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- Journée internationale de l"infirmière
Jonathan Delaplace, infirmier footballeur
Contrairement à la plupart des joueurs de Ligue 1, Jonathan Delaplace a attendu 24 ans pour signer son premier contrat professionnel. Avant ça, il a eu le temps de faire beaucoup de choses, dont passer et obtenir son diplôme d'infirmier.
La journée internationale des infirmières, c’est un peu celle de Jonathan Delaplace. Parce qu’au final, s’il n’était pas devenu footballeur professionnel, il aurait sans aucun doute suivi les traces de son père et de son frère, en devenant infirmier. Mais les méthodes de Florence Nightingale n’ont jamais réussi à lui faire oublier sa passion pour le football. Recalé des centres de formation en raison de sa trop petite taille – critère sur lequel on aimait beaucoup se baser dans les années 1990 –, Jonathan a persévéré et a fini par rencontrer un homme qui a changé sa vie. Non, pas David. Aujourd’hui, Delaplace a réussi à se trouver une place dans le milieu de terrain de René Girard, au LOSC. Cette saison, il a disputé 20 matchs et a inscrit deux buts. Pas mal pour un des rares joueurs qui a découvert le monde du professionnalisme sur le très tard. Et en plus, il serait même capable de soigner des joueurs sur la pelouse. Que demander de plus ?
Entre l’hôpital Bonnet et le terrain d’entraînement
Comme beaucoup de gamins de sa région, Jonathan rêve de devenir footballeur. À 13 ans, il part suivre une section sport études à Lambersart, dans le Nord, bien loin de son Var natal. Cinq ans plus tard, le jeune footballeur redescend dans le Sud retrouver son père, ne gardant du Nord qu’un refus au centre de formation du RC Lens et une tentative de baccalauréat manquée. De retour dans le Var, Jonathan tape le ballon avec le FC Belgentier, puis avec Hyères, en CFA 2. Il passe également son bac, puis se lance dans des études d’infirmier, pour imiter son père et son frère. C’est à ce moment très précis que Guy David, secondé par Athos Bandini, jette son dévolu sur le jeune Jonathan. « Moi, je l’avais aperçu lors d’un match de Coupe de France quand j’entraînais un petit club de Sainte Maxime. On avait rencontré son petit club de PHB. Je lui avais déjà trouvé des grandes qualités de vitesse. Quand on est arrivés avec Guy David, on a tout de suite voulu Jonathan » , se souvient Athos Bandini.
Bien emballé par le projet de Guy David, qui vient en personne boire le café chez les Delaplace pour convaincre le jeune milieu de terrain, Jonathan part à Fréjus. Sans arrêter ses études. « Il étudiait à l’hôpital Bonnet, juste à côté du stade où on s’entraînait. Je pense que c’était une formation assez lourde, puisque ça a quand même duré deux ans, sa formation, et je sais qu’il bossait énormément là-dessus » , raconte l’adjoint de Guy David. Très appliqué avec les pansements et les piqûres, Delaplace ne l’est pas moins côté football. « C’est un joueur très discipliné, très agréable à entraîner parce qu’il est très sérieux. Il n’a que ce qu’il mérite. Partout où il est allé, il a appris de tout le monde. Il s’est adapté à tous les postes auxquels on l’a fait jouer » , confie monsieur Bandini qui n’a jamais eu aucun problème avec Jonathan. « Je ne me rendais même pas compte qu’il avait ses études à côté. »
Un décès, un diplôme et un contrat
Compétent sur le terrain, concentré sur ses études, Jonathan Delaplace a aussi su faire preuve d’une grande force de caractère. Le 30 août 2008, après un match contre l’équipe réserve de l’ASSE, Guy David est victime d’un arrêt cardiaque. « Ce jour-là, c’est le père de Jonathan qui a ramassé Guy David. C’est lui le premier qui était sur les lieux. C’est sûr que le choc psychologique a été très important » , raconte Athos Bandini, qui reconnaît avoir quant à lui perdu un père spirituel. Alors oui, le malheur vient à cheval et le bonheur à pied. Mais tout ce qui importe, c’est qu’il finisse par arriver. En 2010, tout sourit à Jonathan. En plus de son diplôme d’infirmier, qu’il décroche à Fréjus, il est repéré par les scouts du Zulte Waregem, qui lui offre son premier contrat professionnel. Après trois belles saisons en Belgique, il est finalement transféré au LOSC, où il fait son trou, sur le tard. Et devient professionnel sur les terres qui symbolisent ses premiers échecs. Beau retournement de situation.
Athos Bandini n’a jamais douté que le milieu de terrain deviendrait un bon joueur professionnel. Il le regarde évoluer à Lille, en lui prédisant même un avenir encore plus radieux. « Je pense qu’il peut passer encore des paliers et qu’il peut devenir très intéressant pour un club qui a plus de facilités à jouer l’Europe » , explique-t-il. Quelques années après avoir entraîné un gamin discret et appliqué à Fréjus, il se souvient de son seul défaut : « Il ne marquait pas beaucoup de buts, alors quand ça lui arrivait, c’était vraiment exceptionnel. Quand je le voyais partir devant un but, j’étais inquiet pour mon équipe. Mais il a beaucoup progressé là-dessus. Il manquait à l’époque de finition. » Athos ne lui en tient de toute façon pas rigueur. Il a appris à connaître un bon mec. « Je suis très content de l’avoir connu. C’est un super minot » , conclut celui qui prend encore régulièrement de ses nouvelles.
Par Gabriel Cnudde