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Henrikh Mkhitaryan, la gâchette est de retour
Arrivé à Dortmund en 2013 pour un montant record de 25 millions d'euros, Henrikh Mkhitaryan a longtemps été en difficulté dans la Ruhr. Fort heureusement, depuis l'arrivée de Thomas Tuchel à la tête du club, l'Arménien a retrouvé son football et, plus important encore, le moral.
« Mais qu’ont-ils foutu dans les gourdes d’Henrikh Mkhitaryan cet été ? » Cette question, à peu près tout le monde se l’est posée depuis le début de la saison, tant l’Arménien est méconnaissable depuis quelques semaines déjà. Fini les passes hasardeuses et les face-à-face timides devant le but, bonjour les enchaînements chaloupés et surtout la précision clinique lorsqu’il s’agit de pousser le ballon au fond des filets. Mais au-delà de cette aisance retrouvée sur le terrain, ce qui surprend le plus, c’est la joie de vivre qui émane de Miki. Il célèbre ses buts comme une star, gueule contre ses adversaires, en somme il s’impose. Il ne se gêne plus non plus pour poser en slip avec ses potes après les matchs. Une forme olympique qui soulage tout autant qu’elle fait plaisir, en premier lieu à ses coéquipiers. À chaque nouvelle journée, les joueurs du Borussia se succèdent en zone mixte pour partager leur bonheur, celui d’avoir enfin parmi eux le Miki dont on leur avait tant loué les qualités. « Cela fait plaisir de voir Miki a un tel niveau. C’est un super joueur. Personnellement, je suis fan de lui » , n’a pas hésité à dire Mats Hummels aux journalistes présents après la rencontre du Borussia contre Hoffenheim. Et si cette renaissance fait autant plaisir, c’est tout simplement parce qu’elle était complètement imprévisible au regard de ces deux dernières années.
9th victory in a row! Great team spirit!👍👍👍 pic.twitter.com/nG5kP4srby
— Henrikh Mkhitaryan (@HenrikhMkh) 12 Septembre 2015
Deux ans de solitude
La première saison d’Henrikh Mkhitaryan est loin d’être un échec, mais dans l’ensemble, c’est une déception. Avec 13 buts et 10 passes décisives en 46 rencontres, ses statistiques sont plus que correctes. C’est plutôt sur le plan psychologique que le bât blesse. L’Arménien ne semble pas toujours à l’aise, il perd de nombreux face-à-face, tente peu ou mal. Pire, il semble très souvent au bord de la rupture. Après son tir manqué lors du quart de finale retour de LDC face au Real Madrid, il ne peut retenir ses larmes. L’exercice suivant, son deuxième sous les couleurs du BvB, est, lui, à l’image de l’équipe. Médiocre tout au mieux, pathétique la plupart du temps. Et si lors de la fin de saison, il se réveille un peu, tout indique qu’il ne passera pas l’été. En repensant à ces deux premières années, Henrikh Mkhitaryan n’hésite pas à dire qu’il n’a pas supporté la pression. « Tout le monde ne parlait que du montant que le Borussia avait dépensé pour m’engager. J’ai porté beaucoup d’attention à ce que disait la presse. Je n’arrivais pas à m’en détacher » , confesse-t-il dans une interview pour le site spox.de.
Joueur qui marche à l’affect comme peu d’autres, Mkhitaryan n’a tout simplement pas supporté d’être devenu une star du jour au lendemain. Alors certes, il jouissait déjà d’une petite notoriété de par son impact au Shakhtar Donetsk, mais rien de comparable avec le fait de remplacer Mario Götze au poste de 10 de l’équipe la plus hypée d’Europe à ce moment-là. « Tout le monde me parlait de Mario Götze, alors que nous n’avons rien à voir. Je ne me voyais pas comme son remplaçant lorsque je suis arrivé. En tant que footballeur, tout nous oppose ou presque. » À cela, il faut ajouter un Jürgen Klopp de plus en plus fatigué et de moins en moins concerné. Au final, si tout le monde lui a jeté la pierre, Henrikh Mkhitaryan avait (en y regardant de plus près) presque toutes les raisons d’aller mal.
L’effet Tuchel
Lorsque Thomas Tuchel, débarque en juin au centre d’entraînement du BvB, Henrikh Mkhitaryan semble, lui, sur le départ. Il lui reste deux ans de contrat, et le Borussia doit trouver un moyen de le vendre s’il ne veut pas perdre trop d’argent. En gagner semble même possible si jamais un club anglais décide de faire n’importe quoi. Mais très rapidement, les rumeurs de départ cessent. La raison ? Selon les premiers échos, le nouveau technicien serait en admiration devant l’Arménien et déclarerait à qui veut l’entendre qu’il n’a pas été utilisé à bon escient. Son but semble clair : le garder et le remettre en selle. Par chance, le courant passe très rapidement entre les deux hommes. « La première fois que nous nous sommes parlé, nous avons été très francs, et nous nous sommes tout de suite entendus. De toute façon, j’ai toujours aimé sa façon de jouer et son aura sur le terrain » , révèle Thomas Tuchel quelques jours après le début de l’exercice 2015/2016.
Sans doute revigoré par tant de bonnes ondes, Mkhitaryan bosse plus dur que jamais pour retrouver le niveau qui était le sien en Ukraine. « Miki a travaillé très dur tout l’été et a fait son autocritique. Dès la pré-saison, on pouvait sentir qu’il était dans la meilleure forme physique et mentale » , confie Marcel Schmelzer, autre vainqueur du nouveau système Tuchel, après la victoire du BvB contre Hanovre. L’ancien entraîneur de Mayence l’aide aussi à prendre conscience qu’il n’a pas à tout faire tout seul. En faisant reposer une grande partie de l’organisation tactique sur les épaules de Weigl et Gündoğan, Thomas Tuchel libère l’Arménien et lui permet de voyager un peu plus sur le terrain. Car si sa position est plus axiale que sous l’ère Klopp, Miki passe aussi beaucoup de temps sur le côté gauche où son association avec Schmelzer fait des merveilles. De toute façon, qu’importe où Mkhitaryan joue sur un terrain en ce moment, il est tout bonnement irrésistible. En dix matchs disputés, il a déjà inscrit neuf buts et délivré sept passes décisives. Costaud.
Les galères endurcissent l’homme
Henrikh Mkhitaryan est donc dans une forme étincelante. La question étant évidemment de savoir si, une fois que le Borussia sera rentré dans le rang et que la folie sera un peu retombée, il sera toujours aussi fort. Au vu des derniers matchs, on serait tenté de dire que oui. La semaine passée, alors que les Borussen galéraient bien comme il faut contre Hanovre, l’Arménien a surnagé et inscrit un but précieux juste avant la mi-temps. Si son côté émotif pouvait, jusqu’il y a peu de temps encore, lui faire défaut, de nombreuses choses dans son discours font croire à une nouvelle maturité. « Au bout d’un moment, j’ai cessé de lire ce qui se disait sur moi. Ces deux dernières saisons ont été très dures, mais je sais aussi que les galères endurcissent l’homme » , a-t-il déclaré il y a quelques semaines. Alors que le Borussia peut jouer le titre dans toutes les compétitions auxquelles il participe, il serait de bon ton que ce nouvel état d’esprit ne quitte pas l’équipe. Et surtout pas Mkhitaryan.
Par Sophie Serbini