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Ils pensaient avoir gagné au tirage
Attention, un tirage au sort peut être trompeur. Il est arrivé plusieurs fois, dans l'histoire, qu'une grosse équipe se retrouve dans un groupe abordable, s'estime chanceuse au tirage, et se fasse sortir dès le premier tour. À méditer.
Italie 1974
Au début des années 70, l’Italie est l’une des meilleures équipes du monde. La Nazionale a remporté l’Euro 1968, et a disputé la finale de la Coupe du monde 1970, en s’inclinant face au Brésil de Pelé. En 1974, donc, elle fait partie des favorites au sacre mondial. Les Italiens ont d’ailleurs survolé leur groupe de qualification, en terminant premiers, sans la moindre défaite. Et le tirage est clément pour la Nazionale qui, outre l’Argentine, hérite de la Pologne, qui n’avait plus participé à la Coupe du monde depuis 1938, et du petit poucet, Haïti. Vainqueurs de Haïti lors du premier match de poule, les hommes de Valcareggi pensent que c’est dans la poche. C’était sans compter sur la surprenante Pologne, qui gagne tous ses matchs et relègue l’Italie à la troisième place du groupe. À cause d’une différence de buts défavorable par rapports aux Argentins, la Squadra est éliminée dès le premier tour. La Pologne, elle, fera troisième de ce Mondial, et son attaquant Grzegorz Lato terminera meilleur buteur du tournoi. Comme quoi, les préjugés du tirage au sort…
Espagne 1978
En 1978, le groupe de la mort, c’est le groupe 1, avec la France, l’Italie et l’Argentine. Un groupe fatal aux Bleus. Tout semble plus simple pour l’Espagne. La Roja tombe dans le groupe du Brésil, mais aussi de la Suède et de l’Autriche. Autant dire que les deux places qualificatives semblent déjà réservées aux Brésiliens et aux Espagnols. Pour resituer le contexte, l’Espagne ne s’était plus qualifiée pour une grande compétition depuis la Coupe du monde 1966. Douze années d’absence, et une équipe nouvelle, pleine d’envie, avec des joueurs comme Asensi, Dani, le buteur de Bilbao, ou encore Pirri, libéro du Real Madrid. Pour un retour, cette poule semble donc parfaite, avec un gros test face au Brésil, et deux matchs abordables face à la Suède et l’Autriche. Peut-être trop confiante, l’équipe de László Kubala s’incline 2-1 dès le match d’ouverture, face à l’Autriche. La qualif devient carrément un mirage après le nul 0-0 contre le Brésil, où les Espagnols disputent pourtant un gros match. La victoire 1-0 face à la Suède ne suffit. C’est l’Autriche, à la surprise générale, qui termine en tête, et se qualifie en compagnie du Brésil. La lose ? Oui oui, la lose.
Portugal 1986
Le gros échec de la Coupe du monde, c’est le Portugal. À l’époque, les deux premiers de chaque poule se qualifient, mais aussi les meilleurs troisièmes. Ce qui laisse de bonnes possibilités à chaque nation pour se qualifier. Alors, lorsque le Portugal, non-qualifié depuis 1966 et sa troisième place lors du Mondial anglais, tombe dans le groupe du Maroc, de l’Angleterre et de la Pologne, les Lusitaniens s’y voient déjà. S’ils ne sont pas premiers, ils seront deuxièmes. Et, s’ils ne sont pas deuxièmes, dans le pire des cas, ils seront troisièmes et se qualifieront. La seule hypothèse que le Portugal n’avait pas envisagée, avec de tels adversaires, c’était de terminer à la dernière place. Et devinez quoi ? Bah le Portugal va terminer à la dernière place. Tout avait pourtant bien commencé, avec un succès 1-0 contre l’Angleterre. Mais après, c’est l’écroulement. Défaite 1-0 contre la Pologne, puis revers fou face au Maroc, 3-1. Avec seulement deux points, le Portugal termine dernier. Les trois autres nations se qualifient pour les huitièmes. La losao ? Oui oui, la losao.
Espagne 1998
En 1998, l’Espagne a déjà une belle génération. C’est avec un moral gonflé à bloc que les Espagnols arborent le Mondial chez leurs voisins français. La Roja a encore en travers de la gorge (et du nez) l’élimination en 1994 face à l’Italie. Elle veut briller, elle veut gagner. Lors des phases de qualification, l’Espagne a très largement dominé son groupe. Elle a terminé en tête avec un bilan de huit victoires, deux nuls et zéro défaite, dans une poule qui comptait pourtant la Yougoslavie et la République tchèque, finaliste de l’Euro 2000. Le tirage au sort donne à l’Espagne un groupe avec la Bulgarie, le Nigeria et le Paraguay. Un groupe que l’on pourrait qualifier de « poule des victimes de Baggio 94 » . Mais le premier match est un cauchemar pour les Espagnols, avec cette défaite 3-2 contre le Nigeria, et cette célèbre bourde de Zubizarreta. Tenue en échec par le Paraguay au deuxième match, l’Espagne a besoin d’une victoire face à la Bulgarie pour se qualifier. Elle va bel et bien l’obtenir : un cinglant 6-1 refilé aux potes de Stoichov. Alors, qualifiés ? Bah, non. Parce que dans le même temps, le Paraguay a battu le Nigeria, et les deux pays se sont donc qualifiés pour les huitièmes, laissant l’Espagne à la troisième place. Après les victimes de Baggio, les victimes du tirage.
France 2002
C’est l’histoire d’une équipe qui vient de gagner la Coupe du monde et l’Euro, et qui est persuadé qu’elle va encore remporté le Mondial. À tel point que certains (Adidas) se disent que c’est une bonne idée de déjà faire des pubs avec une deuxième étoile sur le maillot. Il faut dire que le tirage au sort avait de quoi conforter les Bleus dans leurs ambitions. Une poule modeste composée de l’Uruguay, du Sénégal et du Danemark. Le genre de tirage qui, pour la meilleure équipe du Monde à ce moment là, aurait dû être synonyme de qualification pour les huitièmes. Mais ça, c’était sans compter sur le flop français. Battus par le Sénégal, les Bleus font ensuite match nul contre l’Uruguay, avant de s’incliner 2-0 contre le Danemark. Bilan : un point, zéro but marqué, trois encaissés. Adidas n’a plus qu’à brûler tous ses lots de maillots à deux étoiles.
Portugal 2002
La même année, en 2002, le Portugal, aussi, pensait avoir hérité d’un groupe a priori facile. Certes, le Portugal de l’époque n’a pas encore Cristiano Ronaldo. Mais la sélection lusitanienne compte dans ses rangs des Pauleta, Rui Costa, Luís Figo, Fernando Couto, Nuno Gomes, Sergio Conceição et autres Costinha. Les Portugais n’ont plus participé à la Coupe du monde depuis 1986, mais viennent de faire une demi-finale lors de l’Euro 2000, avec cette fameuse élimination face à la France (Abel Xavier, c’est pour toi). Or, le tirage au sort du Mondial asiatique lui donne une belle chance de briller : États-Unis, Pologne et Corée du Sud, pays organisateur. Trois équipes largement abordables pour les Portugais. Problème : après une défaite 3-2 lors du match inaugural contre les USA, les choses se compliquent. Le Portugal se ressaisit immédiatement avec un sévère 4-0 contre le Pologne (triplé de Pauleta) et doit affronter la Corée du Sud pour se qualifier. Portés par les 50.000 du Incheon Munhak Stadium, les Sud-Coréens s’imposent 1-0 grâce à un but de Park-Ji-Sung. La défaite des États-Unis face à la Pologne n’y change rien : le Portugal est éliminé dès le premier tour. Asie amère.
Italie 2010
2006. L’Italie est sacrée championne du Monde à Berlin. Quatre ans plus tard, les Azzurri ne sont plus favoris, mais font toujours partie des gros cadors, d’autant que l’équipe a été reprise en mains par Lippi, après la parenthèse Donadoni. Lors du tirage au sort, le groupe de la mort est pour le Brésil, qui tombe avec le Portugal et la Côté d’Ivoire. Les Italiens, eux, sont vernis. Ils se retrouvent avec le Paraguay, la Slovaquie, et la Nouvelle-Zélande. Pour l’Italie, c’est clair et net : la Nazionale est déjà en huitièmes de finale. Le premier match se solde par un nul face aux Paraguayens. Peu importe, l’Italie va écraser la Slovaquie et la Nouvelle-Zélande. Oui, sauf que lors de la deuxième journée, les Azzurri font encore match nul, cette fois-ci contre de vaillants Néo-zélandais. Peu importe, puisque l’Italie va écraser la Slovaquie. Pire : les Italiens, comme en 82, vont faire match nul contre les Slovaques et sortir de leur poule avec trois points. Mais là, c’est le drame. La Nazionale perd 3-2, Simone Pepe rate la balle de la qualification à la 95e minute, et le pays tout entier n’y croit pas. Le champion du monde termine dernier de sa poule. Finalement, il aurait peut-être mieux valu tomber dans le groupe de la mort.
Par Eric Maggiori