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Alain Parny, les Bleu(e)s dans la peau

Par Assia Hamdi

Supporter tricolore, le Guadeloupéen Alain Parny parcourt le monde depuis 25 ans pour soutenir la France sur les grandes compétitions, dont les Jeux olympiques. Une débrouille et une passion intense pour celui qui a aussi vu depuis 1998 l’accès aux Bleus se verrouiller, et le foot au féminin se démocratiser.

Alain Parny, les Bleu(e)s dans la peau

Ce vendredi après-midi de juillet, Alain presse le pas, gare de Chelles, maillot bleu sur le dos. Sur son torse, le numéro 971 et un dessin des Antilles complètent ses couleurs. Quatre heures de covoiturage plus tard, ce retraité retrouve, à Dijon, ses copains supporters, pour France-Suède en VIP avec les familles de joueuses. Le lendemain, des photos prises avec Griedge Mbock, Sandie Toletti ou Grace Geyoro garnissent son téléphone. « Après avoir attendu la sortie des joueuses, je suis allé à la gare et j’ai pris le train de 5h30, explique-t-il. Je ne travaille plus, donc j’ai le temps de récupérer. La passion c’est la passion. »

Depuis 25 ans, voici la routine d’Alain Parny dit « Linlin », 59 ans. De France 1998 au Mondial en Australie, en passant par la victoire en Russie, il traverse le monde pour encourager les Bleu(e)s. Il y a quelques semaines, Alain s’est rendu en Allemagne avec neuf supporters. Des logements en commun et du covoiturage avec les Irrésistibles Français, l’une des onze associations de supporters reconnues par la FFF : « Je suis membre de celle de Clément d’Antibes, mais qu’importe, on supporte tous la même équipe. »

L’art de la débrouille

Après la défaite des Bleus face à l’Espagne en demi-finales de l’Euro, Alain est rentré dans l’Hexagone. « J’ai un appartement à Meaux, et mon fils y vit à l’année, pose-t-il. Donc comme mes frais sont réduits, c’était l’occasion de voir le tournoi olympique. » Au menu, France-Etats-Unis à Marseille ou France-Colombie, à Lyon, où il en profite pour voir son neveu, qui vit à Chambéry. Un tour à Nice, aussi, où Clément d’Antibes l’a hébergé pour lui permettre de recharger les batteries après le succès de la bande à Thierry Henry contre la Guinée. Avant son vol retour pour la Guadeloupe, le 14 août prochain, il aimerait pouvoir assister à la finale France-Espagne au Parc des Princes, mais ce mercredi, il n’était pas encore parvenu à mettre sa main sur un précieux sésame : « Je vais activer mes contacts pour trouver une place… »

De la débrouille à laquelle le supporter guadeloupéen est rodé depuis 1998, où un concours gagné à la radio locale l’envoie au Stade de France pour Roumanie-Tunisie. « L’ambiance entre supporters était phénoménale, rejoue-t-il. J’ai eu envie de revivre ça. » Il zappe l’Euro 2000 puis l’Asie, en 2002, « trop cher », mais en 2004, Alain fait son premier déplacement officiel au Portugal. « J’ai acheté un pack de places via la FFF. Je suis arrivé le matin de France-Angleterre après une virée en train, sans savoir où j’allais dormir », rembobine le vadrouilleur. Avec d’autres supporters, Alain débusque un logement bon marché pour les matchs à Leiria et Coimbra. La Croatie, la Suisse, avant le retour à Lisbonne pour la défaite contre la Grèce.

Gwada connexion et gros sous

Même chose deux ans plus tard : en Allemagne, il vit la finale dans l’hôtel des joueurs, parce qu’il n’arrive pas à obtenir de places. Parfois ça marche, parfois non, mais au fil des ans, Linlin trouve ses habitudes sur les déplacements : « Tant que ton équipe est en course, tu as tes billets. Et si elle est éliminée, tu es remboursé. » Surveillant au centre pénitentiaire de Baie-Mahault, Alain dédie pendant 30 ans des congés pour sa passion. Des tarifs souvent préférentiels —  90 euros les trois matchs de poule à l’Euro 2024 —, mais au Qatar, le Guadeloupéen engage jusqu’à 1 500 euros pour ses billets. « C’est un budget, concède Alain. Mais ces déplacements, ça permet aussi de vivre ces moments entre supporters. Dès que l’un de nous vient aux Antilles, on se fait signe. »

J’ai vécu l’Euro 2017 aux Pays-Bas avec la mère, la soeur et l’agent de Wendie Renard.

Linlin

Au fil des ans, son lien avec la Guadeloupe, vivier de tricolores, lui ouvre des portes : « Les Bleus ont des places accordées pour leurs familles par la FFF. Quand je suis dans l’Hexagone, je sonde mon réseau guadeloupéen. Si jamais il reste un billet, je remplace un proche : ça n’est pas pour le prix que ça coûte, ça m’évite surtout de vivre le match seul. » Après toutes ses années d’engagement, Alain n’est cependant pas autorisé à voir les Bleu(e)s en après-match, privilège des proches, « on ne me considère pas comme membre de la famille ».

« J’ai dit à Thuram que je soutenais déjà son père en 2004 »

Il en a fait, des bornes, Linlin, pour voir la France jouer. Comme en 2014, où pour arriver au Brésil, il enchaîne une traversée d’un fleuve en pirogue, en Guyane, dix heures de trajet en 4×4, et une nuit de transit à l’aéroport de Macapá avant un vol pour Belém. « À l’Euro, Marcus Thuram a été étonné de voir mon drapeau, raconte-t-il. Mais je lui ai dit que je soutenais déjà son père, en 2004. » Au Portugal, la bannière d’Alain Parny avait attiré l’oeil de William Gallas, Olivier Dacourt et Thierry Henry, qui l’avaient accueilli à leur hôtel. « Ça me fait du bien de les croiser en Guadeloupe, parce qu’aujourd’hui, tout est verrouillé, chez les Bleus. »

Une raison pour laquelle en 2015, après un échange avec la Guadeloupéenne Laura Georges, il part soutenir les féminines au Mondial en Amérique du Nord. « Elles sont plus accessibles, c’est encore récent, détaille Alain. Deux ans plus tard, j’ai vécu l’Euro 2017 aux Pays-Bas avec la mère, la soeur et l’agent de Wendie Renard. » S’en suit le Mondial des Bleues, en France, puis en Australie, où les déplacements aériens entre villes ont crâmé son budget. Raisonnable, Alain Parny zappera l’Euro féminin en Suisse, en 2025. « Je dois économiser pour le Mondial 2026, se justifie le fan tricolore. J’ai une mappemonde et je mets une punaise à chaque nouveau pays visité. Bientôt, je pourrai ajouter le Mexique. »

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Par Assia Hamdi

Propos d'Alain recueillis par AH

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