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Juventus : sans couleur à Paris

Par Adrien Candau
5 minutes
Juventus : sans couleur à Paris

Reliftée par un mercato conséquent, la Juventus défie pourtant le PSG en affichant des ambitions à peu près aussi minimalistes que le jeu qu’elle délivre ballon au pied. Structurellement malade, la Vieille Dame peut-elle seulement résister à un club francilien qu’on aura rarement vu aussi fringant individuellement, à l’heure d’entamer sa campagne de C1 ?

Massimiliano Allegri est l’entraîneur de la Juventus. Un club 36 fois champion d’Italie. Neuf fois finaliste de la C1, pour deux victoires. La dixième écurie footballistique qui engendrait le plus revenus au monde en 2020. Voilà pourtant ce que le technicien italien avait à dire samedi dernier des ambitions de son équipe, avant d’affronter le PSG ce mardi : « Le PSG ? Soyons réalistes… Le match à gagner, c’est celui à domicile contre le Benfica, qu’on jouera lors de la prochaine journée de Ligue des champions. » Voilà à quoi ressemble donc depuis deux ans la Juventus version Allegri : un grand club, avec de toutes petites ambitions.

Le grand vide de Florence

Pour s’en convaincre, il suffisait de s’infliger le visionnage des cinq premiers matchs de la Vieille Dame en Serie A cette saison. Son premier succès avait des airs de trompe-l’œil, face à une formation de Sassuolo plus joueuse, plus entreprenante, mais plantée par les exploits individuels d’Ángel Di María et Dušan Vlahović. L’illusion, néanmoins, ne pouvait durer. Collectivement éteinte face à la Sampdoria (0-0), cohérente une mi-temps face à la Roma avant de s’effondrer ensuite (1-1), la Vieille Dame enquillait deux matchs nuls plutôt ternes. Son succès sans relief contre La Spezia (2-0) – encore une fois grâce à un coup franc hallucinant de Vlahović – ne trompait déjà plus personne. Samedi dernier, le Vieille Dame touchait carrément le fond en délivrant une partition collective honteuse face une Fiorentina dominatrice, seulement privée de victoire à cause d’un penalty manqué par Luka Jović (1-1).

Alors, que se passe-t-il à la Juventus cette saison ? La même chose que lors du dernier exercice, à quelques variations près. Massimiliano Allegri est toujours aux commandes d’une équipe dont les principes de jeu seront qualifiés d’anachroniques par les plus optimistes, d’antédiluviens par les autres. Cette dernière rencontre face à la Fiorentina est en somme très illustrative de la façon dont les Piémontais abordent leurs matchs. D’abord, la Juve est une équipe séquentielle à l’extrême, capable d’imposer une pression importante à l’adversaire, mais sur des laps de temps très réduits. Face à la Roma, La Spezia, puis la Fiorentina, elle a su maximiser à chaque fois ses temps forts, pour marquer dès les 10 premières minutes de jeu. Vlahović – sur coup franc par deux fois -, puis Milik face aux Violets, lui conféraient ainsi rapidement un avantage au tableau d’affichage. Les Bianconeri sont en revanche parfaitement incapables de maintenir le niveau d’agressivité affiché d’emblée. Concrètement, l’équipe se retrouve ensuite caricaturalement à jouer bloc bas, dans ses trente mètres, sans jamais affirmer une volonté réelle de remettre le pied sur le ballon. L’idée semble de miser sur une discipline défensive exemplaire, pour ensuite filer en contre, en misant sur le talent des individualités turinoises, et de Vlahović en particulier.

Vlahović et les autres

Sommaire, mais pas complètement absurde sur le papier. La théorie, néanmoins, ne résiste pas à l’exercice pratique. Le milieu de terrain est tout sauf souverain dans les sorties de balle, la faute à une absence criante d’automatismes collectifs et à des individualités (Locatelli, Rabiot, McKennie) dont la créativité balle au pied reste limitée. Les latéraux se projettent assez peu dans la phase offensive, et le trio d’attaque en est souvent réduit à se débrouiller tout seul devant. La densité que la Juve met dans et aux alentours de sa propre surface lui assure la plupart du temps une couverture défensive satisfaisante, mais elle déséquilibre aussi son bloc équipe, aligné bien trop bas pour porter le danger sur le but adverse. Dans cette optique, elle doit nécessairement conclure le peu d’occasions qu’elle se procure, ce qui confère à Dusan Vlahović (déjà auteur de 4 buts en autant de matchs de Serie A) un rôle absolument déterminant. Réduire l’influence du Serbe pourrait bien permettre au PSG de stériliser le peu de génie offensif de la formation piémontaise.

Acculée sur ses bases, la Juve n’est par ailleurs pas imperméable à l’erreur. À Florence ce samedi, elle a beaucoup subi, ne totalisant que 40% de possession et en concédant 17 tirs, pour seulement 4 tentatives de son côté. Surtout, elle aurait pu perdre la rencontre, alors que Leandro Paredes – auteur d’une main dans la surface – avait offert un penalty aux Violets, manqué par Jović. Une erreur parmi d’autres : si Gleison Bremer – recruté au Torino cet été – a solidifié l’axe juventino, les côtés de la défense bianconera restent relativement friables. À droite, Juan Cuadrado – ailier de formation – n’excelle ni dans le placement, ni dans le un-contre-un, quand Alex Sandro n’est aujourd’hui qu’un latéral assez banal et oubliable de Serie A. Cette équipe-là peut-elle seulement jouer un sale tour au PSG ? La chose n’est pas impossible. En phase de poules face à Chelsea la saison dernière, la Vieille Dame avait barricadé sa surface, avant de l’emporter contre le cours du jeu, grâce à un pion de Chiesa. Mais, là encore, l’illusion ne pouvait pas tenir. Au retour, la Juve avait encaissé un humiliant 4-0 en Angleterre. Finalement, Massimiliano Allegri a sûrement raison quand il explique qu’il n’est pas « réaliste » d’imaginer sa formation finir devant le PSG, au bout de la phase de groupes. Ce qu’il oublie de rappeler, c’est qu’il est l’un des principaux responsables des maux d’une équipe qui semble rétrécir, année après année.

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