- France
- Disparition d'Henri Stambouli
Henri Stambouli, le missionnaire du foot français
Henri Stambouli, ancien joueur et entraîneur, nous a quittés ce vendredi à 62 ans à Dakar. Au moment où la FFF célèbre à Clairefontaine les 50 ans de la formation française, il convenait de saluer la mémoire d’un de ses grands serviteurs, animé depuis toujours par la passion de la transmission.
« Que ce soit avec des clubs ou des sélections, ce que je retiens avant tout, c’est le côté humain. Quels que soient le contexte ou les objectifs, c’est cet aspect humain qui fait la différence. » Ainsi parlait le sage Henri, 53 ans, directeur de la formation du Montpellier HSC en janvier 2014. Technicien universel passé par l’Europe, l’Afrique et les Émirats arabes, il avait fait sien le célèbre adage : il n’est de richesses que d’hommes.
Fils de l’OM
France Football rapportait il y a 20 ans que quand Henri Stambouli avait pris en charge en septembre 2003 l’équipe du Mali, participante à la CAN 2004, il avait eu l’élégance d’appeler Christian Dalger, son prédécesseur qui avait qualifié les Aigles. Et avant la compétition, il avait organisé un dîner d’anniversaire pour l’immense Seydou Keita, alors lensois. « Parce que les grandes équipes sont celles qui ont le plus d’affinités hors terrain », professait-il. Et la sélection malienne avait fini à la quatrième place… Le facteur « humain » a été le fil conducteur de son parcours. Un certain goût pour les autres hérité de son environnement familial. « Ma mère était professeur de sport, confessait-il pour le site du MHSC. Je l’ai suivie très tôt, et elle m’a rapidement confié des jeunes. À l’âge de 14 ans, j’en encadrais déjà. Ma volonté de faire de la formation est née de ce moment-là. » Né en 1961 à Oran dans une famille pied-noir rapatriée d’Algérie en 1962, le gamin avait pris une première licence au Stade ruthénois (Rodez, Aveyron). Gardien de but assez doué, il est repéré par le grand coach Gérard Banide, son futur beau-père, qui le lancera en 1979 dans le grand bain professionnel à l’AS Monaco (1977-1986). Henri débarquera ensuite à l’OM de Tapie (1986-1989) où il troquera son costume de doublure pour prendre en charge l’équipe réserve phocéenne.
En 1993, il passe alors entraîneur adjoint de l’impayable Raymond Goethals, comme il l’avait narré en mai 2013 pour France Info : « Raymond était extraordinaire. Il a été comme un père… ou plutôt un grand-père pour moi. (Rires.) Avec lui, j’ai eu un mentor. À l’époque, il était conseiller du président, et moi, j’étais entraîneur au centre de formation. Raymond venait souvent nous voir jouer. Et dès qu’il a récupéré l’équipe (à la suite du licenciement de Jean Fernandez en novembre 1992), il m’a demandé de venir avec lui. Il m’avait vu travailler et me faisait confiance. J’avais pas mal de responsabilités. Au début, j’ai pas mal aidé à la préparation physique. Ensuite, Goethals m’a laissé gérer toutes les premières parties de séances et les petits jeux. Il n’intervenait que lors des oppositions de fin d’entraînement. » À l’Olympiastadion de Munich, en finale de C1 1993 contre l’AC Milan, c’est assis sur le banc à côté de Raymond-la-Science que Stambouli sera lui aussi « à jamais parmi les premiers » à remporter la coupe aux grandes oreilles.
Henri l’Africain
Fidèle et loyal envers l’OM, surtout dans la difficulté, il reviendra coacher en entraîneur principal le club phocéen rétrogradé administrativement en D2 en 1994, en sanction de l’affaire VA-OM. Grâce à un super Cascarino, son OM sera champion de D2 en fin de saison 1994-1995, mais sera empêché de remonter en D1 car comme le rappelle L’Équipe, la société anonyme à objet sportif (SAOS) Olympique de Marseille avait déposé le bilan quelques semaines plus tôt… Rageant ! Délaissé par le football français, Henri s’improvisera préparateur physique de pilotes automobiles avant de rebondir dans le football en Afrique. Il entraînera d’abord la sélection de Guinée (1998-1999), puis le Mali (2003-2004), après deux étapes entre 2001 et 2003 au FC Sion et Sedan. Au court intermède à Las Palmas (2004) succéderont des passages sur les bancs du Raja Casablanca (2004-2005, Coupe du Trône et vice-champion du Maroc), du Sharjah SC aux Émirats (2005-2006), des FAR de Rabat (2006, finaliste de la Coupe de la CAF 2006 et à nouveau vice-champion du Maroc), de l’AS Monaco en adjoint de Laurent Banide, son beau-frère (2007), puis du Togo (2008).
Il passe directeur sportif du FC Istres (2008-2010) avant d’aller entraîner la JSK en Algérie (2021). À son arrivée au club de Tizi-Ouzou, comme pour ses autres destinations à l’étranger, Henri Stambouli s’était évertué à s’immerger dans la culture locale de Kabylie, afin de mieux en saisir les particularismes. « C’est un facteur primordial sur ce continent : si on ne possède pas ces clés-là, on ne peut pas bosser », confiait-il déjà à France Football en 2004. Mais c’est aussi en tant que formateur, là où tout avait commencé pour lui à 14 ans, qu’Henri Stambouli s’était épanoui. D’abord à la tête du centre de formation de l’OM (2010-2013), puis à celui du Montpellier HSC (2013-2018), où son fils Benjamin, passé au PSG, a été formé. Ses amis n’oublieront pas son regard franc, son physique volontaire et son accent provençal chantant. La rédaction de So Foot adresse à sa famille et à ses proches ses condoléances émues.
Par Chérif Ghemmour