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J-C Coubronne : « En Italie, il y a une mentalité différente vis-à-vis des jeunes »
Jean-Christophe Coubronne aura bientôt 23 ans, et joue en Italie depuis trois saisons. Son quotidien, c’est Novara, ville-dortoir où il répète ses gammes en attendant de percer. Si son club va sans doute descendre et qu’il n’a pas encore eu l’occasion de fouler les prés de Serie A, le gamin est patient. Comme le veut le modèle italien.
• Première question, je vais te demander de te définir comme joueur.Je suis arrivé en Italie par l’intermédiaire de l’équipe de France comme défenseur central. J’ai été replacé directement latéral droit. J’avais déjà fait ça à Sochaux en CFA mais je me trouve plutôt… Je vais pas dire moderne mais disons assez offensif, ce qui est nécessaire aujourd’hui pour un latéral, d’apporter devant quand y’a besoin. • Tu es arrivé via l’équipe de France ?Oui en fait j’ai fait les jeux méditerranéens avec les Bleuets, et j’étais en fin de contrat stagiaire pro avec Sochaux qui ne m’a pas renouvelé. L’équipe de France m’a donné de la visibilité, Novara et plusieurs clubs italiens, polonais et autres m’ont remarqué. J’ai fait le choix de partir à Novara où le projet m’a paru intéressant et donc j’ai signé pour trois ans.• Qu’est-ce qui t’as convaincu dans un modeste club de Serie C1 ?Il y avait un français au club depuis six mois, Laurent Lanteri, ancien de Monaco. Il m’a expliqué le projet et m’a dit que le club avait des infrastructures assez impressionnantes pour un club de Serie C, et qu’il avait pour ambition de monter en Serie A en l’espace de quatre ans. Le directeur sportif m’a convaincu, mon agent également. C’était un risque à prendre, je l’ai pris. Et puis le football italien m’attirait depuis très longtemps, aussi.• En attendant, tu as connu deux montées en deux saisons, c’est plutôt un bilan positif non ? Quels souvenirs gardes-tu de ces deux succès ?En Serie C j’ai pu faire une vingtaine de rencontres, mais j’ai fait le match de la montée contre la Cremonese où j’ai pu jouer tout le match. C’était de l’émotion, un stade plein pour la première fois et c’était génial de pouvoir fêter ça sur le terrain. Après cette année-là on a aussi fait un super parcours en coupe d’Italie, en arrivant en huitièmes de finale en tant que club de troisième division. On a pu jouer contre le Milan AC, Parme, Sienne… L’année suivante en Serie B, j’ai fait 8 matchs mais le moment le plus marquant c’était la finale play-off contre Padoue (en Serie B, les 2 premières équipes montent directement, les 4 suivantes disputent des play-offs pour désigner le troisième larron, ndlr). J’ai joué tout le match aller à l’extérieur, où on a fait 0-0. En arrière droit, j’ai marqué El Shaarawy. En demi-finale il avait déjà mis 2 buts, il était en pleine forme. Et sur ce match il n’a pas trop touché de ballons, donc j’ai bien fait mon boulot. Quand on voit ce qu’il réalise maintenant et où il est…• Sur le plan personnel en revanche, tu n’as pour l’instant disputé qu’une seule rencontre en Serie A…Ben je suis rentré 20 minutes au dernier match contre l’Atalanta. J’ai fait quelques bancs… Au niveau du temps de jeu cette saison je suis un peu plus déçu. Enfin déçu, j’espérais mieux mais pour une première saison en Serie A on ne va pas trop en demander. Je fais tous les entraînements, je fais parti du groupe, je fais les déplacements…• Tu penses que ton faible temps de jeu est dû à la pression qu’il y a en Italie, qui fait qu’on fasse peu confiance aux jeunes joueurs ?C’est vrai. C’est une chose qui m’a marqué en Italie. Ce n’est pas rare ici de voir des joueurs de 34, 35 ans être en forme, même titulaires. A cet âge-là en France, la plupart ont raccroché. Et puis les jeunes au contraire, quand j’entendais dire qu’un joueur de 22-23 ans était encore jeune… Je dis pas que ça me choquait mais ça me paraissait bizarre parce qu’en France on te considère jeune à 18 ans mais à 20 ans tu ne l’es déjà plus, en Ligue 1 on voit beaucoup de jeunes sortir. En Italie c’est une mentalité différente. Il y a beaucoup de joueurs qui jusqu’à 25 ans jouent en Serie B ou Serie C, et puis c’est assez fréquent qu’à partir de 27-28 ans ils se fassent acheter par des gros clubs italiens. Voilà en Italie ils sont peut-être plus patients, ou du moins ils laissent les joueurs arriver à maturité dans les championnats inférieurs. • C’est donc complétement différent du système français donc…Venant d’un centre de formation français, si ça marche pas en France, c’est rare qu’un autre club pro te reprenne. Moi en tant qu’international français quasiment personne ne m’a voulu. Y’avaient Troyes et Reims qui étaient intéressés mais ça n’a pas abouti, ils ne m’ont pas fait comprendre qu’ils avaient un projet sur moi. J’ai voulu partir à l’étranger, Novara m’a laissé ma chance. L’Italie pour un défenseur ça s’annonçait comme une super expérience, j’ai beaucoup progressé tactiquement.• Novara, c’est comment comme ville ? Y’a quoi à voir ou à faire ? Le gros avantage, c’est que c’est à 40 minutes de Milan et à une heure de Turin. A Novara même, il y a pas grand-chose en fait. Juste le Duomo, la coupole, une énorme église basilique qui est le symbole de la ville. C’est plus une ville dortoir à la base, les gens vont ensuite travailler à Milan. En étant à 40 minutes, j’y vais très souvent le weekend, quand j’ai un peu de temps libre, ou à Turin. Il y a aussi le lac de Côme, le lac d’Aorte… L’avantage c’est qu’il y a beaucoup de belles choses pas loin. Après au niveau international on va dire, Novara est connu pour son gorgonzola, le fromage italien. C’est ici qu’on le fabrique.• Tu as visité un peu l’Italie, quelle ville, quelle région t’as marqué ?La Sicile, ça pourrait être magnifique. Mais malheureusement les gens sont pas très propres, les villes pas trop nettoyées. La mafia on ne la voit pas directement mais on sent qu’elle agit sur le plan et c’est un peu dommage. Après Milan et Sienne ont des centre-ville magnifiques.• Novara est avant dernier à 9 points de retard sur le premier non relégable… Si le club descend, tu vas rester ? Pour le maintien ça va être compliqué… Là je suis en fin de contrat, normalement je devrais prolonger, j’attends les propositions de la société. Mais si le club descend j’aimerais rester. A ce moment là je prétendrai à plus de temps de jeu en Serie B, essaierai de me faire repérer par d’autres clubs ou pourquoi pas essayer de remonter en Serie A avec Novara. • Les gens n’ont pas du mal à prononcer ton nom en Italie ?Coubronne, on va dire que ça peut aller. En revanche Jean-Christophe j’ai fait une croix dessus. En Italie on m’appelle juste Jean, c’est plus simple à prononcer.• La version française de Novara, c’est Novare. La plupart des journalistes français prononcent ça Novaré. C’est chiant non ?Novaré… Ouais j’ai vu ça sur Internet, qu’on écrivait ça « Novare » . Je pense que la traduction la meilleure est encore Novara. Et pour Novaré, c’est vrai que je l’ai entendu à la télé ouais. Bon les journalistes d’aujourd’hui parlent plusieurs langues, donc on va dire « Novara » .• Au fait, tu savais que Novara c’est le club de cœur de Michel Platini ? Oui j’ai su ça à mon arrivée. Il y a une photo de lui à Novarello, le centre d’entraînement, où on le voit avec la coupe du monde. Puis je crois que son père ou son grand-père habite à Novara ou dans un village à côté. Il était assez souvent là et il avait fait une promesse, c’était de venir voir le match Novara-Juventus.• Et alors ?On attend. A l’aller je ne sais pas s’il était là, mais on accueillera la Juve bientôt (le 29 mai prochain, ndlr) donc on verra s’il tiendra parole.
Propos recueillis par Alexandre Pauwels