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Hatem Ben Arfa à Lille : le pari fou
Dans l’air depuis plusieurs jours, le transfert d’Hatem Ben Arfa à Lille est désormais officiel. À 34 ans, l’artiste de Clamart va découvrir son septième club de Ligue 1 et s’offre une pige de cinq mois et demi dans le Nord qui mêle, comme souvent avec lui, excitation et inconnue.
C’était un done deal qui n’attendait que le bruit du signal pour se dévoiler à la face du monde. À quatre heures du match en retard du LOSC face à Lorient, prévu ce mercredi à 19h à Pierre-Mauroy, Hatem Ben Arfa a officiellement été présenté par le LOSC face à la presse au Domaine de Luchin. Là-bas, Ben Arfa arborait le sourire Colgate d’un homme confiant, mûr et de retour sur le devant de la scène pour prendre part à « un projet excitant » selon ses propres termes. Comment pourrait-il en être autrement : dans les semaines à venir, le LOSC espère retrouver les hautes sphères de Ligue 1 tout en ayant une double confrontation historique face à Chelsea à préparer en Ligue des champions. Pour le club, la venue de Ben Arfa est alignée sur le prêt de Yusuf Yazıcı au CSKA Moscou. C’était le départ du Turc – dont le niveau était bien loin cette saison du joueur capable de planter un triplé à San Siro l’an dernier – qui conditionnait l’arrivée de Ben Arfa dans le Nord. Ce 19 janvier, Yazıcı est officiellement en Russie et Ben Arfa, lui, dans son ensemble aux couleurs des Dogues orné du numéro 11. Le show peut commencer.
Lille, Létang et la confiance
Hatem Ben Arfa n’est pas un joueur comme les autres, et ça, Olivier Létang le sait bien. Le président du LOSC entretient une relation particulière avec l’amateur d’échecs et, surtout, une estime qui est réciproque. Par le passé, Létang a participé à faire venir Ben Arfa à Paris, puis à Rennes. À Lille, il tente une nouvelle fois le pari d’un joueur qui « a un profil rare » et qu’il connaît par cœur. D’ailleurs, de l’aveu même du joueur, la relation entre les deux hommes dépasse le cadre des seules discussions formelles en période de transferts : « Même quand il n’était plus à Rennes, on parlait de foot, on échangeait comme ça… Je sais que le président est un compétiteur. Quand il va dans un projet, j’ai confiance. »
Il en fallait de la confiance pour revoir Hatem sur une pelouse. Sans club depuis la fin de son aventure avec les Girondins en mai dernier, celui qui s’apprête à découvrir un septième club dans le championnat de France (après Lyon, Marseille, Nice, Paris, Rennes et donc Bordeaux) privilégiait le sportif depuis le départ. « Je suis un amoureux du foot, promettait Ben Arfa. Je n’ai pas voulu aller dans les championnats qui sont orientés hors foot. (…) Lille est une équipe qui a d’excellents joueurs, qui joue au foot, depuis décembre ça tourne bien. Je viens ici pour aider l’équipe quand elle a besoin de moi, je vais essayer d’aider le club pour atteindre ses objectifs. »
« C’est à la fin du bal que l’on paye les musiciens »
Forcément, l’inconnue principale qui danse comme une ombre autour de cette arrivée réside dans la forme actuelle d’Hatem Ben Arfa. Aujourd’hui, Ben Arfa a 34 ans, n’a plus joué depuis mai 2021 et ses deux dernières expériences à Bordeaux et Valladolid ne resteront pas dans les annales. Pris en charge individuellement par le staff du LOSC ces derniers jours, Ben Arfa jure qu’il a « essayé de garder un rythme de club, alternant physique, entraînements traditionnels et en salle pour avoir des cycles de travail afin d’arriver prêt dans un club. » Reste que bosser avec un préparateur physique et enchaîner les matchs de haut niveau, ce n’est pas la même affaire. Il va falloir que ce soit le cas, pourtant, car le LOSC a déjà besoin de lui. En championnat comme en C1 dans un mois : « C’est un joueur très expérimenté, capable de faire des différences incroyables et ça rentre aussi dans le cadre de ce qu’on veut : avoir plus d’efficacité, de justesse, de précision et c’est un joueur qui a toutes ces qualités-là », avançait il y a quelques jours son nouveau coach, Jocelyn Gourvennec.
Forcément, à Lille, on rêve de retrouver le Ben Arfa de Nice ou de Newcastle, celui capable sur un coup d’éclat d’effectuer une différence, de faire basculer un match indécis et de faire bondir les fans lillois de leur strapontin. Avec lui, Gourvennec et les fans des Dogues récupèrent un homme qui est le deuxième joueur le plus expérimenté en Europe derrière Burak Yılmaz et le joueur le plus titré de l’effectif du champion de France. Il y a donc forcément un statut à faire respecter. Dès ce week-end, à Brest, Ben Arfa pourrait être qualifié et ainsi étrenner sa nouvelle peau rouge en Bretagne. Lui, en tout cas, semble prêt à revenir aux affaires : « J’ai 34 ans, je me connais très bien. J’ai eu pas mal de périodes dans ma carrière où je n’ai pas joué. J’ai très bien travaillé, avant la reprise j’ai travaillé pour être compétitif très rapidement. Le coach et le staff médical vont déterminer quand je serai prêt. » Certains y verront un signe du destin, mais il y a dix-sept ans et demi, en 2004, Hatem Ben Arfa plantait son premier but à Lille sous le maillot de l’OL. Plus d’une quinzaine d’années plus tard, c’est donc sous le maillot lillois qu’il pourrait écrire la dernière page de sa longue et tumultueuse carrière. Même si, avec Ben Arfa, on n’est jamais à l’abri de l’imprévu : « Il y a six mois, j’étais sans club. Là, je me retrouve dans un club très compétitif qui joue la Ligue des champions… On me dit à chaque fois que c’est un dernier défi, mais c’est à la fin du bal que l’on paye les musiciens. » Et si c’était ça, être immortel ?
Par Andrea Chazy, à Lille