- Ligue 1
- J16
- Strasbourg-PSG (1-1)
Jonas Martin/Marco Verratti : rendez-vous chez le proviseur
Depuis mercredi et la rencontre entre Strasbourg et le PSG (1-1), Jonas Martin et Marco Verratti échangent les amabilités par journaux interposés. Aux sources de la discorde, un match où les noms d’oiseau ont fusé un peu plus qu’à l’accoutumée. Quelques doigts d’honneur et un gros tacle plus tard, les acteurs poursuivent leurs explications face aux journalistes. Ces babillages étant dignes de la cour de récré, une conseillère principale d'éducation (CPE), un instituteur à la retraite, une pionne et un policier ont accepté de nous livrer leurs précieux conseils pour prévenir ce genre de conflit.
Mercredi, Strasbourg et le PSG se sont quittés dos à dos à la Meinau (1-1). Seulement, plus que la rencontre, ce sont les accrochages entre le Parisien Marco Verratti et le Strasbourgeois Jonas Martin qui ont fait parler. Le premier reproche au second un tacle appuyé et des « insultes sur sa famille » tout du long. Le second reproche au premier d’ « envenimer » les choses et de lui avoir adressé des doigts d’honneur. Impossible de savoir qui a commencé. Impossible de savoir qui a tort, qui a raison. Une certitude cependant : ces gamineries sont dignes des plus belles querelles de la cour de récréation. Et, en la matière, c’est dans le corps enseignant que se logent les meilleurs experts. Alors, dérive inéluctable ou comportement réprimable ? À l’école de la République, deux écoles s’opposent.
Au sommet de la hiérarchie, Anaïs, CPE dans un lycée professionnel de la banlieue de Rouen, est une adepte de l’ « action-réaction » . Intervention rapide histoire que les acteurs continuent la rencontre dans le respect de l’autre et la dignité. Le son de cloche est différent du côté d’Irène, pionne dans un collège du 17e arrondissement de Paris, et de Patrick, ancien instituteur qui coule des jours heureux à Meaux (Seine-et-Marne). Irène : « Tant que ça ne monte pas dans les décibels ou qu’ils n’en viennent pas aux mains » , les acteurs peuvent s’injurier en toute quiétude. Bien conscient qu’ « avec les ballons de foot, ça monte tout le temps dans les tours » , Patrick réglerait plutôt l’affaire à coups de sourde oreille : « Si c’est juste des mots, autant faire comme si on n’avait rien entendu. »
Patrick : « Si Verratti est comme ça, c’est parce qu’il est petit »
Le conflit a toutefois pris des proportions inhabituelles quand, à la 23e minute, Jonas Martin a lâché un tacle sur Verratti qui a déclenché un tête-à-tête entre les protagonistes. Il est toujours temps de convoquer les parties pour qu’elles s’expliquent. Un passage aux aveux histoire de repartir sur de meilleures bases. À ce stade, Anaïs a sa petite idée : Jonas Martin pourrait avoir l’élégance d’admettre « qu’il n’est pas au niveau de Marco, donc qu’il a eu recours à des méthodes pas très licites pour ne pas avoir l’air ridicule » . Rien de mieux qu’un mea culpa sous forme de : « T’es meilleur que moi et j’ai les boules » , pour que tout rentre dans l’ordre. Quant à Verratti, à lui d’avouer à son camarade que « Oui je suis meilleur que toi, désolé » et de veiller à l’avenir à « mieux se canaliser » . En salle des profs, le ressenti est différent. Pour Patrick, ce bougre de Verratti n’est pas tout blanc : « Si Verratti est comme ça, c’est parce qu’il est petit. Et puis, depuis l’arrivée de Neymar et Mbappé, il se sent dévalorisé. Alors forcément, il en rajoute. »
Le match retour : happy-ending ou drame inévitable ?
Verratti n’en est pas à son coup d’essai. Voilà pourquoi Anaïs envisage de convoquer les parents de l’ancien joueur de Pescara. « Je suis sûre qu’ils n’ont pas pu élever leur gamin comme ça » , lâche la CPE. De l’avis de la surveillante, le plus simple reste quand même « d’interdire de jeu les bambins récidivistes » . Deux semaines sans ballon dont les deux fripons devraient profiter pour écouter les conseils de madame la CPE : « Martin, entraîne-toi une heure de plus chaque jour, histoire de te mettre au niveau ; Marco, travaille sur ton ego de manière à ne pas disjoncter à la première provocation. »
L’idée de ce travail sur soi étant de garantir des retrouvailles sereines, le 6 avril prochain au Parc des Princes. « On n’est pas dans le monde des Bisounours, s’emporte Anaïs. On ne veut pas qu’ils deviennent copains ! Simplement qu’ils ne touchent pas aux mamans, aux sœurs et aux grand-mères. »
Que fait la police ?
Que les parents de Jonas et Marco se rassurent, aucun conseil de discipline n’est nécessaire pour gérer un dossier de ce calibre. Encore moins une convocation dans les bureaux de la police. C’est ce que confirme le commissariat du 10e arrondissement de Paris, où le calme est de mise. Si les insultes dérivent en doigts d’honneur, « il n’y a pas de préjudice pénal. Franchement, si c’est juste une fois, ça ne vaut pas le coup de porter plainte. C’est sous le coup de l’émotion, faut pas se formaliser. À la limite, si c’est régulier, le destinataire du geste peut déposer une main courante. » Ou juste un doigt.
Par Pierre-Henri Girard-Claudon