Irlande au tirage, emmerdes au grattage…

L’Irlande. Comme prévu. Parce que quitte à en chier jusqu’au bout, il fallait bien que ça tombe sur la verte Erin, le moins faible des barragistes proposés aux Bleus. Avant de parler foot, il faut juste se souvenir que le XV d’Irlande a gagné le Tournoi des 6 Nations l’an passé en débutant sa série de cinq victoires par un large succès contre le XV de France 30-21. Histoire de rappeler qu’il existe une vraie dynamique conquérante dans ce pays et qu’elle n’est pas que foot… Un pays déjà durement frappé par la crise et qui se serre d’autant plus les coudes qu’il a été récemment humilié par l’Europe (dont la France !) qui lui a imposé un deuxième référendum, après le premier auquel l’Eire avait répondu non. Moralité : faut pas chauffer l’Irlandais, faut le respecter…

L’Irlande, c’est d’abord un coach, Giovanni Trapattoni. A priori, le genre de stratège assez malin pour bien décrypter les forces et surtout les faiblesses des Bleus (une défense axiale qui flotte, un jeu qui penche presque exclusivement à gauche et une faible efficacité devant le but). On devine surtout que le Trap, c’est un supplément d’âme italien ultra compétitif (comme le défi personnel permanent que l’ombrageux Lombard semble s’imposer à lui-même) rajouté au fighting spirit irlandais. On le sait, c’est aussi et surtout du point de vue mental que tout peut se jouer. Ceci dit, les Bleus ne sont pas non plus des mômes. Pour le reste, est-il encore besoin de rappeler que les Verts ont fini invaincus de leur poule et que leur double confrontation contre l’Italie s’est soldée par un 0-0 en Italie et un 2-2 concédé in extrémis par Gilardino à Dublin ? Voilà qui parle. Le bilan franco-irlandais général penche côté français : 5 victoires, 4 nuls et 4 défaites. Le dernier affrontement remonte aux éliminatoires de la Coupe du monde 2006. Plutôt un bon souvenir : un 0-0 au Stade de France au printemps 2005 et une victoire décisive en septembre (1-0) à Dublin avec un but splendide de King Henry. Sauf que chez les Bleus, ce jour-là il y avait encore Zidane, Thuram, Vieira, Makélélé, Sagnol…

Heureusement, côté irlandais, ça a l’air aussi moins fort aujourd’hui qu’il y a quatre ans. Déjà, Roy Keane n’est plus là. Pour le reste, l’équipe joue en 4-4-2 british (les 11 titulaires jouent en Angleterre), avec deux ratisseurs (Andews, Whelan) et des joueurs de couloir (Damian Duff à droite, Hunt à gauche et Aiden Mc Geady). Devant, Doyle et l’infatigable Robbie Keane (29 ans, Tottenham). Dans les buts, un bon gardien, Shay Given (Manchester City) et en défense l’axial bien connu et expérimenté Richard Dunne (Aston Villa) et le latéral droit John O’Shea, seul joueur de la sélection à jouer régulièrement la Ligue des Champions. Comparé aux cadors français qui jouent tout le temps la C1, c’est là que la balance penche nettement en faveur des Bleus. Jouer en Premier League, avec son engagement et son intensité proverbiales, ça diminue un peu la faiblesse intrinsèque des Irlandais sur ce plan.

Alors ? Pronostic. Levons les hypothèques Gourcuff et Ribéry, a priori de retour pour les barrages. A priori… Au vu de ce que la France est capable de produire en attaque ces derniers matchs, notamment dans le jeu collectif court et rapide, depuis au moins France-Nigeria, les Bleus auront des occasions de but, c’est certain. Plus encore, la France dispose de joueurs pouvant créer l’exploit en solo : Henry (contre Serbie, à l’aller), Gignac (contre l’Autriche), Benzéma (contre les Féroé), Ribéry (contre Roumanie, aller), Gourcuff (contre Roumanie, aller aussi), Anelka (contre Ukraine, aller en 2007). Les coups francs bien négociés offrent également des possibilités de marquer (Henry). Rien que ça, ça devrait suffire à faire la différence avec des Irlandais qui ne possèdent pas cette force de frappe offensive. Rien que pour ça, avantage France. Reste les interrogations : entretenir la force collective, avoir la volonté de gagner tous les duels, respecter la discipline tactique, garder une concentration sans faille et surmonter les coups durs (but encaissé, expulsion)… Autant de paramètres essentiels à propos desquels les Irlandais semblent blindés. Et c’est ça qui inquiète : l’Irlande semble a priori moins talentueuse mais plus “compacte”.

En 2005, les Bleus de Zidane avaient fait la différence. En 2009, c’est différent : ça ira très vite, c’est direct, avec deux matchs en quatre jours. Pas le temps de gamberger. A la limite, le fait de jouer au retour à St-Denis importe peu. Ce sera tellement intense qu’il faudra appréhender les deux matchs comme Serbie-France : en considérant qu’il faille jouer, sans s’arrêter d’attaquer, comme les Bleus l’ont fait, même réduits à 10. En face, c’est l’Irlande : tant qu’ils ne sont pas battus, ils seront dangereux. Détail qui compte : Croke Park, c’est 80 000 green people qui soutiennent leur équipe. Autre détail qui compte : en 2005, les supporters irlandais avaient bouffé le public français au Stade de France (0-0). Un dernier mot. Pas de qualification sans un grand Thierry Henry…