- Ligue 1
- J23
- Marseille-Monaco
Jovetić, l’hélicobide
Il y a cinq mois, Stevan Jovetić mettait un vent à l'OM pour signer à l'ASM. Depuis, il a un peu de mal à reprendre son souffle.
L’histoire a fait rire ou grincer des dents selon le camp. Fin août 2017, quelques heures avant que l’ASM n’atomise l’OM (6-1) au stade Louis-II, Stevan Jovetić et Jacques-Henri Eyraud ont partagé le même hélicoptère pour se rendre de Nice à Monaco. Jusque-là, rien d’anormal, si ce n’est le côté cocasse de la situation, Jovetić ayant éconduit le club phocéen pour celui de la Principauté dans les derniers jours du mercato. Mais le Daily Mirror croit savoir que le président délégué de l’Olympique de Marseille a engagé la conversation et s’est vanté d’être en passe de recruter Jovetić à Jovetić lui-même, ne l’ayant pas reconnu. Anecdote démentie par les intéressés, peut-être par diplomatie, plus probablement car elle a été inventée dans les rédactions pleines d’imagination du Daily Mirror. Fiction délirante ou réalité gênante, c’est bien l’AS Monaco qui a versé pour de vrai onze millions d’euros à l’Inter afin de s’offrir l’élégant attaquant monténégrin.
Victime de son corps
Cinq mois se sont écoulés depuis, et le joueur formé au Partizan Belgrade n’a plus vraiment eu l’occasion d’agiter les médias, traversant la première partie de saison mitigée de l’ASM comme un fantôme. Après avoir enchaîné trois titularisations encourageantes au mois de septembre, il a peu à peu disparu des feuilles de match. En cause, non pas son niveau, mais cette fâcheuse tendance à se blesser au mauvais moment qui le poursuit depuis le début de sa carrière. De la campagne européenne catastrophique des siens, il n’aura participé qu’à une seule rencontre, celle à Istanbul, sans doute la meilleure copie rendue par l’équipe du Rocher en Ligue des champions.
En Ligue 1, il n’a passé que trois cents minutes sur les terrains. Maigre dans une attaque qui n’a eu de cesse d’être remodelée au fil des matchs par Leonardo Jardim. Frustrant surtout, tant le profil de l’ancien joueur de la Fiorentina n’a pas d’équivalent dans l’effectif asémiste. Du monotâche Guido Carrillo – parti à Southampton il y a quelques jours – dont on savait quoi attendre, aux remuants mais brouillons Keita Baldé et Adama Diakahby dont on ne sait qu’espérer, Stevan Jovetić n’a pas souffert d’une concurrence folle. Mais dans un collectif désaccordé, son jeu subtil et un brin prétentieux n’a pu être mis en valeur. Difficile d’affirmer si ce Monaco qui s’accroche tant bien que mal a davantage besoin de retrouver le génie ou la simplicité qui faisaient sa force. Ce qui est certain, c’est que malgré ses gestes d’esthète, Jovetić n’a pas encore prouvé qu’il était assez génial pour briller en jouant simple.
Victime de son profil
Alors qu’il retrouve peu à peu ses sensations en ce début d’année après une blessure musculaire, l’ancien Interiste va être confronté à un autre problème, presque insoluble. Que ce soit en 4-4-2 ou 4-2-3-1, tant que Thomas Lemar se morfondait sur le côté gauche de l’attaque monégasque, il y avait une place dans le onze pour Jovetić et son profil de neuf et demi. Mais l’international français a depuis conquis l’axe, en même temps que l’ASM s’est refait une santé. Dès lors, avec l’indéboulonnable Falcao en neuf et Lemar en meneur de jeu axial, celui qui a parfois des airs de Berbatov du pauvre a peu de chance de figurer parmi les titulaires, si ce n’est lorsque Jardim repose certains de ses cadres, comme ce fut le cas mercredi en Coupe de France.
Là où la polyvalence de Keita Baldé et Adama Diakhaby s’avère être une arme pour disputer l’occupation des couloirs à Rony Lopes et Rachid Ghezzal, l’attaquant monténégrin souffre de son profil purement axial qui le condamne forcément à être un second choix face aux deux principales stars de l’effectif. À moins d’un passage hypothétique en 4-4-2 losange ou d’un retour de Lemar sur le côté, Jovetić devra donc se contenter de dix, vingt, trente minutes par match et profiter des absences. Cela suffit parfois amplement pour aider son équipe à grappiller les points les plus décisifs. À l’automne, il en a déjà fait gagner un à Amiens. C’est mieux que rien. S’il souhaite en ajouter quelques-uns, ça commence dès ce dimanche, pour peu qu’il ait encore envie de faire rire jaune le Vélodrome.
Par Chris Diamantaire