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Infantino, à contre-cœur

Par Nicolas Kssis-Martov
5 minutes
Infantino, à contre-cœur

La FIFA s’est donc finalement résolue, sous la pression de l’UEFA – pas la moindre des performances de Poutine que d’avoir réuni les deux instances – à exclure provisoirement la Russie de la planète foot, après 24 heures de tergiversations. Gianni Infantino, fort de sa relation privilégiée avec Vladimir Poutine, doit de son côté attendre que tout rentre dans l’ordre.

Reconnaissons-lui au moins cette qualité : Gianni Infantino arrive encore à nous surprendre, tandis qu’il ne cesse de creuser la tombe du football. Coupe du monde au Qatar, Mondial tous les deux ans, etc. Rien ne semble l’arrêter ni lui faire monter le rouge au front. L’actuelle invasion de l’Ukraine a surtout dû l’agacer. Il s’est retrouvé obligé d’admonester son grand ami Vladimir Poutine. Le nouveau tsar avait pourtant offert une si belle Coupe du monde à la FIFA. Gazprom se révélait un si généreux sponsor. Or, impossible de fermer les yeux cette fois, comme il s’y emploie depuis des années concernant les morts sur les chantiers au Qatar. La guerre est de retour sur le Vieux Continent, le bruit des canons tonne un peu trop près des palais occidentaux. L’OTAN se réveille. Les sanctions se multiplient. Les bombes tombent sur Kiev, comme les corps dans les rues de la capitale historique. Gianni Infantino ne pouvait pas davantage se boucher les oreilles, car pour le coup, le football est aux premières loges et s’est exprimé.

Cette guerre démontre, s’il en était encore besoin, à quel point ce sport constitue désormais un des fronts des conflits géopolitiques, un acteur crucial des relations diplomatiques. Les joueurs ukrainiens présents dans les divers championnats « à l’ouest » ont appelé à l’aide. La fédération ukrainienne a demandé l’exclusion de ses consœurs russe et biélorusse, qui fonctionnent sous la tutelle de gouvernements particulièrement autoritaires. En France, Noël Le Graët a également suggéré la mise à l’écart de la Fédération russe (RFS) pendant que notre ministre des Sports, Roxana Maracineanu, imposait aux athlètes tricolores de ne plus se rendre en Russie. L’UEFA a d’ailleurs d’ores et déjà délocalisé la finale de Ligue des champions de Saint-Pétersbourg au Stade de France à Saint-Denis. De son côté, le CIO multiplie les restrictions et la pression sur les fédérations internationales. Dès lors, le petit monde du ballon rond se positionne, et les yeux se tournent désormais forcément vers Zurich. Dans un premier temps, la sainte parole arriva comme une simple prière : « Avant tout, la FIFA tient à réitérer sa condamnation de l’usage de la force par la Russie dans son invasion de l’Ukraine. La violence n’est jamais une solution, et la FIFA exprime sa plus profonde solidarité à toutes les personnes touchées par ce qui se passe en Ukraine.(…)Surtout, la FIFA croit fermement que le mouvement sportif doit être uni dans ses décisions sur ce sujet et que le sport doit continuer à être un vecteur de paix et d’espoir. » Avec pour première conséquence des matchs à l’extérieur et l’absence de son hymne (adopté en 2000 par Poutine, qui reprend la mélodie de celui de l’URSS, mais avec des paroles différentes).

Quadrature du ballon rond

Seulement, face à ces demi-mesures, quelques pays avaient décidé de franchir le Rubicon, et clairement annoncer leur refus de croiser ne serait-ce que 90 minutes la route de la sélection russe, par exemple l’Angleterre. De quoi rendre intenable dès le départ « la voie du milieu » de la FIFA qui tenta d’abord de faire durer la prolongation. « En ce qui concerne les prochains éliminatoires de la Coupe du monde de la FIFA 2022, la FIFA a pris bonne note des positions exprimées via les réseaux sociaux par l’Association polonaise de football, l’Association de football de la Tchéquie et l’Association suédoise de football et a déjà engagé un dialogue avec toutes ces associations de football. La FIFA restera en contact étroit pour rechercher ensemble des solutions appropriées et acceptables. » Comment résoudre cette quadrature du ballon rond ? En gardant la Russie, peu importe sous quel sigle, dans ses rangs, la FIFA devrait en toute logique, la sienne, saquer les trois pays qui refusent de la rencontrer, et la qualifier par forfait. On se doute que cette funeste plaisanterie ne ferait sourire personne. Finalement, après une réunion commune avec une UEFA bien plus radicale, la décision est tombée. La Russie est excommuniée, jusqu’à nouvel ordre, des compétitions officielles, ce qui règle a priori la question des barrages pour le Mondial 2022 ou la participation du Spartak Moscou à la Ligue Europa.

Malaise et hypocrisie

Le malaise demeure palpable. Certes les statuts de la FIFA permettent la possibilité de suspendre, même provisoirement, la Fédération russe, comme l’Afrique du Sud ou la Yougoslavie par le passé. On songe en particulier à l’article 3 sur les droits de l’homme ou le 4 sur les discriminations. Ces textes sibyllins et vagues s’avèrent toujours sujet à interprétation et demeurent donc dépendants de la volonté politique de ceux qui doivent les appliquer. Or Gianni Infantino, un homme pour qui le football est d’abord un échiquier et un chéquier, a plutôt freiné des quatre fers. Peut-être aussi désirait-il éviter de voir se multiplier les demandes similaires pour d’autres conflits (Israël/Palestine, Yémen, Chine/Ouïghours…). Plus prosaïquement, à l’instar d’une communauté internationale, et d’une Europe où personne n’a rompu ses relations diplomatiques avec le Kremlin, il savait que l’avenir s’écrira davantage avec Moscou que Kiev. En attendant, place à la bonne conscience. « La FIFA appelle à nouveau au rétablissement urgent de la paix et à l’ouverture immédiate d’un dialogue constructif. La FIFA reste en contact étroit avec l’Association ukrainienne de football et les membres de la communauté ukrainienne du football qui demandent de l’aide pour quitter le pays aussi longtemps que le conflit actuel persiste. » Cette situation ne lui laissait finalement guère de marge de manœuvres. Même l’UEFA a fini par renoncer à son contrat de 40 millions avec Gazprom. Pour l’instant, le foot montre l’exemple à des chancelleries dont aucune n’a osé rompre ses relations diplomatiques avec Moscou. Infantino doit trouver bien injuste ce monde où les dictateurs sont si mal vus.

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