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Isco, la pièce qui n’entre dans aucun puzzle
Il y a quelques mois, Isco était un des meilleurs joueurs du Real et enchaînait les titularisations. Mais depuis les retours de blessure de Bale et de Benzema, il a retrouvé son éternel statut, celui d'une roue de secours de luxe.
Qu’on ne vienne pas chercher des noises à Unai Emery. Il n’a peur de rien, ses joueurs non plus, et il a tenu à faire passer ce petit message en conférence de presse après la victoire contre Toulouse : « Notre équipe est prête. » Depuis, comme avant chaque gros match, le petit jeu consiste à sortir les boules de cristal pour tenter de deviner la composition à l’avance. Qui a joué contre le Téfécé ? Combien de temps ? Qui a été remplacé ? Qui jouait avec qui hier à l’entraînement ? Qui était placé comment ? Diarra ? Kurzawa ? Di María ? Trois noms qui riment avec « On en fait quoi ? » Mais n’allons pas croire que ce petit manège est un réflexe franco-français. En Espagne aussi, ça gratte sec dans les journaux sportifs pour faire parler les indices et deviner ce qu’il se passe dans la caboche de Zidane. Sauf que la partie de Cluedo n’a d’intérêt qu’avec la compo du PSG, où Emery peut réserver des surprises à chaque ligne. Au Real, à moins d’un énorme twist scénaristique réservé par un Zidane qui se croirait dans Usual Suspects, on connaît le nom des onze bonshommes qui commenceront le match. Et au moment de regarder la liste, comme un lycéen qui vient de louper son bac et qui éclate en sanglots devant les caméras indiscrètes du JT de France 2, Isco n’y apercevra pas son nom.
Pots cassés
Comme pour tous les gros matchs du Real, en fait. Les Clásicos, la Ligue des champions, les matchs contre l’Atlético ou les autres gros bonnets espagnols… Isco les regarde quasiment tous depuis le banc de touche depuis son arrivée, il y a cinq ans. Et pourtant, la première moitié de la saison 2017-2018 n’a fait que lui sourire. Ronaldo suspendu, Benzema et Bale blessés, Isco voulait jouer ? Il allait jouer. Enfin des éclaircies dans le ciel ! Et comme une bonne nouvelle vient toujours accompagnée d’une autre bonne nouvelle, pour adapter son équipe aux circonstances, Zizou avait basculé vers un 4-4-2 en losange.
Avec Isco en vrai meneur de jeu, évidemment. Enfin à son poste préféré après tant de temps à être promené de tous les côtés du terrain pour dépanner, Isco s’amusait. En octobre dernier, il avait déjà passé quatre fois plus de minutes sur le terrain qu’au même moment de la saison 2016-2017 et pensait qu’il était bon de partager son bonheur avec la terre entière : « Zidane m’a donné la possibilité d’être important. C’est le seul entraîneur qui m’a fait jouer à mon vrai poste. Je suis très content et j’essaye de lui rendre cette confiance sur le terrain. » Très bien. Sauf que le bonheur d’un homme ne fait pas le bonheur d’un club, et qu’on ne peut pas vraiment dire que ces ajustements aient beaucoup réussi au Real. Du coup, quand tous les grands blessés sont revenus de l’infirmerie, c’est Isco qui a payé les pots cassés.
Trompe-l’œil
C’est un des soucis du statut de roue de secours. Tout le monde est content de vous avoir sous la main, mais on vous remet dans le coffre de façon ingrate au moment où le pneu d’origine est regonflé. Dans les faits, Isco est un des joueurs les plus utilisés du Real et il risque encore de s’envoyer une saison à plus de 30 matchs en Liga, la cinquième de suite. Un trompe-l’œil, ou plutôt l’arbre qui cache la forêt d’entrées en jeu à la 70e. Le monde du football reposant sur quelques ressorts simples, mise à l’écart se met très vite à rimer avec rumeurs de départ, surtout à Madrid. Le journal AS n’est ni le plus rigoureux ni le plus fiable du monde, mais il n’hésite jamais à mettre les pieds dans le plat.
Alors le 8 février dernier, il bombardait un brutal « Zidane veut vendre Isco » en une avec une photo des deux hommes en pleine page. Toute personne un brin terre-à-terre se rend pourtant bien compte que tout indique le contraire, puisque Isco a prolongé son contrat jusqu’en 2022 cet automne et que Zidane a grondé les propagateurs de potins il y a quelques jours : « C’est bien que vous me posiez la question. Vous me demandiez pourquoi je ne recrutais pas. J’ai toujours confiance en mon équipe. Quand je commence quelque chose, je vais au bout avec ce que j’ai. J’aime Isco et je veux qu’il reste ici toute sa vie. C’est un bon joueur et il va le prouver. » Encore faudrait-il qu’il joue plus de vingt minutes par match.
Par Alexandre Doskov