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Il y a vingt ans, Robert Louis-Dreyfus lançait son premier mercato avec l’OM
Il y a vingt ans, Robert Louis-Dreyfus reprenait l'OM avec l'ambition d'en faire le Bayern du sud. Deux décennies après, l'arrivée de Frank Mc Court offre de nombreuses similitudes. François Lemasson, recruté alors pour être la doublure d'Andreas Köpke, se souvient et compare les deux générations.
« À l’époque, on me vend un gros projet : l’OM qui veut redevenir compétitif à l’échelle européenne et gagner le championnat de France. » C’était il y a vingt ans, mais François Lemasson s’en souvient comme si c’était hier. Alors gardien chevronné qui entre dans la dernière ligne droite de sa carrière, il est recruté par Marseille pour être la doublure de l’Allemand Andreas Köpke. L’OM est à un tournant de son histoire : Robert Louis-Dreyfus a repris le club à l’hiver précédent, et comme Frank McCourt en 2017, il annonce vouloir remettre Marseille au sommet du foot hexagonal, voire européen. L’homme d’affaires franco-suisse parle de faire de son jouet « le Bayern du sud » et assure sur le plateau de Téléfoot que « quand on aime, on ne compte pas » . En clair, il va lâcher de l’oseille, et pas qu’un peu. « Le recrutement parle dans ce sens : Laurent Blanc qui revient de Barcelone, Claude Makelele qui était visé par d’autres gros clubs, Patrick Colleter, et puis aussi Ravanelli et Dugarry un peu plus tard, et même Pires (qui en réalité arrive la saison suivante, après la Coupe du monde, ndlr) » , se souvient Lemasson. Aujourd’hui entraîneur des gardiens à l’AS Cannes, il estime que les hautes ambitions de l’époque ont été plutôt bien honorées : « On est allés en finale de Coupe de l’UEFA deux ans après (défaite contre Parme, ndlr), on a perdu le championnat sur un but de Feindouno qui a dribblé sur la même action onze supporters et 40 000 spectateurs parisiens (sic)… »
« Est-ce que l’OM d’aujourd’hui pourrait se payer un Laurent Blanc ? »
L’OM Champions Project de 2017 peut-il avoir la même réussite, voire plus si affinités ? En 1997, RLD ne bouge pas au mercato d’hiver 1996-1997, mais dégaine onze recrues et le deuxième budget de Ligue 1 derrière Paris pour arriver à ses fins dès l’été venu. Avec quelques gros noms bien ronflants donc, à mettre à disposition de Rolland Courbis : Claude Makelele (Nantes), Laurent Blanc (Barcelone), Patrick Colleter et Cyril Domoraud (Bordeaux) ou encore Titi Camara (Lens). Avant les arrivées de Fabrizio Ravanelli (Middlesbrough) à l’automne et de Christophe Dugarry (Barcelone) à l’hiver. « J’espère qu’on ne s’est pas trompé dans le choix des musiciens. Après, comment va fonctionner l’orchestre, on aura l’occasion de le voir toutes les semaines » , déclare le coach devant les caméras de France 3. Avec 2017, pas mal d’éléments rapprochent les deux générations marseillaises. Le choix d’un coach réputé à défaut d’être de classe internationale : Courbis d’un côté, Rudi Garcia vingt ans après. Et la volonté de se positionner sur des internationaux français, l’OM 2017 ayant déjà rapatrié Dimitri Payet et recruté l’espoir Morgan Sanson au mercato hivernal. Ce qui a vraiment changé selon Lemasson, c’est le contexte. « C’était une autre époque, avant la Coupe du monde, les salaires des joueurs n’avaient pas encore explosé. Aujourd’hui, est-ce que l’OM pourrait se payer un Laurent Blanc ? Je ne crois pas. On parle de qui ? Laurent Koscielny, cela va être dur de l’avoir, et Adil Rami, c’est quand même en fin de cycle. Aujourd’hui, ils n’ont pas beaucoup bougé. Germain ? Ouais. Giroud ? Oui, cela peut être intéressant avec une bonne équipe autour, surtout que ce serait moins dur en Ligue 1 qu’en Premier League, où les mecs te rentrent dedans… Mais Payet par exemple, ses meilleures années sont derrière lui, je pense. »
« Ce mercato va être révélateur »
Et surtout, l’OM n’a plus la même aura en 2017 que vingt ans plus tôt, malgré une relégation administrative entre 1994 et 1996 à cause de l’affaire VA-OM. « Le projet McCourt pour le moment, il n’est pas dit qu’il fasse aussi bien, l’OM part de loin derrière Paris, Monaco ou même Lyon, alors qu’en 1997, Marseille, c’est le club principal en France. Il y a eu une relégation en D2, mais aussi une Ligue des champions quatre ans avant… À l’époque, Paris est un rival, mais c’est le club de la capitale contre l’OM qui est plus le club de la France, qui touche plus de monde. C’est moins le cas aujourd’hui. » Entre un PSG aux finances extensibles, une AS Monaco qui a trouvé un modèle efficace ou Lyon qui a su se créer un socle solide à travers la formation. Les dirigeants marseillais doivent trouver une recette miracle. Lemasson a ses idées sur le modèle de développement qui peut fonctionner dans la cité phocéenne. « L’OM va devoir s’appuyer sur son gros vivier de la formation, comme Lyon, et aussi réussir à faire des coups comme Monaco, qui a trouvé une belle stratégie. L’idée de se focaliser sur le marché français en priorité, c’est pas idiot, mais la limite de l’OM, c’est qu’ils ne peuvent pas dans un premier temps prendre et garder les meilleurs joueurs. Il faut plutôt dénicher et valoriser. » Avec une autre difficulté, « la faible attractivité de la Ligue 1 en 2017. Dans les années 1990, les clubs français allaient loin en Coupe d’Europe, six ou sept pouvaient prétendre jouer un rôle sur le continent, même quand tu allais chez le 12e, c’était chaud. Donc forcément cela attirait plus facilement de très grands joueurs. » L’OM va donc devoir grandir en espérant que l’ensemble du championnat en fasse de même. Un travail de longue haleine qui ne doit pas faire oublier les enjeux du court terme : « L’OM a clamé des ambitions, mais j’attends de voir. Ce mercato d’été va être très révélateur des réelles ambitions. Là, ils ne bouclent pas Mandanda pour plusieurs millions. On n’a pas annoncé un Di María ou une star. Fin août, on saura s’il y a un gros projet ou que de la gueule… »
Par Nicolas Jucha
Propos de François Lemasson recueillis par NJ