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Il était 19h47 à Dortmund…
Ce match, c'était la fête du football offensif dans le volcan du BvB. Et puis tout s’est arrêté dans le silence d’un stade qui se vide...
L’excitation était générale. Rouge et blanc ou jaune et noir, tout le monde était content d’être là pour un quart de finale de Ligue des champions entre deux équipes qui devaient envoyer du jeu dans l’une des enceintes les plus bruyantes d’Europe. C’était l’avant-match. La sono crachait de la mauvaise pop allemande, un mix suspect entre Bon Jovi et Depeche Mode. Le stade se remplissait petit à petit. On se mettait tranquillement en place quand le forfait de Benjamin Mendy est tombé. Officiel. Andrea Raggi, le pirate, allait débuter face à Ousmane Dembélé. On en rigolait d’avance. Sur la pelouse, les intendants de l’ASM commençaient à disposer les cônes pour l’échauffement du club de la Principauté. Tout allait bien. Tout était normal. On a commencé à surfer sur les réseaux sociaux.
Entre deux tweets sur la composition de l’ASM, on est tombé sur un gazouillis de la police de Dortmund qui parlait d’une explosion du bus du BvB sur le chemin du stade. On a compris qu’il s’agissait d’un truc sérieux. Le Bild a confirmé la chose, tout comme le site du BvB dans la foulée. Il était 19h47 et trois engins explosifs avaient visé le bus du Borussia une demi-heure plus tôt. Ce qui n’était plus une rumeur s’est propagé à vitesse grand V sur la toile comme sur les écrans géants du stade.
Une enceinte où les gens continuaient à entrer. Comme si de rien n’était. À ce moment-là, les joueurs de l’ASM sont dans leur vestiaire. Ils n’en sont finalement jamais sortis… Dans le parcage monégasque, où 3000 supporters ont fait le déplacement, les téléphones commencent à sonner. La nouvelle a franchi les frontières et tout le monde se pose des questions. Certains se rappellent le 13 novembre au Stade de France. Entre parano, mauvaises informations et rigolade règne une atmosphère très étrange. Le speaker du stade annonce la chose. En VO puis en VF.
En tribune de presse, les informations arrivent au compte-gouttes également. Un joueur de Dortmund serait touché et à l’hôpital. On apprend vite qu’il s’agit de Marc Bartra, le défenseur espagnol qui devait commencer le match. Il est 20h13, aucune des deux équipes ne s’échauffent sur la pelouse. Personne ne sait rien, tout le monde a un avis et, surtout, personne n’a le temps de vérifier quoi que ce soit. À 20h30, le couperet tombe. Le match est remis au lendemain, à 18h45. Les autorités allemandes et les deux clubs ont parfaitement géré le flottement. Aucun mouvement de panique. Rien. Tout semble sous contrôle. Comme si l’extraordinaire était devenu banal. Aussitôt l’annonce du report officiel diffusée, le parcage monégasque lance un chant sifflé par le stade. Dans la foulée, les Monégasques fendent l’air avec des « Dortmund, Dortmund, Dortmund ! » Le Signal Iduna Park applaudit. Scène incroyable. Même si certains Monégasques, sauvés par un hashtag, partageront le gîte et le couvert avec ceux d’en face, pour beaucoup, le déplacement va laisser un goût amer.
À 21h45, le stade de Dortmund est vide. Seule l’équipe monégasque s’entraîne sur la pelouse, comme une veille de match classique. Le tout sous les regards des journalistes qui meublent comme ils peuvent en direct de leur pupitre. Plus bas, sur la pelouse, des rires s’élèvent. Mbappé vient de marquer un but, Mendy gambade, les joueurs sont dans une bulle. Lunaire. Ceux de Dortmund, eux, sont rentrés chez eux (se) rassurer (auprès de) leurs familles. Demain, c’est loin.
Par Mathieu Faure, au Signal Iduna Park