- Ligue 1
- J10
- Lens-Reims (4-4)
Il était un dimanche de folie à Bollaert
Cinq buts dans le dernier quart d’heure, un penalty refusé au bout des arrêts de jeu, des renversements de situation en veux-tu en voilà, ce Lens-Reims parti pour être une vulgaire affiche de milieu de tableau a tourné au feu d'artifice. À l'issue de la foire, même David Guion, le coach rémois, qui menait encore 4-2 à cinq minutes de la fin, a apprécié.
Et avec un stade plein, ça aurait donné quoi ? Les rares privilégiés qui ont pu assister à ce Lens-Reims placé au milieu d’un banal dimanche d’automne, joué sous un ciel gris et avec un vent frais, se sont tous posé la même question et auront des choses à raconter demain matin à la machine à café. Idem pour les supporters cloisonnés dans leur salon, qui ont certainement réveillé un voisin en pleine sieste lorsque Florian Sotoca a égalisé pour le Racing au bout des arrêts de jeu. On exagère ? Presque pas. Demandez donc au coach lensois, Franck Haise, tourmenté ces dernières semaines par l’épidémie de Covid-19 qui a touché son club (onze cas dans le groupe, huit dans le staff) et qui est sorti rincé de la rencontre. « Le scénario est fou, a avoué l’entraîneur artésien, quelques minutes après le coup de sifflet final. Avec peu de recul, c’est difficile d’analyser. Nous avons fait une bonne première mi-temps où l’on mène logiquement, mais ensuite, on a payé nos erreurs de concentration défensives. » C’est peu de le dire. Avant la pause, inutile d’être savant pour considérer que le RC Lens maîtrisait les débats. Simon Banza s’était payé le luxe d’ouvrir son compteur but en Ligue 1 d’une tête sur corner et Gaël Kakuta, après avoir enrhumé trois Rémois, aurait pu breaker. Au contraire : après l’entracte, le Stade de Reims a coulé son hôte du jour, Cafaro a fait une première fois boire la tasse à la défense lensoise, puis Boulaye Dia a profité d’une bourde de Jean-Louis Leca pour doubler la mise. La suite ? Un bouquet final, des Rémois qui prennent le large grâce à un but contre son camp de Medina et à un numéro d’équilibriste de Dia, la folie qui s’empare d’un stade vide…
Sotoca, la tête au carré
Au terme d’une rencontre déconseillée aux cardiaques, Reims croyait s’envoler vers un troisième succès de rang. David Guion ne dit pas autre chose : « Mener avec deux buts d’avance à l’extérieur, à dix minutes de la fin, on doit s’imposer. » Mais il était écrit que ce Lens-Reims rentrerait dans la boîte à archives des folies de Bollaert. Franck Haise a alors joué son va-tout (cinq changements), et Lens n’a rien lâché. Florian Sotoca est sorti du bois et est allé claquer deux têtes imparables en l’espace d’une minute, dont la seconde validée par la goal-line technology.
Bollaert – enfin, le banc lensois – a vrillé dans la folie. Ce roublard de Sotoca croyait même arracher un penalty à la 95e sur une supposée main d’Abdelhamid lors d’un contact, mais après consultation de la VAR, l’homme en noir revenait sur sa décision et décidait de mettre fin au spectacle. Le palpitant du milieu lensois Tony Mauricio avait déjà assez souffert comme ça ! « Je n’ai pas le souvenir d’avoir vécu ça durant ma carrière. Cette fin de match était pleine de rebondissements. Je pense qu’on aurait même pu l’emporter, mais on ne va pas cracher sur cette fin de match. On a eu une bonne réaction. Après, j’avoue qu’avec le public, le penalty aurait peut-être été sifflé. »
« Si on avait gagné, ça aurait été totalement fou »
Franck Haise, lui, savoure déjà ce point venu de nulle part et surtout pas du fond d’un banc dans lequel il n’était pas assis, même à 4-2. « Si je n’y avais pas cru, je serais resté au fond de mon siège, là ce n’était pas le cas. Après, j’avoue que c’était peu probable de remonter ces deux buts. Et si on avait gagné, ça aurait été totalement fou. Enfin, prendre un point en étant dans cette posture à la 89e, il n’y a pas de quoi faire la fine bouche. » Pas de fine bouche chez les Lensois, mais une belle bouchée d’amertume chez les Rémois. « C’est une question d’état d’esprit, estime David Guion. Nous aurions dû bien mieux gérer cette fin de match. Je n’ai pas senti de relâchement, mais un manque d’agressivité. Dès que ça centrait il y avait danger. Et quand je vois l’arbitre aller voir la VAR, on est dans une telle excitation, mais on ne maîtrise rien. Heureusement, il n’y a pas eu penalty. C’était assez exceptionnel comme scénario, je ne m’étais jamais fait remonter deux buts comme ça à la 90e et 91e. J’espère que les joueurs vont retenir cette leçon, c’est le plus important pour l’avenir. » La leçon de spectacle, ils ne sont pas près de l’oublier.
Par Florent Caffery, au cirque de Bollaert