ACTU MERCATO
Ji-sung retrouve son Park
C'est ce qui s'appelle un retour aux sources. Après sept saisons pleines de succès à Manchester United et une dernière ratée à QPR, Park Ji-Sung retourne au PSV Eindhoven. Un club qu'il l'a révélé aux yeux de l'Europe et où il espère retrouver son lustre d'antan. Mais le chant du cygne n'a-t-il pas déjà eu lieu pour le Sud-Coréen ?
« On pense, on pense encore à celle qu’on adore. Et l’on revient toujours à ses premiers amours. » Charles-Guillaume Étienne ne figurait peut-être pas parmi les plus illustres dramaturges de son temps, mais celui-ci avait au moins le mérite d’énoncer une vérité universelle. Ce refrain, on l’a tous entendu. Au moins une fois. Trop blasé par des plans cul sans saveur, ou dans une longue période d’abstinence non consentie, on s’est tous, un jour, remémoré ses premiers émois amoureux. Non sans une pointe de nostalgie. Cette fille à part, trop souvent enjolivée, dont on ose à peine susurrer le nom.
Au pays des Flying Dutchman, la mélancolie apparaît tout aussi vivace. Surtout au PSV Eindhoven. Cocu, puis dernièrement Van Bommel, ont revêtu la tunique blanc et rouge à deux reprises. Histoire de boucler la boucle. Chemin que va donc suivre Park Ji-sung, tout juste prêté une année par QPR (il avait signé un contrat de deux ans à l’été 2012). Vestige du PSV de Guus Hiddink qui rayonnait sur la scène nationale et européenne, à l’instar de ses deux compères néerlandais, le Sud-Coréen retrouve un club où il espère se relancer. Mais les Boeren ont, depuis, perdu de leur superbe. Et Park, aussi.
QPR, Quiescent Park Rout
L’éclat entourant jusqu’alors l’enfant de Séoul a même foutu le camp. D’une manière soudaine. Totalement inattendue, pour ainsi dire. Après sept saisons à jouer l’homme à tout faire de Ferguson à Manchester United, Park relève le pari audacieux des Queens Park Rangers, nouveaux pensionnaires de la Premier League. Recrutement bling-bling (Bosingwa, César, Granero) et ambitions démesurées. L’ancien Mancunien est appelé à en devenir le porte-drapeau, le brassard de capitaine au bras. Un dessein qui ne restera qu’utopique. Si Bosingwa affiche une attitude désinvolte sans aucune honte, Park ne met, lui, pas un pied devant l’autre. Inexplicablement. « C’était un mystère total. Il était méconnaissable. C’est vraiment l’un des très gros bides du recrutement des Queens Park Rangers. Le Park Ji-sung qu’on connaissait qui courait partout, qui avait une santé de fer sous Ferguson a disparu. Le problème, c’est qu’il avait l’air fatigué dès le coup d’envoi. Il n’avait plus d’essence dans le moteur, si ce n’est plus de moteur du tout. Manifestement, il était cramé » , confirme Jean-Michel Rouet, responsable du football anglais à L’Équipe.
Déjà pas fringant sous Mark Hughes, le Sud-Coréen touche le fond du trou à l’arrivée d’Harry Redknapp. Aucune différence, aucune influence sur le jeu et, surtout, une faculté à parcourir d’innombrables kilomètres qui s’est étiolée. Au total, il ne livre que 14 prestations en tant que titulaire, toutes plus insipides les unes que les autres. « Park Ji-sung qui ne court plus, c’est un joueur très très moyen. Il a été remplacé par Shaun Derry. Si vous vous faites remplacer par Shaun Derry, un vieux avec les cheveux blancs qui était un joueur cadre de l’équipe en Championship, vous pouvez vous inquiéter…, détaille Rouet. J’ai vu un match, pendant l’hiver à Loftus Road, les mecs criaient : « Shit ! Shit ! Shit ! » à son encontre. Il paraît que Redknapp aurait dit en privée à propos de Park : « Mais c’est pas possible, Sir Alex m’a vendu son frère. » » La décision de Fergie, intrigante à première vue, de se séparer de son travailleur de l’ombre à l’été 2012 semble aujourd’hui légitime. Réservé principalement pour les « grandes rencontres » de United, il avait réalisé une cuvée 2010/2011 exceptionnelle, hissant notamment les Red Devils en finale de C1. Une saison au sommet avant d’afficher des signes de déclin évidents l’année suivante, et pis encore sous le maillot des Hoops.
Dernier baroud d’honneur au PSV ?
La question de savoir si celui qu’on surnommait Oxygen Tank ou Third Lung n’a pas réalisé la saison de trop à QPR est tentante. Au cours de la saison dernière, son paternel avait d’ailleurs allégué que la fin pointait le bout de son nez pour sa progéniture : « Personne ne connaît l’avenir. Peut-être jouera-t-il pour une nouvelle équipe la saison prochaine. Mais je pense que, dans son esprit, il va s’arrêter. Il estime avoir assez joué et n’a pas connu la même réussite comme lorsqu’il était au PSV ou à Manchester United. » Crépuscule ou non, le milieu de terrain a décidé, à trente-deux piges, de se payer un dernier défi de choix. Un come-back au PSV, là où il s’était révélé à l’Europe entière à coup d’accélérations dans son couloir gauche aux côtés de son compatriote Lee Young-pyo. Le retour du Sud-Coréen est d’autant plus apprécié qu’il évoque de glorieux souvenirs aux supporters du Philips Stadion. Une époque dorée où la vague montante emmenée par Van Bommel, Alex, Vogel ou encore Farfán trustait tout (2 titres d’Eredivisie et une demi-finale de C1 en 2005), le tout sous l’égide du « sorcier blanc » Guus Hiddink.
Reste, toutefois, à savoir si Ji-sung possède encore ce qu’il faut dans les crampons. À sa décharge, il a été blessé plusieurs fois et est tombé dans un guêpier à Londres. Peu utilisé lors des deux dernières saisons, il a les qualités pour s’imposer dans un championnat moins exigeant que la Premier League. Son retour aux sources tombe plutôt bien, puisque le PSV entame une refonte de l’effectif et des cadres, hâtée suite à la fuite des talents Strootman (Roma) et Mertens (Naples), puis du départ à la retraite de Van Bommel. Phillip Cocu, entraîneur de retour aux affaires depuis mai dernier, ne doute aucunement de l’apport de son ex-coéquipier au sein de la formation néerlandaise. « Park est un joueur avec beaucoup d’expérience après toutes ses années passées à Manchester, a-t-il admis en conférence de presse. Ajouté à cela, il a déjà joué ici et connaît le club. Les gars qui jouent pour nous devant sont très talentueux, mais ils peuvent aussi apprendre de quelqu’un qui joue au haut niveau depuis longtemps. » L’expérience, c’est justement là dessus que le joueur est attendu. Milieu polyvalent, discret et travailleur, il incarne les valeurs d’Eindhoven et devra inoculer cette mentalité à un groupe extrêmement jeune (21 ans de moyenne d’âge), sujet aux sautes de concentration lors des précédentes saisons et qui court après une couronne nationale depuis cinq ans. À titre personnel, Park s’adonnera à finir avec la manière, lui dont la carrière a si souvent été mésestimée. Et à montrer, aussi, que les premiers amours restent véritablement à part.
Par Romain Duchâteau