Vous vous êtes fait remarquer par des prises de position quelque peu iconoclastes dans la presse japonaise lors de la dernière Coupe du monde en Afrique du Sud…
J’ai critiqué l’équipe et applaudi la défaite. Il fallait bien ça, surtout dans un pays comme le Japon où les spécialistes eux-mêmes ne comprennent rien. Ils disaient vraiment trop de conneries, alors j’ai voulu qu’ils la ferment, voilà. De la Coupe du monde, j’ai aimé le boycott des joueurs de l’équipe de France… Extraordinaire. Magnifique. Enfin des joueurs qui ont pu dire qu’ils n’adhéraient pas à ce que les instances fédérales avaient décidé. Franchement, félicitations à eux, il fallait du courage. Ils n’avaient rien à y gagner, et d’ailleurs ils n’y ont rien gagné. En France, j’ai l’impression que les gens se révoltent en général plus qu’ailleurs. Sinon dans l’ensemble, j’ai trouvé que la Coupe du monde ressemblait vraiment à une guerre, dans le sens où tout le monde dans chaque pays était sous tension.
C’est-à-dire ?
Angela Merkel qui vient en Afrique du Sud pour soutenir son équipe et représenter le pays, ça dépasse le sport. Et puis j’ai remarqué que les gens qui font la guerre aujourd’hui ont à peu près l’âge des joueurs. Dans les deux cas, ce sont des jeunes gens sérieux, calmes et plus disciplinés que la moyenne. J’ai aussi une théorie concernant l’influence des guerres en Europe sur l’évolution des commentaires sportifs. Regardez : n’importe quel crétin qui prend le micro utilise aujourd’hui le vocabulaire du combat, c’est ridicule… Ils parlent, mais ils ne savent même pas filmer les blessures.
Pourquoi ?
Il faudrait montrer du sang ? Non, mais montrer quelque chose d’un peu plus subjectif que ce qu’on voit. Moi, si je devais raconter une histoire de football, je ferais un film où une femme superbe entrerait dans un vestiaire de foot pour rendre les joueurs impuissants, voire les violer et les tuer. La scène aurait lieu juste avant le match, pour que les joueurs soient affaiblis et qu’ils ne puissent plus courir. Toute cette puissance qui disparaîtrait d’un coup, ça serait vachement intéressant. De toute façon aujourd’hui, les mecs filment quoi ? Les grands joueurs ? Il n’y a pas trop d’intérêt. Maradona est un être humain normal, c’est pour cela qu’il a toujours réagi à ce qui lui est arrivé de cette manière. Il y a aussi l’histoire de l’enfant pauvre qui n’est rien socialement et qui va permettre de changer le destin de son pays et d’aller au-delà ; mais ce n’est jamais comme ça que les joueurs de football se comportent. Financer les pauvres, les joueurs n’y pensent pas vraiment. Ils ne pensent qu’à gagner.
Propos recueillis par Brieux Férot
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