OK, tu as bien joué, maintenant tu dois récupérer », il se renseignait pour que sa récupération soit optimale. Kang-In ne laissait rien au hasard. Dans ce registre, il me rappelle beaucoup Ferran Torres. »
Plus âgé que son successeur sud-coréen, Torres faisait partie jusqu’à la saison dernière de l’effectif du FC Valence. C’était avant sa décision de quitter le club pour Manchester City contre une indemnité de transfert estimée à 35 millions d’euros bonus compris. Si perdre un espoir de 20 ans ne doit pas restreindre les ambitions du club, il semble tout de même essentiel de conserver Kang-in Lee au-delà du 30 juin 2022, date de l’échéance de son contrat. Dès lors, une potentielle qualification européenne en 2021-2022 pourrait convaincre l’actuel meilleur passeur du club cette saison (3 passes décisives en 7 matchs) de poursuivre son aventure à Valence et de suivre les pas de David Silva, son sosie footballistique. « J’espère de tout cœur que nous parviendrons à nous qualifier en Coupe d’Europe, conclut Cuenca. Je ne peux pas m’exprimer sur son avenir, mais j’espère que Kang-In sera encore au club pendant de nombreuses années, car il est issu de notre académie, il connaît la manière de concevoir le football au FC Valence. Il a réalisé un Mondial U20 fantastique en Pologne (vice-champion du monde avec la Corée du Sud, N.D.L.R), où il avait récolté le trophée du meilleur joueur de la compétition. Il est né à des kilomètres de Valence et pourtant, il connaît parfaitement notre philosophie. C’est un joueur international supplémentaire, et posséder un footballeur de ce type est une grande force qui peut aller au-delà du sport. » Hygiène de vie, taekwondo et football font un bon ménage à trois pour perdurer dans le temps, Zlatan Ibrahimović peut le confirmer.
Par Antoine Donnarieix
Propos de PC recueillis par AD.