ACTU MERCATO
Il ne pouvait pas aller ailleurs qu’à Moscou, Valbuena ?
C'est l'un des meilleurs joueurs de l'équipe de France au Mondial. Son indemnité de transfert est quatre fois moins importante que celle de Griezmann. Pourtant Mathieu Valbuena est sur le point de rallier le Dynamo Moscou. Explications.
Jean-Pierre Papin est resté 8 ans à l’OM. Au moment de partir, le capitaine est allé chez l’ennemi, le Milan AC, le seul club qui semblait au-dessus de l’équipe phocéenne à ce moment-là sur la scène européenne. Pour son dernier match, le capitaine au brassard tigré avait alors pris le micro pour s’adresser au public avant de fondre en larmes. Même si tout Marseille était heureux de voir Di Meco le calmer en finale de Coupe des clubs champions un an plus tard, sur le coup, personne n’avait rien trouvé à y redire. C’était quand même le grand Milan qui tapait à la porte. Pour Mathieu Valbuena, c’est loin de passer aussi bien. Certes, le milieu offensif, qui a aussi bouclé sa huitième saison olympienne en mai dernier, n’a pas marqué le club comme Papin, il n’a pas fini 5 fois meilleur buteur de Ligue 1, n’a pas remporté 5 championnats. Mais quand même. Le voir partir pour le Dynamo Moscou, ça pique. Le fan phocéen a du mal à l’accepter. Avec sa Coupe du monde, n’y avait-il pas de place pour lui dans un très grand club européen ? La réponse est non, et ce, pour plusieurs raisons.
30 ans dans deux mois
Tout d’abord les conditions de son transfert. En Europe, un club qui n’a pas le loisir de cocher l’option « argent illimité » comme Paris ou Manchester City n’accepte de faire un effort que sur un domaine : le salaire ou l’indemnité de transfert. Et à choisir, on préfère même la seconde option. Les deux derniers joueurs qui ont quitté l’OM pour une grosse écurie européenne sont Taïwo au Milan AC, libre de tout contrat, et Azpilicueta à Chelsea, où il est un des plus petits salaires de l’effectif. Avec Valbuena, il faut verser 7 millions d’euros au club marseillais mais aussi assurer niveau salaire, avec un élément qui touche plus de 300 000 euros chaque mois. Tout le contraire d’un Thauvin par exemple, acheté 15 millions certes, mais le joueur signe derrière pour un salaire raisonnable, et sera plus facilement vendable quelques années plus tard, le temps de n’être augmenté qu’une ou deux fois. Là où Valbuena a 30 ans dans deux mois, donc il ne faut pas compter sur une grosse revente derrière.
Pour Yvan Le Mée, si Valbuena a accepté le challenge du Dynamo, c’est peut-être parce qu’il a lui aussi intégré ce paramètre de l’âge : « Si tu ne fais pas un gros contrat après cette Coupe du monde, tu ne le feras jamais. Après, il y a une pression économique aujourd’hui qui fait qu’en Russie, tu sais que tu seras payé. Ce ne sera pas le cas en Espagne » . L’agent d’Alessandrini ne voit pas forcément le fait de signer en Russie comme une honte, comme il l’a déclaré sur Le Phocéen : « Avec la Coupe du monde 2018 qui se profile, ils ont resserré les quotas d’étrangers, ce qui va faire monter les apports en qualité. Pour preuve, ils ont aussi fait Garay, que toute l’Europe voulait » . Niveau grands championnats, Valbuena avait des touches avec la Fiorentina, le FC Séville et les Queens Park Rangers. Mais il fallait attendre que le marché se décante. Un risque qu’il n’a pas voulu prendre. « On ne pensait pas qu’il partirait à Moscou, plutôt à Séville, mais c’est son choix » , explique Mario Lemina. « C’est le mercato, on ne maîtrise pas » , philosophe Brice Samba. C’est d’autant plus vrai quand il s’agit de Valbuena.
La commission de Jean-Pierre Bernès
Car au-delà du paramètre financier, au-delà de sa taille (1,63m et non 1,67m comme le martèle une presse bienveillante à son égard), Valbuena paie peut-être aussi son récent changement d’agent. Avec son conseiller historique, il a obtenu plusieurs prolongations à l’OM, avec grosses réévaluations salariales. La dernière, à l’hiver 2013, aurait pu interpeller alors que le club était censé être dans une politique d’économie et que le joueur était encore sous contrat jusqu’en 2015. Ces derniers mois, le principal intéressé a détruit le rêve de ceux qui voulaient le voir faire sa carrière au club en missionnant Jean-Pierre Bernès de lui trouver un nouveau point de chute. Dans ce petit monde où tout le monde se connaît, voir l’homme de confiance de Deschamps empocher la juteuse commission ne plaît guère. Valbuena le sait et préfère donc saisir l’opportunité russe tant qu’elle est là. Moscou sera toujours plus chaud que ses relations avec certains éléments du groupe de Bielsa.
Par Romain Canuti, à Marseille