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Hervé Renard : « Mon premier souvenir des JO, c’est Guy Drut en 1976 »
Hervé Renard, le sélectionneur de l’équipe de France féminines, va participer pour la première fois de sa vie aux Jeux olympiques. Le Savoyard, qui s’intéresse à d’autres sports que le football, a suivi les éditions précédentes avec un mélange de curiosité et d’excitation. Au cœur d’un agenda surchargé, il a trouvé quelques minutes pour évoquer cet évènement.
Aviez-vous un jour imaginé participer aux Jeux olympiques ?
Sincèrement, non. Je n’y avais jamais pensé. Cette opportunité est intervenue lors de ma nomination au poste de sélectionneur de l’équipe de France féminine. Quand j’étais en poste dans d’autres pays, comme la Zambie, l’Angola, la Côte d’Ivoire, le Maroc et l’Arabie saoudite, je n’étais pas en charge des olympiques. La question ne se posait donc pas.
Votre équipe disputera ses matchs du premier tour à Décines contre la Colombie et la Nouvelle-Zélande les 25 et 31 juillet, et à Saint-Étienne contre le Canada le 28 juillet. La cérémonie d’ouverture se fera sans vous…
Le tournoi de football débute plus tôt, comme d’habitude. C’est vrai que nous serons à plus de 500 kilomètres de Paris, donc assez loin de l’ambiance des Jeux. Nous ne verrons pas le village olympique lors du premier tour, nous ne participerons pas à la cérémonie d’ouverture. Nous aurions bien aimé, mais c’est comme ça… Si nous voulons voir le village olympique et Paris, ce sera lors de la finale (au Parc des Princes, le 10 août). Au premier tour, nous allons affronter trois bonnes équipes, dont le Canada, qui est champion olympique en titre, la Colombie et la Nouvelle-Zélande, deux sélections qui progressent beaucoup. Ce sera difficile, mais si nous voulons aller au bout, nous devrons être à notre meilleur niveau.
Avant de débuter face à la Colombie, votre équipe aura joué deux matchs qualificatifs pour l’Euro 2025 (contre la Suède à Dijon et l’Irlande à Cork). Est-ce que cela vous semble incongru de disputer des matchs officiels avant une grande compétition ?
Disons que si nous avions eu le choix, nous aurions préféré ne jouer que des matchs amicaux, où il n’y a pas la pression du résultat, où on peut faire des essais. Mais vous savez, on ne nous demande pas notre avis, à nous les sportifs. Les choses ont été décidées ainsi, l’Espagne et l’Allemagne sont dans le même cas que nous, il faut faire avec.
À quelle occasion avez-vous commencé à vous intéresser aux Jeux olympiques ?
En 1976, à Montréal, au Canada. J’avais presque 8 ans, donc autant vous dire qu’avec le décalage horaire, je ne pouvais pas voir grand-chose en direct. Et à l’époque, les JO n’étaient pas aussi bien couverts qu’aujourd’hui, où on peut tout voir ou presque. 1976, c’est loin, mais une chose m’avait marqué, car les gens en parlaient beaucoup, la télé et la radio aussi : la médaille d’or de Guy Drut au 110 m haies. Je n’avais pas vu la course en direct, seulement un peu plus tard, mais ce fut mon premier grand souvenir.
Et le deuxième ?
À Los Angeles, en 1984. Autant je n’ai plus vraiment de souvenirs de ceux de Moscou en 1980, qui avaient été boycottés par plusieurs pays, pour des raisons politiques après l’invasion de l’Afghanistan par l’URSS, autant je me rappelle vraiment ceux à Los Angeles. Là aussi, des pays avaient refusé d’y participer, dont l’URSS. Celui qui m’avait sans doute le plus impressionné, c’est l’Américain Carl Lewis. Je pense que c’est un des plus grands athlètes de l’histoire du sport. Lewis, c’est dix médailles en quatre olympiades ! À Los Angeles, il remporte quatre médailles d’or (100 m, 200 m, 4×100 m et saut en longueur) ! Il était incroyablement rapide, il savait tout faire. Sinon, j’avais suivi de près le concours de saut à la perche avec Pierre Quinon (or) et Thierry Vigneron (bronze).
Cette année-là, la sélection olympique de football avait également remporté la médaille d’or…
Oui, cela fait aussi partie de mes souvenirs les plus marquants. Ce n’était pas évident de suivre les matchs qui n’étaient pas tous retransmis. Et il y avait un important décalage horaire. La France avait notamment battu la Yougoslavie (4-2) en demi-finales et le Brésil (2-0) en finale, dans un stade rempli. Et un peu plus tard, j’avais joué à l’AS Cannes avec Guy Lacombe, qui était un des membres de cette équipe olympique. William Ayache aussi m’en avait parlé. Pour tous les deux, c’était un titre à part, inoubliable, parce que les JO, ce n’est pas un évènement comme tous les autres. Et les Français n’étaient pas favoris à l’époque.
Éprouvez-vous un intérêt plus prononcé pour certains sports ?
Oui. À part évidemment le football, Il y a des sports que je suis de manière plus ou moins soutenue, même hors JO, notamment le basket, le volley et le handball, lequel nous a donné beaucoup de médailles. J’ai aussi tendance à suivre beaucoup l’athlétisme. J’adore le 100 m, qui est un des moments forts des JO, mais aussi le relais 4×100 m, les différentes épreuves de saut. L’athlétisme, pour la France, c’est aussi Marie-Josée Pérec, une immense championne. Je suis fasciné par ces athlètes qui remportent autant de médailles (trois pour Pérec, une à Barcelone et deux à Atlanta).
Et les autres ?
Je ne vais pas vous dire que je regarde beaucoup le judo, le canoë-kayak ou le tir à l’arc. Les combats de Teddy Riner, je m’y intéresse surtout lors de Jeux. C’est un peu la même chose avec les performances de Tony Estanguet, je les ai surtout suivies quand il a remporté ses médailles d’or (2000, 2004 et 2012, NDLR). Mais les JO ont cette particularité qu’on peut s’intéresser à des disciplines que l’on ne voit pas souvent à la télé, cela nous permet aussi de découvrir des athlètes qu’on ne connaît pas. On est fier d’entendre l’hymne national, de voir nos sportifs obtenir des médailles. C’est un tout, c’est une ambiance, ça ne dure que deux semaines, ça passe vite, mais il y a des images que vous n’oubliez pas.
Avez-vous prévu, avec vos joueuses, d’organiser une ou plusieurs soirées en commun pour suivre certaines épreuves ?
Pour l’instant, non, mais c’est quelque chose qui va se faire. Les joueuses sont très motivées par cette participation aux JO, beaucoup vont les découvrir, et au-delà de notre équipe, il y a un intérêt pour les autres disciplines, pour les autres athlètes représentant la France et que nous ne connaissons pas tous… On les soutiendra à fond, comme l’équipe de France féminine sera soutenue.
Propos recueillis par Alexis Billebault, à Dijon