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- Irlande du Nord-Italie (0-0)
Italie : barrages, ô désespoir
Quatre mois après avoir été sacrée sur le toit de l’Europe, voilà l’Italie forcée de passer une nouvelle fois par la case « barrages » pour espérer prendre part à la prochaine Coupe du monde. Impensable, mais bien vrai.
L’Italie aurait dû se douter que quelque chose ne tournait pas rond. Il y a trois jours, à l’heure où la Nazionale s’apprêtait à recevoir la Suisse dans un face-à-face à couteaux tirés, Giampiero Ventura mettait un terme définitif à ses activités dans le monde du football. Une coïncidence ? Sûrement, mais quand on se rappelle que l’ancien sélectionneur avait échoué à qualifier l’Italie au Mondial russe, soixante ans après la dernière sortie de route italienne dans l’exercice, le symbole apparaît plus fort que jamais. D’une tragi-comédie sans nom. Comme s’il était gravé dans le marbre que tout ce que ferait Ventura, de près ou de loin, affecterait la sélection transalpine jusqu’à son dernier souffle. Forcément, pour ne rien arranger, le septuagénaire aux allures de chat noir n’avait pas pu s’empêcher d’annoncer ceci à la Stampa le jour du match : « Je souhaite bonne chance à Mancini et j’espère qu’il pourra aller au Mondial et le gagner.(…)J’en suis sûr : on ira au Mondial. » Évidemment, rien ne s’est pour l’instant passé comme prévu.
La fête est finie
Si l’Italie n’a donc pas battu la Suisse (1-1) avec un (nouveau) penalty manqué par Jorginho (son candidat le plus sérieux pour le Ballon d’or) comme au match aller, l’équipe de Roberto Mancini n’est même pas parvenue à faire chavirer l’Irlande du Nord à Belfast ce lundi soir. Un nouveau score nul et vierge, d’une pauvreté proche du niveau affiché par l’Italie en 2017, qui ferait presque oublier les derniers mois de rêve vécus par la Botte toute entière. Ce temps où l’Italie faisait chavirer l’Angleterre à Wembley pour devenir championne d’Europe, ce temps où l’Italie a battu le record d’invincibilité (37 matchs consécutifs), ce temps où l’Italie enchantait même les observateurs français par son jeu, par son style offensif et emballant. À la place, revoilà cette Italie incapable de créer du danger, stérile au possible, et qui est même passée pas loin de s’incliner face à l’Irlande du Nord.
Mais attention : si la Suisse a composté son billet pour Doha en première classe en doublant l’Italie au buzzer, elle le doit à deux facteurs. À sa régularité, déjà, et à ses progrès constants depuis plusieurs mois. Mais aussi et surtout à la capacité fascinante de cette Italie à se noyer seule dans un verre d’eau. Face aux Suisses, la troupe de saltimbanques italienne n’a pas saisi les opportunités qui se présentaient à elle pour tuer le suspense. Au Parc Saint-Jacques, Yann Sommer est parvenu à dégoûter les Azzurri (0-0) qui auraient dû à ce moment-là siffler la fin de la récré. Ce lundi soir, c’est ce que confirmait entre les lignes Mancini au sortir de la déroute en Irlande du Nord : « C’est dommage parce que le groupe aurait dû être conclu avant ce match. On doit seulement retrouver ce qui nous a distingués jusqu’à aujourd’hui, et penser que nous avons raté deux penaltys dans des matchs décisifs (contre la Suisse). Quand tu ne marques pas les occasions que tu as, tu peux clairement te retrouver en difficulté. » Eh oui, aujourd’hui, c’est trop tard.
Le doute est de retour
Sans perdre un seul match durant ces éliminatoires, l’Italie se retrouve pourtant en barrages. En 2017 – année que s’étaient efforcés d’oublier la majorité des tifosi transalpins-, elle avait dû logiquement laisser passer l’Espagne devant elle. Cette fois, c’est la Suisse qui lui a grillé la politesse. C’est cette même Nati que la Nazionale avait brisée à l’Euro (3-0) sans trembler du début à la fin, elle aussi privée de certains cadres dans le sprint final (Embolo et Xhaka entre autres), qui s’endort ce soir avec des rêves plein la tête. Du côté des ouailles de Mancini, les prochaines semaines s’annoncent longues.
Le tirage au sort des barrages aura lieu le 26 novembre, date à laquelle l’Italie saura quelles seront les deux équipes qui se dresseront potentiellement sur sa route. Les noms déjà présents font froid dans le dos : Portugal, Russie, Pologne ou encore le cauchemar suédois ont déjà réservé leur printemps pour en découdre. Pendant ce temps-là, le sélectionneur italien poursuit son discours positif au possible pour chasser l’ombre du doute qui se fait de plus en plus pressante : « On doit récupérer des forces pour les barrages en mars. Si on ira au Mondial ? Je suis totalement confiant, et peut-être même que nous le gagnerons… » Après avoir transformé une équipe à l’agonie en machine à gagner, voilà que l’homme providentiel doit s’acquitter d’une nouvelle mission : réparer sa création pour ne pas manquer une deuxième Coupe du monde de suite. Dans l’histoire, ce n’est jamais arrivé. Et si cela devait se produire, cela ne servira à rien d’en vouloir à Ventura.
Par Andrea Chazy