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HK: «On ne considère pas Ribéry à sa juste valeur sportive»

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HK: «On ne considère pas Ribéry à sa juste valeur sportive»

HK, ancien du Ministère des affaires populaires, revient faire briller le soleil du Nord avec son nouveau groupe Les Déserteurs. Adepte du grand mezze des cultures populaires plutôt que des cantines rivales, il a forcément son avis sur la question du ballon rond, sorte d'épice universelle. Au menu : buts en or de quartier, Canto, LOSC, Ribéry, racisme et appel du pied aux Chtis de l'EDF...

Quels sont tes premiers souvenirs de foot ?J’ai joué en club un bon nombre de saisons, mais mes premiers souvenirs de foot remontent surtout à nos parties interminables, derrière chez moi, sur notre terrain en schiste rouge au milieu des appartements. Suivant que l’on était un jour de semaine ou en week-end, le nombre de joueurs pouvait fluctuer entre quatre-cinq et trente-quarante. Avec un pic pendant les vacances scolaires où on pouvait flirter avec les cinquante. Des matchs de football improbables qui pouvaient se solder par des scores de trente-neuf à vingt-sept… À la mi-temps ! J’exagère peut-être, mais honnêtement, à peine. Je me souviens de ces matchs écourtés la nuit tombant, pour cause de « non-visibilité du ballon » . Il est vrai que le square en schiste, au milieu des tours, n’était pas très bien éclairé. Mais comme les lois du sport sont implacables, et qu’il faut toujours un vaincu, on réglait ça souvent à « celui qui marque a gagné » ; précurseur du fameux « but en or » . C’était le règne de la mauvaise foi et des mauvais perdants ; et pour ne rien arranger, il n’y avait pas d’arbitres. Alors, l’histoire même du « but en or » pouvait durer plus d’une heure : entre les buts « qui ne comptent pas » , les fautes imaginaires, les buts trop grands, les « j’étais pas prêt » , etc. Et, après le coup de sifflet final, on refaisait le match : du côté des vainqueurs, ça chambrait sévère, et pas toujours avec des mots figurant dans le Petit Robert. Du coup, il arrivait souvent que des compétitions improvisées de « catch-boxe thaï » prennent le relais du football. Et on se retrouvait le lendemain, plein de bleus et de coquards, mais toujours bons amis ! Et, surtout, bien décidés à « remettre ça » !

Quand tu étais gamin, quels étaient tes idoles ? Il y a d’abord eu Waddle, gaucher magique, génial. Je me souviens de ce quart de finale de Coupe d’Europe des clubs champions, contre le Milan AC où, suite à un coup sur la tête, il avait perdu connaissance un instant, puis était revenu sur le terrain, avec un bandeau je crois, sortant des gestes techniques et des dribbles littéralement venus d’ailleurs : passement de jambe, roulette, petit pont… Il régalait contre le grand Milan de l’époque ! Et puis, il y a eu aussi Canto ! Le charisme du bad boy, la technique aussi, l’allure : torse bombé, col relevé… Et puis son histoire d’amour avec le championnat anglais : à Leeds d’abord, avec son célèbre « I don’t know why I love you, but I love you » . Puis à Manchester, au point de devenir me semble-t-il le joueur du siècle du club. Chez nous à Lille, tu avais Abedi Pelé, qui nous régalait chaque week-end avant de partir à Marseille. Je me souviens d’ailleurs d’un jour au stade Grimonprez-Jooris, Abedi jouait alors pour Marseille, il avait marqué ce soir-là contre Lille et tout le stade s’est pourtant levé et l’a acclamé. C’était dingue.

Le LOSC a souvent l’image d’un club moins prolo que Lens, tu partages cette vision ?Oui, à l’époque, quand ados, on allait au stade, on avait l’habitude de quitter le stade le plus vite possible après le coup de sifflet final pour éviter de se retrouver au milieu des Skins. Ils étaient très présent et très influents autour du club. Ça a bien changé depuis, heureusement. En parlant de Lens, un jour à Grimonprez, comme on prenait les places les moins chères, en seconde, on s’était retrouvés au milieu de la tribune dévolue aux supporters du RCL. Au début, on en menait pas large, mais au final, c’est la plus belle soirée qu’on ait passé en tribune ! C’est vrai que le public lensois est juste unique ! Et en plus, à cette époque, leur équipe avait d’excellents résultats. À vrai dire, j’ai toujours été autant supporter de Lens que de Lille. Je trouve dommage et même stupide d’opposer ces deux clubs.

Le grand stade a été nommé Pierre-Mauroy, tu aurais peut-être préféré un autre nom ?Les décideurs ont certainement voulu lui rendre hommage. Il a été un personnage lillois « important » , mais franchement ça n’a pas grand sens : il n’était pas spécialement fan de foot, ni même un défenseur acharné de ce projet de grand stade… Ils auraient pu lui rendre hommage autrement et donner un autre nom à ce stade… Mais, bon voilà.

Quels sont les joueurs qui incarnent le mieux l’esprit populaire du Nord ? Franchement, Ribéry, c’est un footballeur extra-ordinaire !!! Ça m’énerve qu’on ne le considère pas en France à sa juste valeur sportive. Les gens aiment bien se moquer de lui, de sa façon de s’exprimer, mais à la base, c’est juste un ptit gars d’Boulogne, un enfant d’là-haut, pas un mec de la haute ! Il s’en est sorti dans la vie grâce au foot, tu sens qu’il a ça dans le sang : le ballon, le terrain vert, le dribble. Il joue à l’instinct, à l’énergie, tu sens qu’il a gardé cette flamme du gosse de quartier qui joue avec ses potes. Après, je sais pas si vous avez remarqué, mais aujourd’hui en équipe de France, nous avons une belle brochette de Nordistes : Debuchy, Ribéry donc, Cabaye le Tourquennois, Varane qui a joué à Hellemmes quand il était gosse ( moi aussi, d’ailleurs), peut-être même Mavuba s’il se retrouve sélectionné. C’est pas mal quand même !

Le foot est aussi le lieu ou s’exprime le racisme, notamment dans les tribunes, tu le ressens, en particulier dans une région où le FN pèse si lourd ?Perso, si j’étais joueur de foot, et que mon coéquipier un jour se faisait ainsi insulter, j’arrêterais de jouer immédiatement et j’inciterais les autres à réagir de même. On a trop toléré ça. Le sport, collectif en plus, c’est justement l’exact opposé de ça. Je trouve que les joueurs baissent facilement la tête, laissent couler, ou font semblant de rien… Les entraîneurs, les dirigeants, pareil ! Ils se cachent derrière des excuses faciles pour expliquer qu’ils ne peuvent rien faire ou qu’il ne faut pas donner d’importance à ces insultes. Pour être honnête, face au fléau du racisme, on laisse souvent le joueur, souvent le joueur noir, seul : l’esprit collectif, solidaire, dans ce cas-là, n’existe absolument plus.

Le foot est-il en train de perdre son âme populaire avec l’arrivée des Qataris ou de milliardaires russes ?C’est pas le fait qu’ils soient russes, qataris ou américains, le problème, c’est la place prise par le fric et le business dans le sport et dans le foot en particulier… J’aime toujours le foot, mais c’est vrai que je ne supporte absolument pas ses excès et ses outrances « financières » . Ce n’est pas ça, le foot ! Le football, c’est avant tout une passion, et comme toutes les passions, elle peut très vite être salie par le fric. Attention, les footballeurs n’y sont pour rien, ils sont en bout de chaîne, ils prennent ce qu’on leur donne, et je ne vois pas pourquoi ils s’en priveraient. Mais quand ils étaient gamins, ils ne rêvaient pas de devenir riche, de rouler en ferrari, etc. Ils voulaient jouer au foot, c’est tout ! Marquer des buts, vibrer avec tous leurs potes sur le terrain, avec le public aussi, un trophée, une coupe… Le foot peut exister sans tout cet argent et cette démesure indécente. Je fais le parallèle avec la musique : je suis ce qu’on peut appeler un smicard de la musique, mais franchement je n’échangerais ma place contre aucune autre, parce que je fais ce que j’aime, je vis de ma passion, et ça n’a aucun prix. Pour moi, c’est évident, le sport devrait être protégé de tous ces excès.

Face au fléau du racisme, on laisse souvent le joueur, souvent le joueur noir, seul.

Appréhendes-tu le match Algérie-Belgique lors de la Coupe du monde ? Je suis franco-algérien, donc forcément, pendant cette Coupe du monde, je serai un grand supporter de l’équipe d’Algérie ! Mais, pour être honnête, étant un Ch’ti de naissance, ayant grandi tout près la frontière franco-belge, je suis aussi un peu belge dans le cœur, c’est vrai. Et puis, la Belgique, cette année, quelle équipe ! Bref, pour des raisons différentes, il s’agit de deux de mes équipes de cœur ; avec la France aussi bien sûr, et les incontournables Argentine et Brésil. Oui, j’ai plusieurs équipe de cœur, que voulez-vous, je suis avant tout un citoyen du monde ! En tout cas, j’espère que ce sera un beau match, disputé dans un bon esprit. Il n’y a pas de raison. Je me souviens de Zidane avant un France-Algérie, qui avait d’ailleurs malheureusement dégénéré. Zizou disait : « Bon, si ce soir, on fait match nul, ce serait pas mal. » C’est sûr que pour ce Algérie-Belgique, un match nul, ce serait pas mal, mais le sport appelle la compétition… Non, franchement, que l’esprit soit bon sur le terrain et dans les tribunes, que le meilleur gagne, et que tout le monde se serre la main à la fin du match. Ce n’est que du foot, c’est un jeu avant tout.

Tu reprends le répertoire de la chanson française à la mode chaabi, tu n’as jamais pensé à faire de même avec les chants de supporters ?En fait, c’est là que je te donne un scoop : j’ai écrit la chanson officielle de l’équipe de France pour la prochaine Coupe du monde ! C’est une chanson de mon groupe HK et les Saltimbanks et qui s’appelle C’est pas fini ( extraite de l’album Les temps modernes). Le refrain sonne comme un slogan, un leitmotiv : « C’est pas fini, pas fini, ça ne fait que commencer. » Bon le truc, c’est que pour l’instant, personne n’est au courant, mais j’espère bien qu’un des joueurs (un Ch’ti de préférence, s’il vous plaît) lira cette interview, ira écouter cette chanson et se dira : « Mais oui ! Bordel de m… C’est cette chanson qu’il nous faut ! » Et là, tope-là boom.

Tu as repris l’affiche rouge dans ton dernier album, connais-tu Rino Della Negra ?Oui (après m’être renseigné, j’avoue) : c’était un footballeur de grand talent, qui jouait pour le Red Star dans les années 40. Né dans le Pas-de-Calais, vers chez nous là-haut, fils d’immigrés italiens, il est parti très jeune travailler comme ouvrier en région parisienne. À 18 ans, le voilà donc ouvrier la semaine et footballeur le week-end. Et dans ce contexte de guerre et d’occupation, alors qu’il était promis à une grande carrière, il est réquisitionné, sous l’occupation, pour le service de travail obligatoire en Allemagne. Il refuse et rejoint la résistance. Il est un de ces 23 résistants du groupe Manouchian. Ce groupe de résistants composé de travailleurs immigrés. Ils ont été arrêtés, puis exécutés le 21 janvier 1944. Les derniers mots qu’il écrit à son petit frère avant son exécution : « Petit frère, je veux t’envoyer un dernier mot pour que tu réconfortes de ton mieux maman et papa. (…) Embrasse bien fort tous ceux que je connaissais. (…) Envoie le bonjour et l’adieu à tout le Red Star. (…) Rino »

HK présente les Déserteurs (Blue Lines Production)
Concerts : 29 mars à la Condition publique à Roubaix, le 2 avril au Cabaret Sauvage à Paris (75019)

L'OM passe au révélateur avec fracas

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