- Les pépites de « Football Manager » dans la vraie vie
José de la Cuesta, mou du genou
Dans un univers parallèle issu de Football Manager ou de son ancêtre Championship, ils ont été des cracks : buteur industriel, muraille infranchissable, artiste ultra-créatif... La réalité a été moins tendre pour eux. Dans cette funeste caste : José De La Cuesta, défenseur colombien et cousin germain d'Abou Diaby.
« 31 août 2007, quelques minutes avant minuit, Arsenal annonce fièrement la signature de José De La Cuesta, le solide défenseur central de l’OM. L’indemnité s’élève à 22 millions d’euros, soit le montant de la clause libératoire du contrat de l’international colombien. Le manager du club phocéen aurait donné sa démission dans la foulée, pris par le remord de ne pas avoir prolongé son joueur plus tôt. Pour le monde du football français, ce transfert de dernière minute est un choc au vu du décalage entre le montant déboursé par les Gunners et le niveau de leur recrue. Dans 100% Foot, la figure emblématique Thierry Roland y est allé de son commentaire : « On ne m’empêchera pas de dire ce que j’en pense : j’appelle ça se la faire mettre bien profond… » Pour rappel, en quatre saisons à Marseille, le Colombien a disputé 140 matchs toutes compétitions confondues, remportant trois championnats, une Coupe de l’UEFA et une Ligue des champions. La Ligue 1 vient de perdre l’une de ses valeurs sûres… »
Le paragraphe que vous venez de lire est inspiré d’une partie de Championship Manager 2004, édition du célèbre jeu dans laquelle José de la Cuesta fait figure de monstre en défense centrale ou au poste d’arrière gauche. Malheureusement, dans la vraie vie, le Colombien n’a pas eu la même réussite malgré de belles promesses en début de carrière.
Le chemin de croix européen
Né le 10 février 1983 à Medellin, José Julián de la Cuesta Herrera a tout pour réussir dans le football : gros gabarit et aisance balle au pied. En 2003, il fait partie des piliers de la sélection U20 colombienne, dirigée par Reinaldo Rueda, qui finit 3e du Mondial. Ses coéquipiers se nomment entre autres Edixon Perea, Abel Aguilar ou encore Víctor Hugo Montaño. L’attaquant de Montpellier se souvient de De la Cuesta : « C’était un pilier de l’équipe. Il jouait déjà dans un gros club et avait des matchs pros dans les jambes. Il apportait de la sérénité derrière, notamment grâce à son aisance technique. C’était l’un des patrons du groupe. » Le défenseur brille au Mondial U20 et logiquement, les portes du Vieux Continent s’ouvrent. Il choisit l’Autriche et l’Austria Vienne. Luis Guillermo Montenegro, journaliste pour le quotidien colombien El Espectador écrivait le 6 février 2014 qu’en mettant les pieds en Europe, De la Cuesta avait inauguré son « martyr » .
Car le défenseur colombien a une particularité qu’il aurait bien aimé éviter : à l’image d’un Abou Diaby en pleine bourre, De la Cuesta se blesse à foison. En une décennie européenne, il ne fait qu’une saison presque pleine. La plus grosse poisse : rupture du croisé antérieur du genou gauche en 2011 lors d’un match de D2 espagnole contre le Rayo Vallecano avec Albacete. Sur le plan des résultats, ce n’est pas plus reluisant : quasiment inutilisé en Autriche, il vit deux relégations en D2, puis en D3 espagnoles avec Cadiz. Jamais deux sans trois, il termine bon dernier de la Segunda avec Albacete en 2011, l’année où il joue le plus, puis se pète le genou…
Une poisse « moyennement grande »
Dans une interview en 2012 pour El Pais (celui de Cali), José de la Cuesta déclare que le football est injuste avec lui dans « une proportion moyennement grande » . La preuve, quand il se fait le croisé, il vient d’obtenir la nationalité espagnole, ce qui est censé aider sa carrière. On peut pas tout avoir, mon gars… Et comme la poisse qui suit le Colombien est une poisse en « proportion moyennement grande » , l’opération ne porte pas ses fruits. De la Cuesta rechute après six mois de reprise et doit subir une seconde intervention sur le croisé antérieur et le ménisque, neuf mois après la première. Quand il revient enfin, Albacete résilie son contrat. Histoire de bien le soutenir moralement. « Malheureusement, il a eu trop de problèmes physiques. Avec sa qualité, sa touche technique, il aurait pu jouer dans un grand club espagnol car il a un profil très recherché en Espagne : technique, intelligent dans les déplacements… Sans blessures, il avait la qualité pour aller très haut » , estime son ancien partenaire Víctor Hugo Montaño. Mais le signe indien est clairement tatoué sur le visage de De la Cuesta : « Il était comparé à Andrés Escobar au pays, en raison de son style » , se souvient Montaño. Rappeler le souvenir d’un joueur assassiné en 1994 après avoir mis un csc en Coupe du monde, on a connu de meilleurs présages…
Mais faute d’avoir de la chance, De la Cuesta a du cœur et de la persévérance : il décide de s’entraîner seul pour récupérer la forme et retrouver un club. À l’Atlético Nacional Medellín, puis à Cádiz, on est moins mesquins qu’à Albacete : on l’autorise à s’entraîner, mais sans pour autant le faire signer. Faut pas déconner non plus, il n’y a qu’une seule Mère Teresa. Les Sud-Américains sont très croyants et ils ont peut-être raison : l’histoire de José de la Cuesta se termine dans la joie et l’allégresse, car le défenseur central a enfin trouvé quelqu’un qui lui veut du bien : César Pastrana, le président de l’Independiente Santa Fé. Ce dernier a décidé de lui ouvrir les bras après un coup de téléphone du joueur. De septembre à décembre 2013, De la Cuesta n’est pas payé, mais il s’entraîne, transpire et se remet en condition. Début 2014, il signe un contrat et, tout juste arrivé, il envoie son club en phase de poules de la Copa Libertadores grâce à un but contre les Mexicains de Morelia. Son président lui aurait fait un gros câlin après le match. Pour Montaño, ce retour en grâce est un beau happy ending : « Son retour est mérité. Il s’est posé les bonnes questions, et le fait de revenir au pays l’a aidé. Il s’est prouvé à lui-même qu’il pouvait revenir, c’est une bonne chose. Aujourd’hui, il a de nouveau un nom en Colombie et joue dans un club coté. » Elle est pas belle, la vie ?
José de la CuestaNé le 10 février 1983 à Medellin
Défenseur centralInternational colombien (8 sélections)
Clubs successifs :Atlético Nacional Medellin (1998-2001), Austria Vienne (2001-2003), Atlético Nacional Medellin (2003-2004), Cadiz (2004-2010), Valladolid (2006-2007), Albacete Balompié (2010-2011), Independiente Santa Fe (depuis janvier 2014)
Palmarès :Copa Merconorte en 2000 avec l’Atlético Nacional Medellin
3e de la Coupe du monde des U20 avec la Colombie en 2003 Demi-finaliste de la Gold Cup 2005 avec la Colombie
Promotion en 1re division espagnole en 2005 avec Cadiz Relégation de 1re division espagnole en 2006 avec Cadiz
Relégation de 2e division espagnole en 2008 avec CadizRelégation de 2e division espagnole en 2011 avec Albacete
Par Nicolas Jucha