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Ibra, arme ou boulet ?
Après de longs mois d'absence pour cause de blessure, Zlatan Ibrahimović est de retour. Mais si l'avant-centre devrait faire du bien à l’attaque de Manchester United, en course dans quatre compétitions, son ego pourrait aussi devenir une gêne pour son club. Et pour Romelu Lukaku, qui a encore besoin d’espace pour s’épanouir.
Avec lui, le débat a toujours existé. Que ce soit à Paris, Milan, Turin ou même Amsterdam, la question s’est posée : quoi que ses pieds puissent offrir, le mètre 95 de Zlatan Ibrahimović prend-il trop de place ? L’appétit de l’ogre jamais rassasié est-il trop gros ? Son tempérament de vainqueur fusionné à son ego surdimensionné ne constituerait-il pas la propre limite de son équipe ? En vérité, aucune réponse n’a jamais totalement fait consensus. Et tant mieux : un homme n’est jamais aussi passionnant que lorsqu’il garde avec lui son mystère. Mais dans le cas actuel, la donne est différente. Car le contexte et les interrogations sont eux aussi différents.
Meilleur ennemi de Lukaku
Blessé depuis le 21 avril dernier, date de sa rupture des ligaments croisés, Ibrahimović n’avait jamais connu une période d’absence aussi longue. Si avant ce pépin physique, son statut à Manchester United ne différait pas de ses précédentes expériences – il était le joueur le plus décisif et l’un des cadres indispensables de son équipe –, les choses ont désormais changé. Sans le géant suédois, MU a continué d’exister et a dû réinventer sa pointe offensive. Ainsi, les Red Devils n’ont pas hésité à balancer 85 millions d’euros pour faire venir Romelu Lukaku en provenance d’Everton. Adoré par José Mourinho, qui le défend corps et âme dès qu’il en a l’occasion, le Belge affiche un rendement (11 buts en 18 titularisations toutes compétitions confondues) qui satisfait pleinement son entraîneur. Dans l’esprit de ce dernier, l’ancien buteur des Toffees constitue donc le choix numéro un en attaque. Pour aujourd’hui et pour demain. Alors, Ibra, de nouveau disponible, ne serait plus destiné qu’à faire souffler le titulaire désigné ?
Dans le cas de figure actuel, deux réalités se combattent. D’abord, Lukaku ne constitue pas un produit fini et n’a pas achevé sa mue. S’il peut bien entendu s’imprégner et apprendre du talent et de l’expérience d’Ibrahimović, Romelu a encore besoin d’espace et de confiance pour devenir l’immense avant-centre qu’il aspire à être. Pour cela, il doit continuer à porter l’attaque de Manchester et à adhérer à la pression que sa mission lui impose. En clair, il a besoin de rester le numéro un, sans être gêné par les chevilles imposantes de Zlatan. Ensuite, l’ancien du Paris Saint-Germain ne se contentera jamais, de son côté, d’un rôle de faire-valoir ou de bouche-trou. Si son âge (36 piges depuis octobre) mêlé à ses indiscutables qualités de buteur, pourrait faire de lui un remplaçant de luxe super utile, le principal intéressé se nourrit de lumière pour briller. Aucune chance, donc, de le voir commencer tous les gros rendez-vous sur le banc et s’épanouir lors des coupes nationales. Ou bien l’aventure tournera court, comme à Barcelone.
Une cohabitation de poids ?
Certes, le Special One, capable de convaincre n’importe quel joueur qu’un doigt dans l’œil est en fait une caresse, demeure un formidable gestionnaire d’hommes. Et la situation qui se présente est loin de lui faire peur. Elle l’arrange même, puisqu’il a récemment estimé qu’avec le retour d’Ibrahimović, qui lui a « manqué » , « ça sera une autre histoire » . Reste qu’entre la frustration de son Suédois et le développement de son Lukaku, le Portugais va devoir faire un choix. À moins que le technicien chamboule ses plans et aligne les deux marmules en même temps. « Les bons joueurs peuvent jouer ensemble » , a d’ailleurs indiqué Mourinho en conférence de presse. Avant de s’arrêter sur le cas Ibra sur le site internet de United : « Ibrahimović peut jouer n’importe où sur un terrain et cette saison, nous avons joué plusieurs fois avec deux attaquants. Je pourrais jouer avec Zlatan et Romelu. Ou avec Zlatan tout seul. Ou avec Romelu tout seul. Ou avec aucun des deux. »
Comme souvent, il y a à boire et à manger dans les propos de José. Peut-on imaginer un 3-5-2 avec les deux colosses associés en attaque ? Cela semble plus vraisemblable qu’un Lukaku qui délocaliserait sur un côté, ou qu’un Ibra qui prendrait le poste de meneur de jeu dans le 4-2-3-1 cher au Mou. Problème : leurs profils puissants et aériens se ressemblent sans doute un peu trop au goût du coach portugais (qui préfère sûrement des options plus défensives). Dont les décisions feront peut-être un malheureux. Pas la peine, en tout cas, de compter sur Ibra pour lui rendre la tâche facile.
Par Florian Cadu