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Hazard, la gestion du brouillard
Mal à l’aise dans le schéma offensif frileux installé par Antonio Conte, Eden Hazard prend son mal en patience et évite de faire des vagues en public. En attendant un éventuel transfert... ou l’arrivée d’un nouvel entraîneur.
Le problème quand on est aussi travailleur et exigeant qu’Antonio Conte, c’est qu’il y a un risque de lasser les joueurs à force de leur réclamer constamment davantage de kilomètres et de sueur. Le souci quand on privilégie à outrance le jeu de contres à celui de possession, c’est qu’il y a une probabilité de frustrer les footballeurs qui adorent manier la sphère. À Chelsea, le constat n’en est peut-être pas totalement rendu à ce point. Mais il faudrait être malhonnête pour ne pas envisager qu’Eden Hazard commence à en avoir ras la casquette d’évoluer dans une équipe où l’entraîneur a imposé des convictions défensives prenant le pas sur la liberté offensive.
3-4-3 pas fou, 3-5-2 à vomir
Avant de revenir à un 3-4-3 observé actuellement (avec, souvent, le trio Hazard-Willian-Morata devant), les Blues évoluaient ainsi parfois en 3-5-1-1, avec le Belge tournant autour d’une seule pointe. Symbole paroxystique des frileuses intentions de Conte (qui sont, cette année en tout cas, toujours plus ou moins présentes selon la composition), ce schéma reflétait à l’extrême l’idée prioritaire de l’Italien. À savoir attendre l’adversaire tout en essayant de bien défendre. Problème : fatigués et diminués par rapport à l’exercice précédent, les ex-champions d’Angleterre ont eu beaucoup moins de réussite qu’en 2016-2017.
On a alors pu voir l’ancien Lillois, bien que régulièrement performant, traîner sa peine à maintes reprises sur les terrains britanniques, certains de ses coéquipiers attendant sans bouger un exploit de leur partenaire englué dans l’arrière-garde ennemi. Conséquences directes : sans les victoires qui procurent le plaisir, il est beaucoup plus difficile de s’éclater pour un attaquant dans ce contexte-là – « Je veux juste être heureux sur le terrain, et quand vous gagnez, vous êtes heureux, et quand vous ne gagnez pas, vous n’êtes pas heureux » , a d’ailleurs sorti le meilleur joueur 2015 de Premier League sur Sky Sports en toute simplicité.
Bouillonner de l’intérieur
Comme il l’avait déjà fait un soir européen de 2014 quand il devait obéir aux ordres stricts de José Mourinho, Hazard n’a donc pas pu s’empêcher, quelques fois, de sous-entendre son agacement. « J’ai l’impression d’avoir couru, mais pas d’avoir joué au football. C’est dommage. Nous aurions pu jouer pendant trois heures, je n’aurais pas touché plus de ballons » , a-t-il par exemple balancé à Het Laatste Nieuws après une défaite contre Manchester City durant laquelle Chelsea, ridicule, n’a lutté que pour éviter une raclée.
Mais c’est tout. Lorsqu’il est interrogé sur les rumeurs de transfert et ses envies de départ, le bonhomme s’applique à ne pas faire de vagues et à plaider son investissement pour Londres. « Il ne fait effectivement pas beaucoup de bruit. À l’extérieur, on ne l’entend pas. Il est sûrement demandé, on ne sait pas ce qui va se passer en fin de saison, mais il gère quand même bien le truc, ne s’étonne pas Florent Balmont, partenaire du bleu au LOSC entre 2008 et 2012. Il sait très bien qu’il doit faire attention à ce qu’il dit. Il est assez intelligent pour comprendre qu’un mot de trop peut faire le tour des réseaux sociaux en quelques minutes et que ça peut partir en vrille. Là-dessus, il est vraiment vigilant. »
Fuir Conte, quitter Chelsea ou les deux ?
Adroit sur la pelouse avec le ballon, Hazard l’est désormais tout autant à l’extérieur avec les micros. S’il rêve certainement de quitter Chelsea pour un club comme le Real Madrid dès le prochain mercato, l’ailier gauche se méfie des médias et préfère envisager l’arrivée d’un autre entraîneur… ou un transfert en douceur, alors même qu’il représente la plus grosse valeur marchande de son club. En d’autres termes, Eden s’efforce de rester concentré sur son métier tout en gardant à l’esprit que des changements s’apprêtent à survenir.
Ce qui n’est pas nouveau, selon Balmont : « Quand il était à Lille, il savait très bien qu’il allait partir vu qu’il avait conscience d’être un gros potentiel, une pépite. Mais il a continué de s’éclater et de se donner à fond pour le club. Il est resté dans l’esprit et a joué le jeu jusqu’au bout. Lors du dernier match, il a notamment inscrit un doublé pour bien terminer son aventure. En grandissant, il a vite compris l’importance du respect envers l’entité à laquelle il appartenait. » La motivation de finir sur une bonne note – un triomphe en FA Cup ? – est donc bel et bien là. Comme celui d’achever son cycle avec Conte ou avec Chelsea.
Par Florian Cadu
Propos de FA recueillis par FC