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Holmesdale Fanatics, les ultras de Crystal Palace
Impossible d'évoquer Crystal Palace sans convoquer les Holmesdale Fanatics. En une quinzaine d'années, l'unique groupe ultra de Premier League est devenu une marque de fabrique aux pays du fish and chips. Tifos, bâches, tambours, les gars du sud de Londres ont fait de leur antre la nouvelle hype du groundhopping. Ils seront 38 000 dont plusieurs centaines de Fanactics aujourd'hui à Wembley pour croire à une finale de FA Cup. Même si les hommes de Thomas Tuchel en ont déjà vu d'autres, gare à la déferlante venue de Palace.
Des feux d’artifice autour d’un stade, en plein match, c’est du déjà-vu dans l’Hexagone ou la botte italienne. Mais lorsque les images déboulent sur les réseaux sociaux depuis le district de Croydon, au sud de Londres, ça tranche avec l’air ambiant. En ce 12 décembre 2021, les Holmesdale Fanatics gueulent à qui veut bien l’entendre à travers le royaume que leur quinzième anniversaire ne sera pas le dernier. Bâches, tifo, drapeaux, l’unique groupe ultra de Premier League – même si à Leicester les Union FS font aussi parler d’eux dans une moindre mesure – envoie de la vocalise à gogo. Everton est dans les cordes (3-1) et Rob, quinquagénaire et opérateur ferroviaire sur la Jubilee Line, peut scalper sa pinte. « Ce qui nous distingue des autres, malgré notre stade à l’ancienne et moins développé, c’est justement cette atmosphère. Les mecs de Manchester, de Tottenham, d’Arsenal et même de Liverpool ne peuvent que rêver. Dans la Holmesdale stand, on est debout tout le match. »
Un père ingénieur en structure qui a ferraillé sous les armatures métalliques de la Arthur Wait stand, une première à Selhurst Park à 3 piges en 1974, Rob savoure ce qu’est devenu son stade. « J’ai été élevé dans des tribunes debout, j’ai toujours senti que ça avait un impact direct sur l’ambiance et sur les joueurs. Tu as toujours plus envie de gueuler et d’encourager dans ces conditions. Les ultras ont rétabli ça. »
Antonio, expatrié italien, n’a pas eu à se farcir certaines enceintes aseptisées devenues des pompes à fric pour ensuite choisir Crystal Palace, le jeune homme parle sans hésiter d’un « coup de foudre » . : « La première fois dans ce stade, vous êtes choqué et frappé par la chaleur et la passion. Les Holmesdale Fanatics sont clairement organisés comme un groupe ultra et chantent tout le match, ce qui est très rare en Angleterre. Beaucoup de mes potes qui viennent, lorsqu’ils arrivent à trouver des places car c’est de plus en plus compliqué, regardent davantage les tribunes que le match. C’est poétique, il y a une véritable âme de Londonien du sud » .
London calling
Aux origines des Fanatics, six bonhommes, férus de Palace depuis 1980, habitués à vadrouiller en Europe à la fin des années 1990, autant pour bronzer que pour s’imprégner des curva italiennes que des virages du Parc des Princes. Sevrés de terraces depuis le drame d’Hillsborough, les stades britanniques commencent à ronronner, les heures sombres du hooliganisme sont encore à l’horizon et Crystal Palace « vit une période difficile, abonde Rob. Dans les années 1980 il n’y avait pas plus de 5 000 personnes au stade et il a fallu du temps pour que ça redevienne correct. Les Holmesdale Fanatics ont tout chamboulé. » En 2005, les Ultras HF voient le jour et se parquent dans le bloc B de la Holmesdale stand derrière les buts et le long de cette artère à briques rouges longeant l’enceinte. Mais les débuts sont un brin chaotique. Rapidement dans le viseur des autorités, les boys de Palace subissent la répression du « conseil de Croydon qui menaçait de fermer le bloc car nous étions debout, livre le groupe sur son site. Il y a eu des interdictions, des affaires judiciaires et même notre bloc fermé durant plusieurs matchs. » La clique joue des coudes, quelques pralines sont envoyées autour du stade, les riverains n’apprécient pas le grabuge. Mais les ultras gagnent en épaisseur et le groupe finit par imposer sa patte, notamment en 2010 lorsque le club est au bord de la relégation en League One et qu’un ultime déplacement à Sheffield sauve les meubles in extremis.
Mais tout groupe ultra qui se respecte sait aussi se faire entendre. Se fritter avec la direction n’est pas interdit. Fin 2018, les 200 à 300 membres des HF vont au clash. Leur objectif ? Basculer dans la partie centrale de la tribune, le bloc E, pour enflammer davantage Selhurst Park. Steve Parish, le propriétaire et président veut d’abord repositionner les abonnés de cette section avant d’autoriser les ultras à s’y implanter. Certains abonnés résistent, les HF se mettent en veille quatre mois, d’autres groupes les soutiennent comme à Paris et ils finissent par obtenir un accord à l’été 2019. Quand bien même leur vision n’est pas partagée par tous, les Holmesdale Fanatics n’hésitent pas à les poser sur la table et a faire comprendre que désormais, Crystal Palace sans eux, ça a forcément moins d’allure. Rob a vu débouler « une nouvelle génération qui avait envie de faire bouger les choses. La philosophie est simple, on supporte l’équipe peu importe le résultat. Même quand ça va mal, on doit continuer à chanter » . Groundhopper basé en Picardie, Maxime parle d’un « bon compromis entre l’atmosphère traditionnelle anglaise, réactive au jeu et spontanée, et l’animation en tribune avec des chants constants, comme on en a l’habitude chez nous ».
11 000 euros récoltés pour un tifo à Wembley
À Wembley ce dimanche après-midi, c’est peu dire que Crystal Palace survolera les débats en tribune. Six ans après leur dernière finale de coupe – perdue face à Manchester United – les gars de Croydon ont vu les choses en grand. Rendez-vous à Covent Garden, cortège géant et tifo en grande partie financé par les dons de supporters (environ 11 000 euros ont été récoltés), le tout après avoir, il y a quelques jours, flingué la direction du club qui souhaitait faire son propre tifo. Le très court voyage ne sera pas fait à vide, 38 000 fans de Palace sont attendus. « On sera à domicile, je n’ai pas de doute là-dessus, prédit Rob. Et sachant que la journée va commencer à 11h à Covent Garden, ça risque d’être un sacré truc. » Antonio pense « que ce sera comme à Selhurst Park. Les supporters de Chelsea n’arriveront pas à se faire entendre autant que ceux de Palace. Ce n’est pas un hasard si la devise du club c’est South London and Proud (du sud de Londres et fier, NDLR). Leurs supporters ont ça en eux. »
Par Florent Caffery