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Italie : la Coppa triste
Critiquée depuis de nombreuses années pour son format très avantageux à l'égard des plus grosses formations de la Botte, la Coupe d'Italie devrait une nouvelle fois de plus accoucher de quarts de finale constitués uniquement de club de Serie A. Un tableau pas très exotique, pour une compétition qui n'excite plus grand monde.
Pour que la compétition garde un soupçon d’inattendu, il faudra que le Virtus Entella, formation de Serie C, parvienne à battre la Roma ce lundi soir. Sur sa pelouse, à l’Olimpico. Dans le cas contraire, les quarts de finale de Coupe d’Italie auront des faux airs de journée de Serie A, où l’on retrouvera l’AC Milan, le Napoli, l’Atalanta ou Cagliari, la Lazio, la Juventus, l’Inter, la Fiorentina et donc éventuellement la Roma. Un tantinet rasoir ? Sans doute. Surprenant ? Pas du tout : la Coppa Italia offre un chemin sacrément dégagé aux plus grosses formations de Serie A.
La loi du format
La faute en revient essentiellement au format. Tout le monde connaît l’équation et elle est à première vue bizarrement déséquilibrée : contrairement à notre bonne vieille Coupe de France, où à peu près n’importe quel club adhérent à la FFF a le droit à une porte d’entrée dans la compétition, la Coppa n’est elle réservée qu’à une petite élite. À peine 78 clubs peuvent se joindre à la fête : 20 équipes de Serie A, 22 équipes de Serie B, 27 équipes de Serie C et seulement 9 de Serie D. Ce qui n’en fait de facto pas la coupe de toute l’Italie du football, ce qui est déjà critiquable en soi.
Excluant à l’égard des formations des divisions les moins huppées, le format est également foncièrement inégalitaire, puisque les huit clubs les mieux classés en Serie A lors de la précédente saison n’entrent en jeu qu’à partir des huitièmes de finale. Les autres formations de l’élite ne sont, elles, concernées par la Coppa qu’au tour précédent, le quatrième, alors que les autres équipes ont déjà disputé deux à trois tours dans la compétition.
La Coupe à moitié vide
Tout cela reste encore relativement léger lorsque l’on considère la plus grosse incongruité de l’épreuve : l’équipe qui a disputé le moins de matchs dans la compétition reçoit automatiquement son adversaire. En d’autres termes, quand une équipe de Serie A affronte une formation de standing inférieure, elle a l’avantage de jouer à la maison, à l’exception notable des demi-finales, qui se disputent au moyen d’une confrontation aller-retour. Sans surprise, les supporters de clubs de Serie B, C et D sont moins enclins à encourager leur formation à l’extérieur, puisqu’ils sont ainsi privés de l’enthousiasmante opportunité de recevoir un club huppé sur le terrain de leur équipe de cœur. Résultat, même si le trophée réserve encore à l’occasion quelques surprises, la Coppa semble ne pas enthousiasmer grand monde. Pour ces huitièmes de finale, on dénombrait notamment autour de 12 000 spectateurs pour le match entre la Lazio et Novara à l’Olimpico (4-1), et environ 15 000 pour Bologne-Juventus (0-2), Sampdoria-Milan (0-2) et Napoli-Sassuolo (2-0).
La couleur de l’argent
Mais pourquoi la Coupe d’Italie s’entête-t-elle donc avec ce format-là ? Peut-être parce que, en avantageant les équipes de Serie A, la compétition sous sa forme existante booste ses droits TV, les formations les plus compétitives générant globalement plus d’audience à la télévision. Exemple avec le montant que la RAI a accepté de verser pour conserver les droits TV domestiques de l’épreuve : 106 millions d’euros pour la période 2018-2021. Soit une somme en augmentation de 60% par rapport au contrat de diffusion précédent.
Un montant plutôt juteux, qu’une certaine Italie du football semble privilégier au détriment de ce qui constitue habituellement les savoureux ingrédients d’une coupe nationale : un petit club qui reçoit le gros dans un stade plein, sur une pelouse douteuse et porté par un public local qui n’attend que de voir David triompher de Goliath. De quoi donner envie à certains, comme le journaliste italien Salvatore Cantone, de rêver d’une autre Coupe d’Italie, plutôt que de s’intéresser à celle qui se déroule actuellement plutôt mollement sous leurs yeux : « Le trophée national devrait être un instrument permettant de faire rêver les petites équipes, non pas de favoriser les plus grandes. Et même si cela est fait pour garantir de meilleures audiences. »
Par Adrien Candau
Propos de Salvatore Cantone issus de liberopensiero.eu