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«Je devrai vivre avec les critiques»

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«Je devrai vivre avec les critiques»

L'expérience de Ciro Ferrara entraîneur n'aura même pas duré six mois. Intronisé cet été par la Juve, il vient d'être débarqué. Alberto Zaccheroni le remplace. En forme d'adieu, voici l'interview qu'il avait accordée à So Foot en octobre (SF n°70).

Après lui avoir infligé une agonie aussi lancinante qu’irrespectueuse, la Juventus vient de se séparer de Ciro Ferrara. Dès cet après-midi, l’ancien défenseur ne dirigera plus l’entraînement. Il est remplacé par Alberto Zaccheroni, en attendant peut-être l’arrivée de Rafael Benitez cet été. Ses quelques mois à la Juventus auront été marqués par des maladresses, de la malchance, et des blessures. Et un côté sympathique qui nous fait dire que Ciro Ferrara ne méritait sans doute pas ça. Pour s’en rendre compte, voici un extrait de l’interview qu’il avait accordée à So Foot en octobre (SF n°70).

Pour votre première expérience sur un banc de touche, vous dirigez l’un des plus grands clubs du monde. Certains, comme Zeman, Gasperini du Genoa ou Mourinho, vous accusent d’être pistonné…

Non, Mourinho n’a rien dit sur le sujet. Il a critiqué beaucoup de choses à mon propos, mais ça, non (sourire). Ce sont des remarques que je comprends tout à fait: d’une part le banc de la Juventus n’est pas n’importe quel banc, et d’autre part je n’ai pas le diplôme qu’il faut pour entraîner. Je sais que je devrai vivre avec ces critiques, avec le fait que je suis un jeune entraîneur sans grande expérience, que je n’ai pas suivi le parcours classique, que j’ai eu de la chance, que je me suis trouvé au bon endroit au bon moment. Parfait, tout le monde le sait: je suis sans expérience, je le sais parfaitement. Mais c’est comme ça. Moi, je n’ai de comptes à rendre qu’à la Juventus. Je n’ai pas eu non plus le parcours type du footballeur. Je suis devenu pro sans passer par les équipes de jeunes traditionnelles. Pour vous dire, quand j’étais petit, ma mère crevait mes ballons de football pour que j’arrête de jouer l’après-midi à l’heure de la sieste. Alors…

La vie d’entraîneur ressemble-t-elle à ce que vous imaginiez?

Mmmmmh. Oui. Je pensais bien que ce ne serait pas une “passeggiata”, j’imaginais que ce serait dur et qu’il y aurait beaucoup de pression. Et c’est le cas.

Beaucoup d’entraîneurs racontent qu’ils se réveillent la nuit en pensant à leur composition d’équipe. C’est votre cas?

Si certains se réveillent en pensant au foot, alors je vais vous dire: moi la nuit, je ne dors pas. Comme ça, j’évite le problème (rires).

Pour justifier votre nomination au poste d’entraîneur de la Juventus, Jean-Claude Blanc a dit que vous représentiez “le style Juventus”. Ça veut dire quoi au juste?

C’est difficile d’expliquer cela avec des mots. Disons qu’il existe à l’intérieur du club des règles que tout le monde doit connaître, et que personne ne doit transgresser. Maintenant, et c’est toute la difficulté, ces règles ne sont pas des règles écrites (sourire)… Il s’agit plus d’un comportement général vis-à-vis de la presse, de l’adversaire, des supporters. Quand tu portes le maillot de la Juventus, tu représentes 12 millions de tifosi: il ne faut jamais oublier que tu es de passage, mais que le club, lui, reste. Ce n’est pas toujours facile à suivre. Il y a ici une certaine exigence de comportement et d’élégance. Pas forcément dans le sens vestimentaire, même s’il est clair que si j’arrivais en bermuda ou en short sur le bord du terrain pour un match de Ligue des Champions, ce ne serait pas très “style Juventus”…

En même temps, vous êtes probablement le premier entraîneur de la Juve à avoir un tatouage (Ferrara a inscrit sur son bras le nombre de scudetti qu’il a gagnés, Ndlr)…

C’est sûr que ce n’est pas Trapattoni qui aurait fait ça… Bon, si j’avais su que je deviendrais un jour entraîneur de la Juventus, je ne me le serais jamais fait, ce tatouage. En même temps, Lapo Elkann a l’écusson du club tatoué sur le bras, donc cela me protège un peu.

En parlant de “style Juventus”, vous avez déclaré que votre équipe serait fidèle à sa tradition. Vous pouvez nous dire comment cela se traduit concrètement, en termes de jeu?

Là encore, il s’agit d’esprit plus que d’un schéma de jeu précis. Être de la Juventus, cela veut dire ne jamais abandonner, et continuer de chercher la victoire en toutes circonstances. Si un joueur n’a pas cela, il ne peut pas jouer à la Juventus. Pour le jeu… Nous ne sommes pas une école de football comme le Barça peut l’être. Eux, en Espagne, ils jouent de la même façon depuis qu’ils sont enfants, et les joueurs sont tous très forts techniquement. Ici en Italie, et encore plus à la Juventus, c’est différent. L’important, c’est de gagner. Nous sommes beaucoup plus portés sur le résultat que sur le contenu. Ce n’est pas pour rien que l’on parle de “style Juventus”, et non de “jeu Juventus”.

Mais vous n’aimeriez pas imposer un style de jeu bien défini? Après tout vous étiez l’an dernier l’entraîneur des équipes de jeunes, c’est quelque chose que vous auriez pu essayer de mettre en place…

La volonté de développer un jeu cohérent est là. Mais c’est un travail de longue haleine, cela ne se fait pas en deux ans. À Barcelone, ils travaillent comme ça depuis des décennies. Selon moi, c’est au niveau global des centres de formation que cela devrait se passer. Hélas, nous n’avons pas cette culture en Italie.

Vous aviez pourtant déclaré cet été que votre module préféré était le 4-3-1-2, avec un dix derrière deux pointes.

Nous avons démarré la saison comme ça. Mais je ne suis pas fixé là-dessus. On peut par exemple jouer en 4-3-2-1, en disposant les pointes l’une devant l’autre. Ou évoluer avec trois attaquants. Ou en 4-2-3-1. Les joueurs doivent savoir et connaître différentes manières de jouer, ne serait-ce que pour en changer en fonction de l’adversaire ou de leur condition physique du moment. Les possibilités sont infinies.

Vous partez toujours avec quatre défenseurs.

Oui, car je considère que c’est la meilleure option pour occuper le terrain. Après, vous noterez que lorsque nous attaquons, nous ne restons jamais à quatre derrière, puisqu’un défenseur doit toujours monter. Les joueurs doivent donc savoir couvrir l’équipe et défendre à trois.

Vous avez longtemps joué avec Del Piero, Buffon, Trezeguet… Vous avez même fondé une association avec Cannavaro pour aider les enfants défavorisés de Naples. Quand vous devenez du jour au lendemain l’entraîneur de ces joueurs, ça se passe comment, ils vous vouvoient?

C’est un autre aspect sur lequel on aime bien me critiquer: le fait que je sois ami avec certains joueurs. Oui, je suis ami avec eux. Et alors? C’est inévitable, je me trimballerai cette étiquette encore pendant quelques années. Mais on essaie chacun de rester dans nos rôles. Il y a ceux qui m’appellent Ciro, ceux qui m’appellent Mister, comme Cannavaro, ceux qui m’appellent Mister devant le groupe et qui, lorsqu’on est à deux, m’appellent Ciro. Mais au fond, cela n’a pas d’importance: le respect ne se transmet pas par le tutoiement ou le vouvoiement.

A chaque article qui s’écrit sur vous, le nom de Marcello Lippi ressort. Ça ne vous énerve pas d’être sans cesse associé à votre ancien entraîneur?

On a dit des choses bien pires que cela sur moi (rires). Je ne prends pas ça comme une critique. Lippi est celui qui m’a entraîné le plus longtemps, à Naples puis à la Juve. Et il m’a pris ensuite comme adjoint lors du Mondial 2006. Alors oui, on peut dire qu’il a laissé son empreinte sur moi. D’ailleurs si je pouvais choisir une équipe à qui je souhaite ressembler, je prendrais la Juventus de Lippi, sa première Juve. Elle avait de la force, du caractère, et de la technique: toutes les qualités qui servent pour devenir une grande équipe.

Pendant que vous arriviez à la Juve, le Milan AC décidait de confier son équipe à un autre débutant, Leonardo. Pour beaucoup d’observateurs, cela n’aurait pas été possible sans le succès de Guardiola au Barça l’an dernier.

Guardiola, je devrais aller à Barcelone juste pour le remercier! Après, pour être sincère, cela m’énerve qu’on me compare sans cesse à lui. Même si j’ai le plus grand respect pour Pep, on n’a rien en commun. Nos histoires sont différentes, nos caractères aussi. Et quoi qu’il se passe ailleurs, je ne veux pas changer. Je souhaite qu’on se souvienne de moi comme Ciro Ferrara, e basta.

Qu’aimez-vous faire en dehors du football? Vous avez des hobbies?

J’ai malheureusement moins de temps depuis que je suis entraîneur. Désormais, je dois penser pour 25 têtes, et non plus pour une seule. Mais j’essaie de sortir de temps en temps. Dès que je peux, je fais du bateau. Dernièrement, je suis aussi allé voir Roberto Benigni, et j’ai assisté à un concert de Laura Pausini. J’aime bien la musique, sauf le rock. Je n’aime pas le rock, je préfère les chansons napolitaines.

Lesquelles?

Toutes. Je pourrais vous en chanter une, mais ce ne serait pas très Juventus, non?

Propos recueillis par Lucas Duvernet-Coppola et Stéphane Régy

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