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Italie : une famille à recomposer
Après cinq longues années à avancer main dans la main, Roberto Mancini et l’Italie se sont séparés. Un divorce surprenant mais pas si étonnant tant la relation entre le Mister et son président s’est délitée ces derniers mois. La Nazionale doit donc tourner la page et si son successeur semble déjà trouvé, les négociations sont délicates.
Dimanche dernier, aux alentours de 13 heures, alors que les Italiens se mettent à table, une bombe est venue animer ce déjeuner dominical. « La Fédération italienne de football a pris acte de la démission de Roberto Mancini du poste de sélectionneur de l’équipe nationale, reçue tard hier soir », annonce la FIGC dans un communiqué. Une nouvelle quelque peu inattendue qui vient chambouler les plans de la Nazionale, avec l’Euro 2024 en ligne de mire. Cinq ans et trois mois après son arrivée à la tête des Azzurri, Mancini a donc décidé de poser son tablier et laisse derrière lui un bilan mitigé. En mai 2018, l’Italie se remet difficilement du traumatisme de San Siro, la claque contre la Suède privant la sélection du Mondial russe. Le chantier est colossal pour le nouveau boss : Roberto Mancini. Sous ses ordres, la Nazionale retrouve peu à peu ses couleurs, jusqu’à atteindre le Graal à l’été 2021. Loin d’être favorite, l’Italie parviendra à remporter cet Euro, venant concrétiser le fabuleux travail réalisé par Mancini et son staff. Mais l’ancien trequartista ne capitalisera pas sur ce succès, les choix incohérents se succèdent jusqu’au drame de Palerme et cette défaite face à la Macédoine du Nord, forçant les Transalpins à suivre une nouvelle Coupe du monde depuis leur canapé. Bien que le président Gabriele Gravina n’a cessé de lui faire confiance, Mancini a dit stop, à moins d’un an du prochain Euro. Un choix surprenant, d’autant plus qu’une semaine auparavant, la fédé italienne l’avait également nommé coordinateur technique des sélections U20 et U21. Si le décès de son bras droit, ancien coéquipier et surtout grand ami Gianluca Vialli n’a pas arrangé les choses ou que les sirènes de l’Arabie saoudite sont insistantes, le mal était bien plus profond.
Le perché du comment
À peine 24 heures après cette démission, Roberto Mancini exprime sa version des faits dans un entretien accordé à La Repubblica. « Depuis quelques temps, nous sommes en désaccord avec Gabriele Gravina, tease l’ancien entraîneur de l’Inter, qui reproche à son N+1 d’avoir empiété sur son terrain. J’ai cherché de nombreuses fois à lui parler et à lui expliquer les choses ces derniers temps. Il devait me rassurer et m’apporter de la sérénité, mais cela n’a pas été le cas, j’ai donc choisi de démissionner. Avez-vous déjà vu un président de fédération imposer un staff à son sélectionneur ? Je lui ai alors fait comprendre qu’il ne pouvait pas. » En cause donc, cette volonté de Gravina d’imposer certaines personnes dans le staff de Roberto Mancini, dont Leonardo Bonucci (dans un rôle similaire de De Rossi à l’Euro, qui ferait le pont entre les joueurs et le staff), chose inacceptable selon les dires de Roberto.
Cette relation conflictuelle durerait depuis de longs mois, comme l’avance notamment le Corriere della Sera, expliquant que cela aurait directement impacté le foyer de Roberto Mancini. Sa femme, Silvia Fortini, n’en pouvait plus de voir son mari souffrir et aurait été la première à exprimer ce mal-être à Gravina, qui aurait eu ensuite une discussion téléphonique avec l’ancien entraîneur de Manchester City. Mais trop tard. « Si Gravina voulait que je reste, il aurait tout fait pour que je reste, mais il ne l’a pas fait. Il restera le président qui a remporté l’Euro, pas celui qui a commis de nombreuses erreurs », juge Roberto Mancini qui confirme bel et bien que « la cassure existe depuis plusieurs mois ». Un désaccord qui ne concernerait pas uniquement cette question de staff. Selon la Gazzetta dello Sport, une clause prévoyait un licenciement en cas de non-qualification à l’Euro 2024, chose à laquelle l’ancien trequartista s’est opposé. La FIGC est restée sur sa position, le point de rupture était inévitable.
« Ce n’est pas une question d’argent mais de principes »
Pour pallier cette surprenante démission, la fédération s’est rapidement activée et deux noms sont sortis en tête de liste : Antonio Conte et Luciano Spalletti. Et c’est sur ce dernier que Gabriele Gravina a jeté son dévolu, bien que celui-ci avait annoncé – après une saison héroïque avec le Napoli – vouloir prendre une année sabbatique. Mais l’appel de la patrie est trop fort pour faire la sourde oreille. Si les négociations entre les deux parties avancent positivement avec un accord tout proche d’être trouvé, la FIGC se retrouve face à un problème. En effet, le divin chauve est toujours sous contrat avec le champion d’Italie en titre, qui n’a pas hésité à le rappeler. Dans un communiqué orchestré par le sulfureux président Aurelio De Laurentiis, le Napoli annonce que pour s’attacher les services de Spalletti, la FIGC devra payer la clause libératoire de trois millions d’euros, argumentant que « ce n’est pas une question d’argent, mais de principe », puis ajoute : « Ce principe ne concerne pas uniquement le Napoli mais bien l’ensemble du football italien, qui doit arrêter d’être amateur pour relever les défis en respectant les règles des affaires, des clubs et du marché. »
Comunicato sulla vicenda Spalletti e Nazionale 👇https://t.co/3vJcHDrjAS
— Official SSC Napoli (@sscnapoli) August 15, 2023
Pour contrer ces exigences napolitaines, Gabriele Gravina mise sur la carte de la non-concurrence. En effet, cette clause libératoire serait valable uniquement pour des potentiels concurrents (donc des clubs). Or, la Nazionale est une sélection et pourrait donc contourner cette clause. Si Aurelio De Laurentiis bombe le torse et ne souhaite (pour l’instant) pas revenir sur ses exigences, Gabriele Gravina ne compte pas lâcher les trois millions d’euros, surtout qu’une majorité des écuries transalpines est montée au créneau, s’opposant à un éventuel paiement puisque indirectement, ils estiment financer un concurrent. Le patron napolitain n’a pas encore capitulé et les négociations devraient perdurer encore quelques jours. Une chose est sûre : Gravina ne rêve que de Luciano Spalletti et ce dernier de la Nazionale, mais ne souhaite pas froisser ses relations avec le Napoli. Des « négociations complexes » comme souligné par la Gazzetta dello Sport mais le temps presse, à moins d’un mois des matchs cruciaux face à l’Ukraine et la Macédoine du Nord pour la qualification à un Euro 2024 plus loin que jamais pour les Italiens.
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