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Il y a vingt ans, le LOSC retrouvait la Division 1

Par Simon Butel
Il y a vingt ans, le LOSC retrouvait la Division 1

Le 31 mars 2000, à la faveur d'un large succès face à l'ASOA Valence (4-1), Lille actait son retour en D1, trois ans après l'avoir quittée. Une remontée en forme de point de départ pour le LOSC, qui posait en coulisses les bases de son irrésistible ascension sportive des vingt dernières années. Retour sur une époque où les Dogues recevaient à Grimonprez-Jooris, avec coach Vahid dans le costume du dresseur et Carl Tourenne dans le rôle du chien de garde.

Saint-Cast-le-Guildo, juillet 1999. Sous les ordres de Vahid Halilhodžić, leur entraîneur depuis bientôt un an, les joueurs lillois en chient dans les Côtes-d’Armor. En silence. Jusqu’à cette série de 15/15 où le technicien bosnien impose à ses ouailles une treizième répétition, contre douze prévues initialement. L’effort de trop pour quelques joueurs. « Certains avaient vomi » , illustre Carl Tourenne, milieu de terrain du LOSC de 1997 à 2000, et homme de base de « coach Vahid » . L’exercice achevé, le groupe nordiste se met en ordre serré et improvise une sorte de manœuvre militaire, effectuant son tour de récup’ en rang et en chantant. « On est arrivé en courant face à lui, en lui faisant front. » Une mutinerie ? Un ralliement, plutôt. Et un acte fondateur.

1-0, le tarif maison

« Ce jour-là, pose Tourenne, il s’est dit : « Ils sont prêts. » » Prêts à affronter une troisième saison consécutive en Division 2, et à enfin atteindre cet objectif qui leur a filé entre les doigts pour un point en 1998, et pour quelques buts en mai 1999. Ce que confirme l’entame de championnat des Dogues, vainqueurs neuf fois lors des dix premières journées, dans la continuité d’une fin de saison précédente (treize victoires sur la phase retour) qui les a vus rouler sur la concurrence pour finalement mourir au pied du podium, devancés par Troyes à la différence de buts seulement (+27 contre +20). « On ne sort pas indemne d’un échec comme celui-là, affirme Tourenne. J’ai passé des vacances d’été mentalement compliquées. Mais on est restés sur cette lignée-là, et on a démarré en se disant : « C’est notre année, elle ne peut pas nous échapper, celle-ci. » » Leaders dès la deuxième journée et un succès face à Nîmes (1-0), les Nordistes s’emparent seuls des commandes du championnat au soir de la quatrième journée, le 17 août, après en avoir passé quatre à Ajaccio (4-2). Ils ne les céderont ni ne les partageront plus.

Battus pour la première fois lors de la onzième journée, à Caen (1-0), les Dogues bouclent la phase aller avec trois petites défaites et onze points de plus que leur dauphin guingampais, et partent en vacances avec dix longueurs d’avance sur Toulouse, leur premier poursuivant à la trêve. « On était un vrai rouleau-compresseur, résume l’ex-milieu défensif, aujourd’hui en charge des U17 des Chamois niortais, son club formateur. On imposait notre envie, notre force, notre ambition. On déboulait et on écrasait tout sur notre passage. » Une image corroborée par Dodzi Eklu, alors entraîneur adjoint d’Albert Rust puis Angel Marcos à Niort, et à présent coordinateur technique et sportif du club, où Carl Tourenne est revenu disputer les deux dernières saisons de sa carrière en 2009. « Il me dit souvent qu’il n’avait jamais vu une équipe avec une telle force physique, athlétique, autant d’agressivité, de puissance. On n’avait pas un jeu super léché, mais on prenait nos adversaires à la gorge. Notre pressing haut, c’était la marque de fabrique de Vahid. »

Vahid le policier, Lecomte le visionnaire

Mais l’impact de Vahid Halilhodžić sur le collectif nordiste est aussi et surtout psychologique. En attestent ces seize victoires (sur 25) par un but d’écart, dont treize sur le plus petit des scores. Ou ces 21 points glanés dans le dernier quart d’heure (soit huit succès et quatre nuls). « Ce que je retiens avant tout, c’est la force mentale du groupe, atteste Tourenne. Vahid avait réussi à nous lier. On avait une soif de revanche, et lui l’a décuplée. On avait une telle détermination, une telle volonté… Sur le terrain on avait l’impression qu’il ne pouvait rien nous arriver. Je faisais d’ailleurs en sorte de le faire comprendre aux adversaires. » Vahid aussi, parfois. Comme ce 12 novembre 1999 lors du choc face à Guingamp à la maison (2-0, 19e journée). Excédé par les libertés que s’octroie Guy Lacombe, l’entraîneur bosnien change de zone technique pour intimer à son homologue breton de regagner son banc. Halilhodžić devra une nouvelle fois jouer les policiers le 31 mars 2000, date à laquelle le LOSC acte son retour dans l’élite du football français en expédiant Valence (4-1, 31e journée). Mais ce sera pour faire rebrousser temporairement chemin à des supporters lillois un peu trop prompts à envahir la pelouse de Grimonprez-Jooris après le quatrième pion, signé Jean-Louis Valois.

Une hâte symptomatique d’un public nourri de longue date au pain noir (sur les dix-neuf saisons ayant précédé sa descente en D2 en 1997, Lille n’était parvenu à intégrer le top 10 que cinq fois). Mais plus pour très longtemps. Tandis que Wimbée, Fahmi, Cygan, Ecker, D’Amico, Cheyrou, Landrin, Collot, Bakari et Boutoille rendaient au club « une identité » et posaient sur le terrain les bases de sa première campagne européenne (la Ligue des champions 2001-2002, à laquelle tous ont pris part), le LOSC achevait en coulisses sa mue et sa transformation en société privée. Un processus prôné par le gouvernement Jospin et la ministre des Sports Marie-Georges Buffet, facilité par le souhait de la municipalité lilloise – alors actionnaire à hauteur de 89% – de lâcher du lest, et qui s’est notamment traduit au printemps 2000 par l’arrivée à la tête du club du duo Luc Dayan – Francis Graille. Artisan du sauvetage du club dans les années 1990, Bernard Lecomte cède au premier la présidence et s’en va sur ces mots : « L’avenir du LOSC commence demain avec une nouvelle dimension, de nouveaux moyens, et même un stade. Que rêver de mieux ? Le LOSC peut prétendre devenir l’un des grands clubs français de demain. Il aura désormais les moyens de ses ambitions, et c’est essentiel. » Un discours qui sonne vingt ans plus tard comme une heureuse prophétie.

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Par Simon Butel

Propos de CT recueillis par SB

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