- Ligue 1
- J13
- Lens-Troyes (4-0)
Jusqu’où peut mener la folie lensoise ?
En collant une fessée à Troyes ce vendredi (4-0), Jonathan Clauss et compagnie n’ont pas seulement remis la main sur la deuxième place de Ligue 1 en faisant vaciller Bollaert. Après un tiers de championnat, ils ont aussi confirmé que le top 5 n’était pas trop grand pour leurs épaules.
La légende raconte qu’autour de Bollaert, les soirs de victoire, les kilos de patates s’écoulent encore plus vite dans les friteries. Histoire de se remettre de ses émotions : Lens régale, a la dalle et s’est offert un récital face à des Troyens fantomatiques. Les américains-saucisses ont donc coulé à flots, et Franck Haise est venu s’installer en conférence de presse avec une banane qui en disait long sur la satisfaction du bonhomme : « On a quasiment tout maîtrisé. Jusqu’à la 95e minute, on faisait du contre-pressing et on laissait des un-contre-un pour récupérer le ballon haut. C’est ce que j’ai demandé à la pause. À un moment donné, sur une situation offensive, on est à huit dans la surface de réparation. C’est ce que l’on recherche. » Et ce qui explique la maîtrise artésienne, autour d’un triptyque offensif Kalimuendo-Kakuta-Saïd où il y « a beaucoup de liberté, s’enthousiasme le dernier nommé face à la presse, auteur de son quatrième but de la saison sur un modèle de construction initié au milieu de terrain. On est à l’aise techniquement, on peut redescendre entre les lignes faire le jeu. Si je descends, les deux autres sont devant. »
Dix buteurs différents, on partage ?
L’ex-Toulousain insiste : « On garde les pieds sur Terre et il n’y a pas de hiérarchie, c’est l’équipe qui prime. » Les stats parlent pour lui, puisque le Racing en est à dix buteurs différents pour 25 pions marqués (deuxième attaque de France) et n’a toujours pas perdu deux fois de suite. Après trois mois de compétition, les Lensois ont aussi fait tomber l’OM au Vélodrome, Monaco à Louis-II et tapé Lille pour la première fois en quinze ans. Saïd jure évoluer « dans la meilleure équipe de (sa) carrière », pendant que le ferrailleur box-to-box Seko Fofana n’a pas connu pareille atmosphère « depuis les équipes de jeunes à Manchester City. Si on ne doute pas aujourd’hui, c’est parce qu’on essaye de trouver les solutions à chaque fois. Il n’y a pas de raison d’avoir peur, nous sommes heureux. »
Difficile de trouver des défauts à cette formation. Une semaine plus tôt, la naïveté et le manque de rigueur en première période à Lyon lui avaient coûté le nul (2-1), mais elle a rebondi sans chipoter. Les pistons (deux buts et une passe ce vendredi pour Clauss, un but pour Frankowski) remontent leur couloir comme ils descendraient une piste noire dans les Alpes, Gaël Kakuta a besoin d’un appui pour mettre son homologue dans les cordes, et Lens a le vent dans le dos. Au bout de 45 minutes, face à Troyes ? Neuf tirs cadrés, trois buts. « Même à l’époque du titre, en 1998, on ne voyait pas un jeu comme ça », jurait Greg à la pause, un fidèle, dans les dédales d’un Bollaert plein à craquer devenu forteresse (quatre victoires, deux nuls, une défaite).
Goûter ces moments, mais garder la tête froide
« On ne sait pas ce qu’il se passera dans deux semaines, temporise Franck Haise. Il faut goûter ces moments, mais garder la tête froide. Des matchs, on va encore en perdre. Mais il y a une grande confiance. » Le technicien, qui s’est surpris à applaudir la reprise des Corons en plein match, parle d’un « cap franchi en matière de confiance ». Le genre de cap qui peut permettre de s’installer durablement dans le top 5 ? La saison dernière, l’Europe lui avait filé entre les doigts après un sprint en eau de boudin (trois défaites sur les quatre dernières journées). Si les Artésiens s’enfoncent d’abord dans l’hiver (il y aura notamment la réception de Paris, le 4 décembre) avant de penser au printemps prochain, Haise est conscient de « se rapprocher du maintien. La première chose qu’a dite le président en début de saison, c’est de pérenniser le club en Ligue 1. Après, je connais le travail fourni et les compétences de chacun. Je vois les matchs que l’on fait, on ne se fixe pas de limites. Les points que nous avons sont mérités. » Pas la peine de lui parler de confiance disproportionnée, il est « là pour instiller un peu de doute. Il faut toujours trouver une sorte d’équilibre. Pour faire de grandes perfs, il faut avoir ce léger doute, et c’est mon rôle de l’amener. » Seko Fofana évoque lui« un groupe sain », où les leaders pullulent (Kakuta, Cahuzac, Leca, Sotoca) « sans aucun problème de mentalité. Il y a une fin à tout, mais je n’ai pas envie d’y penser et on ne doit pas se projeter. Je ne regarde pas le classement, et je ne pense pas à l’Europe. Le plus important, c’est l’image que l’on donne. Avec les supporters, c’est la première fois que je vis un truc pareil. La saison dernière, ils n’étaient pas là et on s’emmerde quand c’est à huis clos. Là, c’est l’harmonie. » Qu’elles sont loin, les années galère de Ligue 2…
Par Florent Caffery, à Lens