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Jeune, talentueux et sans club : le cas d’Alan Pulido

Par Thomas Goubin, au Mexique
4 minutes
Jeune, talentueux et sans club : le cas d’Alan Pulido

Méconnu en France, Alan Pulido est, ou était, l'un des grands espoirs du foot mexicain. Parmi les vingt-trois au Brésil, il n'a depuis pas disputé une seule minute de jeu. Pas de blessure, ni de décision du coach en cause, mais un choix personnel, celui de tenter sa chance en Europe, alors que les Tigres (Monterrey) continuent de l'attendre…

Des histoires de jeunes joueurs qui sèchent la reprise pour revendiquer un départ pour une destination plus huppée, il en existe pléthore. D’ailleurs, on a d’abord cru que l’absence d’Alan Pulido se classait dans ce rayon. Mais plus de six mois après la reprise de la saison dernière, le jeune international mexicain de 23 ans est toujours porté disparu. Le Torneo Apertura est passé, le Torneo Clausura 2015 vient de débuter, et les Tigres, riche club de Monterrey où évolue notamment Egidio Arévalo, ne voient toujours rien venir. Mais où se trouve Alan Pulido ? Vraisemblablement en Europe. Sur Twitter, il donne quelques signes de vie, écrit parfois en italien : « Buona Giornata » , « Molto felice, grazze dios » … Début octobre, il a aussi envoyé une photo d’un repas pris en compagnie de Samuel Eto’o. En attendant, les Tigres assurent qu’ils continuent de verser chaque mois le salaire du joueur qui leur appartiendrait jusque juin 2016. Une nouvelle histoire d’enfant trop gâté du foot du XXIe siècle ?

Des contacts avec l’Olympiakos et Parme

Il existe deux positions irréconciliables. D’un côté, Alan Pulido et ses défenseurs assurent que le contrat signé avec Tigres a pris fin en juin 2014. Le club, lui, n’en démord pas et revendique deux années d’engagement supplémentaires. Qui dit vrai ? Début décembre, la commission de « controverses » de la Fédération mexicaine a tranché et donné raison aux Tigres. Pulido ne serait pas un joueur libre, comme il le revendique. Alors, le jeune homme s’est-il fait berner, s’est-il cru au-dessus des lois ou est-il plutôt un jeune Don Quichotte en crampons luttant seul contre un système inique ? Le fait qu’il ait changé subitement d’agent et plusieurs fois d’avocat – il envisagerait un recours devant le TAS – parle d’un joueur naviguant à vue. Dans le même temps, se mettre volontairement hors-circuit depuis plus de six mois, au moment où il commençait à intéresser l’Europe, parle d’un jeune homme convaincu de son bon droit.

Sélectionné en A, en janvier 2014, pour la première fois, Alan Pulido a inscrit avec El Tri quatre buts en six matchs, une belle moyenne, mais n’a pas disputé une seule minute lors du Mondial. Barré par la concurrence d’Oribe Peralta et Chicharito, le petit attaquant mexicain qui monte est resté sur sa faim au Brésil. Reste que plusieurs clubs européens avaient déjà repéré ce produit du centre de formation des Tigres, et qu’un agent lui aurait mis dans la tête de forcer son transfert à l’Olympiakos, avec qui il aurait été en contacts avancés. La presse grecque lui a consacré plusieurs unes. Des intérêts du Standard de Liège et de Parme ont également filtrés. Selon un contrat publié dans la presse mexicaine, Pulido gagnait 12 000 euros par mois, loin de ce que son statut d’international pouvait lui faire prétendre (au moins 30 000 euros, à se baser sur les standards locaux).

Le précédent Pékerman

Un élément plaide clairement en faveur de cet attaquant complet et polyvalent : avant le Mondial, Hector Gonalez Iñarritu, directeur des sélections et frère d’Alejandro, le cinéaste, avait mis la pression sur Pulido pour qu’il prolonge son contrat et règle son futur avant de partir en sélection. Pourquoi prolonger si le contrat courait encore sur deux ans ? De quoi donner du grain à moudre à ceux qui ont pris le parti de Pulido, y voyant une occasion pour aider à la démocratisation d’un football mexicain où l’employeur a toujours raison, ou presque. Au pays de Rafa Márquez, il n’existe ainsi pas de syndicat de joueurs, et un accord tacite entre patrons, dit « Pacto de Caballeros » , interdit à un joueur en fin de contrat de signer chez un autre club mexicain sans que son employeur ne reçoive une indemnité… Pendant la « draft » qui se déroule lors de chaque intersaison, les footballeurs sont aussi vendus ou échangés comme de simples marchandises, sans que le joueur ait son mot à dire. En clair, le club contrôle totalement la destinée de son employé, sauf s’il part à l’étranger.

Fin décembre, le président de Tigres a assuré qu’il était tombé d’accord avec plusieurs clubs mexicains l’été dernier pour transférer Pulido, mais que ce dernier avait préféré ne pas décrocher son téléphone. Un antécédent du club permet toutefois de douter que l’honnêteté soit du côté de sa direction. En mars dernier, les Tigres ont ainsi été condamnés par le TAS à payer trois millions de dollars à José Pékerman, son entraîneur en 2009. Le club n’avait pas honoré un contrat, qui s’activait une fois le club maintenu en première division, et avait osé accuser l’honnête homme argentin d’avoir utilisé une fausse signature d’un dirigeant. Quoi qu’il en soit, à moins de deux semaines de la fermeture du mercato en Europe (il est déjà conclu au Mexique pour les joueurs locaux), Alan Pulido n’a toujours pas de club. Reviendra-t-il chez les Tigres en faisant son mea culpa ? Le TAS tranchera-t-il en sa faveur ? Ou continuera-t-il de vivre sa dolce vita, entre entraînements individuels et soupers avec des grands noms du football ?

« Waldemar Kita tue la magie de la Coupe de France »

Par Thomas Goubin, au Mexique

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