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« Je suis un chercheur d’équilibre »

Propos recueillis par Aymeric Le Gall
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Après une courte carrière de gardien, Franck Raviot s'est très rapidement reconverti en entraîneur des gardiens à l'INF Clairefontaine. Aujourd'hui en charge des portiers de l'équipe de France A, le discret adjoint de Didier Deschamps a accepté de sortir de l'ombre pour évoquer son parcours atypique et sa relation avec les gardiens tricolores.

Vous disiez dans l’une de vos rares interviews être un homme de l’ombre. C’est toujours le cas ?Oui, je préfère l’ombre à la lumière. Je fais en sorte de donner le meilleur de moi-même pour amener ceux que j’accompagne à la lumière, à la performance. Lorsque vous êtes entraîneur adjoint ou que vous avez une mission dans un staff en tant qu’assistant, il faut savoir rester à sa place.

Comment avez-vous appréhendé au fil de votre carrière ce poste de doublure de gardien de but ?Le poste de gardien de but est assez unique, il n’y en a pas beaucoup dans une équipe, donc il faut accepter la concurrence, la hiérarchie, le statut de n°2. C’est un pan de ma carrière, un pan de ma vie, j’en garde de très bons souvenirs, je n’en suis aucunement amer, aigri ou frustré.

Claude Dusseau est un homme qui représente énormément à mes yeux, de par son exemplarité, sa rigueur professionnelle et c’est vrai que cette rencontre va changer ma façon de voir les choses quant à mon avenir.

C’est une expérience qui vous sert aujourd’hui vis-à-vis des n°2 et 3 de l’équipe de France ?Oui, lorsque vous avez un vécu, ça vous donne forcément un crédit, et puis, ce que vous avez pu vivre et parcourir comme chemin, ça vous permet de faire passer des messages, d’illustrer et de renforcer vos propos. Donc inévitablement, cette expérience de vie doit me permettre de sensibiliser les garçons que j’accompagne tout au long de leur carrière.

À 25 ans, vous vous retrouvez sans club et obligé de participer au stage de l’UNFP. Comment vit-on ce genre de situations quand on est si jeune dans le métier ?Lorsque vous êtes étiqueté « doublure » , que vous aspirez à autre chose, vous vous rendez compte que le club ne vous propose rien de nouveau, vous souhaitez donnez une autre orientation à votre carrière. Mais lorsque les opportunités ne sont pas nombreuses, forcément vous repoussez les propositions, et à un moment donné, vous vous retrouvez à attendre, à attendre, à attendre… L’UNFP, qui est remarquable dans l’accompagnement des joueurs, propose ces stages qui vous permettent de rester en activité, de peaufiner votre préparation athlétique et de vous exposer au travers des matchs amicaux. Et ça permet aussi de s’oxygéner psychologiquement. Moi, ça m’a aussi permis de revenir à Clairefontaine, car c’est un lieu que je connaissais pour y avoir été formé en tant que stagiaire. Et là, parfois, vous croisez sur un chemin des gens qui peuvent bouleverser le cours de votre vie.

Vous parlez de Claude Dusseau, qui vous propose de vous reconvertir en entraîneur des gardiens de Clairefontaine.Oui c’est ça. Claude Dusseau est un directeur qui m’a marqué à l’INF et qui représente énormément à mes yeux, de par son exemplarité, sa rigueur professionnelle et c’est vrai que cette rencontre va changer ma façon de voir les choses quant à mon avenir. C’est à partir de là que j’ai donné une orientation nouvelle à ma carrière, puisque j’ai décidé d’y mettre un terme et de m’orienter sur une voie différente. C’était une reconversion très maturée que je n’ai jamais regrettée.

Vous parlez de maturité. C’était indispensable pour prendre ce genre de décision ? Oui, il faut de la maturité, de la sagesse, de la réflexion, et puis il faut aussi être entouré des bonnes personnes qui vous font prendre conscience que l’heure est peut-être venue, qui vous tendent une main, voire les deux, et vous permettent de bâtir une nouvelle aventure professionnelle. C’était pas non plus sans avoir conscience qu’il allait falloir que je fasse mes preuves. Mais c’est vrai que mon tempérament et ma personnalité m’ont certainement aidé à franchir ces paliers.

Je mentirais si je vous disais qu’il n’y a pas eu un feeling particulier avec Mickaël Landreau.

Qu’est-ce que Clairefontaine représente pour vous ?

C’est un lieu mythique, un lieu de pèlerinage, un lieu incontournable, historique. C’est un endroit connu, reconnu et estimé dans le monde entier et c’est ni plus ni moins qu’un privilège, une fierté et un honneur d’y travailler au quotidien. Il faut savoir apprécier cela, sans non plus s’enorgueillir. Il ne faut pas s’endormir sur ses lauriers parce qu’on a un devoir, une mission lorsqu’on exerce là-bas.

Vous avez ensuite intégré le staff des Espoirs. Dix ans avec cette équipe, c’est un vrai morceau de vie !Oui, c’est une belle aventure. Je me suis construit, j’ai énormément appris au contact des différents sélectionneurs des Espoirs que j’ai côtoyés au fil de ces années. J’ai beaucoup mûri, j’ai gagné en expérience et en maturité. Sans occulter la présence de quelqu’un qui a été, est et restera pour moi un mentor et une référence : Bruno Martini. Je sais ce que je dois à ces différentes personnes et je sais que si je suis devenu ce que je suis, je le dois en grande partie à ces gens-là. Il ne faut jamais être amnésique de son passé, des personnes qui vous ont tendu la main à des moments cruciaux de votre vie. J’en ai pleinement conscience et je leur en serai indéfiniment reconnaissant et redevable.

C’est compliqué de devoir s’adapter aux changements de sélectionneurs ?Tout le monde vous le dira, être formateur ou entraîneur, c’est avoir une capacité d’adaptation totale et permanente. Parce que le football et les hommes changent. Il faut savoir s’adapter à des entraîneurs, mais aussi à des hommes et avoir toujours en filigrane cette volonté d’apporter un maximum de compétences et de loyauté. Je crois que c’est ce qu’attendent les coachs principaux.

J’étais moi-même en Afrique du Sud dans le cadre d’une mission pour la DTN. Paradoxalement, nous étions les observateurs privilégiés , sur place en Afrique du Sud, mais nous étions beaucoup moins informés que les Français qui vivaient cela depuis la France.

Vous en gardez un souvenir en particulier ? Une belle rencontre ?Je mentirais si je vous disais qu’il n’y a pas eu un feeling particulier avec Mickaël Landreau. L’histoire a voulu que j’intègre le staff des Espoirs quand il y était le gardien et le capitaine et nous avons vécu deux années assez riches puisqu’elles se sont conclues par une finale de championnat d’Europe en Suisse contre la Tchéquie. Forcément, quand vous vivez une grande et belle aventure sportive et humaine, ça renforce les liens. Et quelques années plus tard, le destin a voulu que nos routes se recroisent, moi dans le staff de l’équipe de France et lui en tant que gardien n°3, et que sa carrière internationale se termine par cette Coupe du monde au Brésil.

Comment avez-vous vécu personnellement le fiasco de Knysna ? J’étais moi-même en Afrique du Sud dans le cadre d’une mission pour la DTN. J’étais sur place, mais en itinérant, en observateur de matchs sur les différents sites de la Coupe du monde. Paradoxalement, nous étions les observateurs « privilégiés » , sur place en Afrique du Sud, mais nous étions beaucoup moins informés que les Français qui vivaient cela depuis la France. Après, on sait tous ce qui s’est passé, on sait tous quelles ont été les conséquences de tout ça. On ne peut que l’estimer navrant, désolant, regrettable. Aujourd’hui, une page s’est tournée et on s’est très vite focalisés sur les échéances nouvelles dès la prise de fonctions de Laurent Blanc.

Vous imaginiez qu’on puisse faire appel à vous à ce moment-là ? Aucunement, c’était totalement inattendu.

Comment se passe votre nomination au poste d’entraîneur des gardiens de l’équipe de France ?Je suis à Johannesburg pour observer le match Espagne-Chili. À ce moment-là, je reçois un appel, mais, ne connaissant pas le numéro qui s’affiche, je ne réponds pas. Finalement, je reçois un message vocal et ce n’est qu’en rentrant à l’hôtel que j’en prends connaissance. C’était Laurent qui me demandait de le recontacter, chose que j’ai faite le lendemain. Ma mission en Afrique du Sud se terminait, je suis rentré sur Paris le lundi matin, et l’après-midi, j’avais rendez-vous avec Laurent.

Avec Lloris et Mandanda, c’est ni plus ni moins qu’une relation de confiance et de complicité. Nous avons une relation saine, sincère.

Vous le connaissiez un peu ? Non, on ne se connaissait pas bien, mais le monde du foot est un microcosme, donc il est possible de savoir beaucoup de choses sur les gens à travers des intermédiaires et des connaissances communes. Laurent s’était informé à mon sujet avec les différentes antennes qu’il pouvait avoir et il a eu des échos convergents, semble-t-il, sur ma personne et l’entraîneur que j’étais.

Comment s’est déroulé votre échange ?Nous avons discuté pendant environ deux heures, et suite à cela, Laurent a pris un temps de réflexion pour peaufiner son staff, pour prendre les décisions qu’il estimait être les meilleures. Quelques jours plus tard, il m’informait qu’il m’associait à son projet.

Dans quel état d’esprit avez-vous trouvé les gardiens après le Mondial 2010 ?Il était important pour tout le monde de digérer cet épisode malheureux qui a forcément laissé des cicatrices. Il fallait repartir avec une attitude positive et provoquer une nouvelle détermination, de l’enthousiasme, afin d’atteindre nos nouveaux objectifs. Les retrouvailles ont été d’autant plus faciles avec Hugo et Steve, entre autres, que c’étaient des garçons qui me connaissaient bien en tant qu’homme et en tant qu’entraîneur.

Quelle relation entretenez-vous avec eux ?C’est ni plus ni moins qu’une relation de confiance et de complicité. Nous avons une relation saine, sincère. Il n’y a pas d’ambiguïtés, de malentendus, on se parle et on se regarde en tant qu’hommes respectueux qui ont les uns pour les autres beaucoup d’estime et d’affection. Je crois qu’il est important de construire un socle très, très solide et une relation saine pour pouvoir ensuite mettre un projet sportif en place et les amener à être le plus performant possible lorsqu’ils nous rejoignent en équipe de France.

Lorsqu’ils nous rejoignent, la première poignée de main et les premiers regards échangés sont plein d’enthousiasme. On est contents de se retrouver.

Quel type d’entraîneur êtes-vous avec les gardiens de l’équipe de France ? C’est une relation de maître à élève, de père à fils, de copain à copain ?Non… Je suis un chercheur d’équilibre pour que les gardiens soient les plus performants possible. Je suis aussi à leur écoute parce que c’est important de les écouter, d’être attentif aux différents clignotants, d’être bienveillant, afin de leur apporter un maximum d’éléments pour qu’ils soient dans une quiétude et un confort maximal.

Est-ce que vous avez des « petits trucs » bien à vous pour les mettre dans de bonnes dispositions lorsqu’ils arrivent avec les Bleus ? Oui, mais vous savez, les ponts ne sont pas rompus entre chaque rassemblement en Bleu. Il y a un travail de suivi qui est fait tout au long de la saison, je me déplace de manière très régulière pour les voir dans leurs clubs. On prend le temps de s’isoler, de déjeuner, de dîner ensemble afin d’échanger paisiblement. Et lorsqu’ils nous rejoignent, la première poignée de main et les premiers regards échangés sont plein d’enthousiasme. On est contents de se retrouver.

Pendant une grande compétition, l’ambiance générale est au moins aussi importante que le jeu à proprement parler. Comment fait-on pour que la mayonnaise prenne ?Ça se construit au fil des jours, des semaines et des mois à travers des échanges, à travers les entraînements, les matchs. Mais ce n’est que la partie visible et il y a aussi tout ce qui se fait au niveau de la vie du groupe au quotidien et qui est tout aussi important. Les compétitions comme l’Euro représentent de nombreuses semaines de vie commune, donc il est important de bien se connaître. C’est même primordial, car quand vous connaissez très bien un homme, vous savez quand est-ce que vous devez lui parler, s’immiscer dans son monde ou au contraire quand est-ce que vous devez vous abstenir et le laisser tranquille. On a besoin de créer ce type de liens solides et durables parce qu’il faut que ça tienne pendant 45-50 jours.

Au Mondial 2014, on a eu le sentiment de voir un groupe heureux d’être ensemble. C’est aussi ce que vous avez ressenti en interne ? Oui tout à fait. Parce que tout a été mis en œuvre pour cela, parce qu’en tant que sélectionneur, en tant que commandant de bord, Didier Deschamps a été remarquable dans sa préparation et sa gestion du groupe au quotidien. Et le staff lui aussi a également œuvré pour permettre aux joueurs de bien appréhender ce temps passé ensemble.

Comment jugez-vous la relation qui existe entre les différents membres du staff de l’équipe de France ? Un staff, c’est la conjugaison, l’addition de compétences, de personnalités, de tempéraments, de caractères. Un staff ne doit faire qu’un et je crois qu’il faut œuvrer pour le bien de l’ensemble tout en sachant rester à sa place. Comme je le disais en préambule, être adjoint dans un staff, c’est apporter sa pierre à l’édifice, sa fraîcheur, son enthousiasme, mais aussi sa rigueur et son exigence, tout en sachant rester à sa place. Ça évite de parasiter le travail de l’autre.

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Propos recueillis par Aymeric Le Gall

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