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Le Douaron : « À Brest, j’avais peut-être perdu cette reconnaissance »

Propos recueillis par Victor Le Boisselier

En Italie, il est présenté comme celui « qui a abandonné la Ligue des champions pour signer à Palerme », en Serie B. Alors que ses anciens coéquipiers découvrent avec succès la coupe aux grandes oreilles, Jérémy Le Douaron explique son départ de Brest, loin de sa Bretagne natale, mais avec toute une troupe de joueurs français désormais établis en Sicile.

Le Douaron : « À Brest, j’avais peut-être perdu cette reconnaissance »

Tu as découvert le Maradona de Naples jeudi dernier, tu étais titulaire pour la première fois en championnat lundi à Bolzano et ce mardi tu déménageais dans ta nouvelle maison à Palerme. Comment le natif de Ploufragan s’adapte à cette nouvelle vie ? Agréablement surpris ! Je me sens super bien. J’ai été vraiment bien accueilli par les dirigeants, le staff et les joueurs. Il fait bon vivre. Je suis arrivé dans un club très professionnel, avec des infrastructures excellentes, où tout le monde est aux petits soins des joueurs pour que ça se passe pour le mieux. Formé à Guingamp, puis National 2 à Saint-Brieuc puis Brest : tu n’avais jamais quitté la Bretagne auparavant et tu jouais même avec le numéro 22 sur les épaules pour représenter ton département. Comment vis-tu le départ ? C’est vrai que j’étais bien parti pour faire le tour de Bretagne, il ne me manquait plus que Lorient et Rennes… (Rires.) Comme je disais à mes proches, j’ai 26 ans et j’avais besoin de découvrir autre chose que la France. Une aventure à l’étranger, quoi. Et je suis très heureux d’être parti. Je vais quand même avoir pas mal de visites dans les prochaines semaines, il y a pas mal de proches qui ont déjà booké leur billet pour venir me voir. Bon, j’ai aussi dû changer de numéro en revanche, car ici le 22 est réservé pour les gardiens.

J’avais peut-être fait mon temps après quatre saisons, malgré la Ligue des champions, malgré la saison exceptionnelle sur le plan collectif et qui restera gravée.

Jérémy Le Douaron

Ce départ, après la saison historique de Brest et la qualification en Ligue des champions, a été une surprise, même le directeur sportif de Brest s’en est étonné. Tu peux nous expliquer ?

Je sais qu’il y avait la Ligue des champions avec Brest, donc ce n’était pas forcément une décision facile à prendre. Mais j’ai eu cet appel de Palerme début juillet et j’ai réellement senti qu’ils voulaient m’avoir. Ils ont insisté sur le fait qu’ils comptaient sur moi pour remonter et que je faisais partie de l’avenir du club. Un club comme Palerme, qui ne lâche rien jusqu’à la fin du mercato, qui continue d’envoyer des messages, ça m’a fait réfléchir. Surtout que ces derniers mois à Brest, j’avais peut-être perdu cette reconnaissance que j’avais pu avoir auparavant. Et puis à 26 ans, j’avais envie de voir autre chose. C’était une bonne option pour moi, mais aussi pour ma copine. Je dirais que c’était la bonne opportunité au bon moment.

Comment s’est traduite cette « perte de reconnaissance » ? Personnellement, je serai toujours reconnaissant envers Brest. Ils sont venus me chercher en N2 à Saint-Brieuc, ils m’ont fait découvrir le haut niveau, et j’ai pu y jouer un bon nombre de matchs. C’est juste que j’ai eu une saison frustrante l’année dernière. Je manque de réussite, je touche cinq fois le poteau. À partir de fin janvier, j’ai été mis sur la touche, ce que je comprends aussi, c’est comme ça. Mais il y a eu des choses qui piquent un peu, comme Satriano (depuis parti à Lens, NDLR) qui est avant-centre et qui joue à mon poste d’ailier gauche. Je n’ai quasiment pas joué la fin de saison à part quelques minutes par-ci par-là. J’ai réfléchi à mon avenir à Brest. J’avais peut-être fait mon temps après quatre saisons, malgré la Ligue des champions, malgré la saison exceptionnelle sur le plan collectif et qui restera gravée.

Partir au bon moment finalement… C’est ça ! Je pars avec une qualif’ en Ligue des champions. J’ai tout donné pour ce club, ils m’ont beaucoup donné en retour. On est resté en bons termes.

Tu es parti en toute fin de mercato, le 30 août. Le départ d’autres attaquants, le tirage au sort un jour avant l’officialisation de ton départ n’ont rien changé dans ton choix ?

Non, pas du tout. Les contacts avaient déjà lieu depuis le début de l’été, ça s’est simplement accéléré en fin de mercato.

Tu avais défini cette équipe du Stade brestois comme très soudée. Ça t’a fait quoi de les voir rentrer sur le terrain avec le patch Ligue des champions et la fameuse musique ?

C’est assez fou ! L’année dernière, on rêvait de ça, donc forcément, c’est exceptionnel. Bon, il y a quand même une partie de l’équipe qui n’est plus là, mais je leur souhaite le meilleur. Et puis pourquoi pas se qualifier ? Il y a eu d’abord un premier super match contre Sturm Graz (victoire 2-1, NDLR). Avant la rencontre, j’avais discuté avec Hugo Magnetti et Romain Del Castillo. On a un petit groupe sur Snapchat, où j’avais dit à Del Cast’ qu’il allait marquer et à Hugo que je ne misais pas une pièce sur lui, car il ne sait pas frapper. Après, il met une frappe de malade, alors que la plupart de ses frappes à l’entraînement ne sont pas cadrées. (Rires.) Forcément, j’étais heureux pour eux.

L’important, c’est simplement que ma décision soit respectée. J’avais besoin de ça, de ce genre de projet.

Jérémy Le Douaron

Puis ils ont roulé sur Salzbourg ce mercredi (4-0)… Oui, là, c’était un match exceptionnel, pour Brest, pour le club, jouer deux matchs et faire deux victoires… J’avais vraiment hâte, j’étais déjà installé dans mon canapé une heure plus tôt pour soutenir les copains. Ce n’était pas un match facile, ils ont subi en première mi-temps, mais ils ont bien rectifié en deuxième. C’était une démonstration de réalisme. Personne n’aurait imaginé avoir six points après deux journées. En tout cas, c’est super pour les potes, j’espère qu’ils vont continuer comme ça !

Ici, tu débarques en tant que transfert le plus élevé de Serie B, tu es présenté comme celui qui abandonne la Ligue des champions pour venir à Palerme. Comment gères-tu ces attentes et cette exposition médiatique ? C’est sûr que j’arrive avec un statut. Mon choix a forcément fait parler au début, aussi parce que les gens n’ont pas forcément les tenants et les aboutissants… L’important, c’est simplement que ma décision soit respectée. J’avais besoin de ça, de ce genre de projet. Il ne faut pas oublier qu’on est à Palerme, avec un objectif ambitieux qui est celui de redécouvrir la Serie A. Donc je n’arrive pas n’importe où : le club, les supporters, il y a une ferveur de malade, un stade de 30 000 personnes dont la moitié est déjà remplie une heure et demie avant le coup d’envoi… Tout est mis en place ici pour notre réussite, notamment par le City Football Group.

Justement, tu n’es pas le seul à avoir été recruté à l’étage supérieur cet été. Est-ce que le fait que le club appartienne depuis 2022 au City Football Group change quelque chose dans son image auprès des joueurs ?

C’est vrai que le club a fait faillite il y a quelques années et avait été rétrogradé en Serie D. Aujourd’hui, savoir qu’on fait partie de ce groupe est quelque chose de rassurant. On sait que tout est mis en place pour nous rendre performants. On a vraiment un effectif de dingue, il y a de la concurrence, de l’ambition. Il est plus séduisant de jouer la montée dans un club comme ça que de se battre toute l’année pour se maintenir à l’étage du dessus, c’est assez fatigant psychologiquement. C’est sûrement ce qui explique par exemple l’arrivée de joueurs comme Alexis Blin qui jouait l’année dernière à Lecce en Serie A.

Tu cites un premier joueur français arrivé cet été. Au total, vous êtes quatre à avoir été recrutés au dernier mercato, en plus de Claudio Gomes, déjà au club, et Salim Diakité, franco-malien. J’imagine que ça permet de s’acclimater plus rapidement. Personnellement, ça m’a pas mal aidé. Je connaissais déjà Alexis, avec qui on a les mêmes agents, donc on s’était déjà croisé 2-3 fois. Pour les autres, j’ai découvert des mecs tops. L’intégration a été plus facile, ils m’ont traduit les premières indications données par le coach. C’est un avantage, je joue du même côté que Salim (Diakité), donc pour la communication, c’est bien.

Mais c’est quoi cette ribambelle, tu peux nous les présenter un peu ? Ça veut dire que les Italiens pensent que les Français bossent bien. (Rires.) Après, chaque joueur a sa situation. Thomas Henry par exemple est prêté (par le Hellas, NDLR), après avoir connu des blessures, il a choisi ce projet pour pouvoir rebondir. Stredair Appuah, il a 20 ans, c’est l’avenir. Claudio pareil. On est tous plutôt jeunes, même si Alexis (Blin) et Thom’ (Henry) sont un peu plus âgés. C’est à ça que tu vois que le club est ambitieux. Ils sont allés chercher Appuah à Nantes par exemple. Ils veulent de la fougue. Et puis des joueurs comme Thomas et Alexis qui ont connu la Serie A, c’est important, ils ont l’expérience qu’ils vont apporter à notre groupe de Serie B qui vise la montée. Alexis était quand même capitaine à Lecce.

C’est avec eux que tu te fais les soirées Ligue des champions de Brest, alors ?

Avec le déménagement et tout ça, ça a été compliqué, mais on devrait organiser ça prochainement.

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Propos recueillis par Victor Le Boisselier

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