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Jónas Tór Næs : « Notre tradition est britannique »
International féringien depuis 2008, le latéral Jónas Tór Næs raconte sa vision du foot. Entre le vent, un modèle islandais et l'immense Todi Jónsson.
Où évoluent la plupart des joueurs de la sélection ? La moitié des joueurs évolue ici, l’autre moitié à l’étranger. Quand les joueurs féringiens sont bons, ils s’exportent généralement en Islande ou au Danemark, ce sont les deux destinations principales. Certains joueurs de la sélection évoluent aussi en Norvège. Notre gardien de but, Gunnar Nielsen, a même joué à Manchester City, c’est le premier Féringien à avoir disputé un match de Premier League. Moi, par exemple, je joue en Islande, à IBV sur les îles Vestmann, où David James a joué il y a quelques années. On a un stade magnifique au pied d’une falaise. Les îles Vestmann ressemblent beaucoup aux Féroé d’ailleurs.
Le succès récent de l’Islande a-t-il donné des idées aux Féroé ?En matière de population, l’Islande est déjà un petit pays, et nous, nous sommes six fois moins que les Islandais. Mais, bien sûr l’Islande est un exemple pour toutes les petites nations, on doit prendre exemple sur eux, d’autant qu’on a des caractéristiques communes. Les clubs islandais sont très pros et il y a une mentalité fantastique. Avec l’Euro à 24 nations, c’est moins impossible d’envisager un exploit (rires). Mais nous sommes encore très loin de cela.
En quoi pourriez vous vous inspirer de l’Islande ?L’Islande comme les îles Féroé sont des endroits au climat très rude, très venteux, où il y a souvent des tempêtes. Ici, il y a deux mois en hiver où il est impossible de jouer à cause du vent. Au niveau du développement de leur football, les Islandais ont donc créé des terrains indoor pour jouer quand les conditions sont mauvaises, nous n’avons pas encore cette chance, mais l’an prochain il y aura un terrain indoor à Torshavn.
Tu te souviens de matchs où le vent a joué un rôle déterminant en votre faveur ?Je n’ai pas le souvenir d’un match en particulier, mais à plusieurs occasions, les conditions météo ont pu gêner l’adversaire. Notre stade a été construit en 2000, mais avant, l’équipe nationale jouait tous ses matchs à domicile à Toftur sur l’île d’Eysturoy. Un endroit magnifique au sommet d’une montagne. Ce qui fait que le stade n’est pas abrité du vent du tout. Souvent, ça soufflait très fort et la pelouse était en mauvais état, je suppose que ça a pu nous aider.
Au Torsvallur aussi la météo est un composant important ?Oui, avant tous les matchs, nous analysons les conditions météo et leur évolution. Par exemple il y a plusieurs matchs où nous avons choisi notre camp en fonction du sens du vent. Et où nous savions que le vent allait tourner à la mi-temps. Je ne sais pas si les adversaires se préoccupent de cela.
Comment tu définirais le football féringien, son style ?C’est un football très combatif, laborieux. Nous donnons tout, et nous travaillons dur, c’est notre seule chance d’obtenir des résultats. On va sur le terrain pour gagner à chaque fois. Quant aux influences, je dirais que nous pratiquons un football britannique, avec du long ball. Nous sommes plus dans une tradition britannique que scandinave. C’est en fait similaire au style islandais, mais bien sûr ils sont plus forts que nous. Quels clubs les habitants des Féroé soutiennent-ils ?Ici, chacun a un club local. Le plus populaire est sans doute le HB 36 de Torshavn. Mais le championnat qui est de loin le plus suivi est la Premier League. Je dirais que chaque Féringien qui aime le foot soutient une équipe locale et une équipe anglaise. Manchester United ou Liverpool dans l’immense majorité des cas. Ici, un Manchester United-Liverpool, c’est un vrai événement, qu’on vit comme un derby ici aussi.
Quels sont les meilleurs résultats historiques de la sélection ?Si tu demandes aux gens, tout le monde ici te parlera de la victoire contre l’Autriche en 1990. C’était le premier match officiel de la sélection en compétition internationale et nous avons battu l’Autriche (1-0). Chaque Féringien se souvient de ce jour. C’est le match mythique de la sélection, c’était une fête nationale. Plus récemment, nous avons battu la Grèce à deux reprises lors des éliminatoires de l’Euro 2016, nous avons gagné chez eux alors que personne ne s’y attendait, puis ici à Torshavn.
Qui est le plus grand joueur de l’histoire des Féroé ?Je pense que c’est Todi Jónsson, un avant-centre qui évoluait au FC Copenhague au début des années 2000, a été trois fois champion du Danemark et meilleur buteur du tournoi. C’est le plus grand joueur de l’histoire des Féroé. Mais la relève est prometteuse. On a actuellement beaucoup de jeunes, qui sont partis tôt au Danemark ou en Norvège et peuvent atteindre son niveau.
Quelle est l’importance du football aux Féroé ?Le football est le sport le plus populaire ici, le sport roi. Mais notre sport national est l’aviron. Pour la fête nationale, dans la baie de Torshavn, il y a une compétition où chaque village a sa propre embarcation. C’est un événement très important ici.
Propos recueillis par Arthur Jeanne, à Tórshavn