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Harry Kane, jeune lion
Face à la Lituanie (20h45), Harry Kane, 21 ans, fêtera sa première sélection avec l'équipe d'Angleterre. Peut-être l'occasion d'assister aux grands débuts du jeune Spur, écrasant de facilité depuis le début de la saison. Et qui pourrait lorgner sur la place de n°1 d'ici peu.
Une partie du peuple le réclamait. L’autre le repoussait. Forcément, Roy Hodgson n’a pas pu contenter les deux parties. Alors, dans sa dernière liste, le sélectionneur anglais a cédé aux premiers. Parmi les 24 joueurs retenus pour les rencontres face à la Lituanie et l’Italie, le nom d’Harry Kane est bien présent aux côtés de Rooney, Welbeck, Sturridge ou Barkley. Un avènement pour le nouveau larron de la bande, 21 ans au compteur, qui a su faire passer l’opinion publique des doutes à l’évidence. Car se priver de Kane relèverait presque de l’hérésie. 29 buts toutes compétitions confondues, une place de meilleur buteur d’Angleterre partagée avec Diego Costa, et l’attaquant de Tottenham a définitivement revêtu la cape de jeune héros à l’efficacité froide. Pas un mince exploit pour un gamin baladé durant près de 4 ans à travers l’Angleterre, et dont le manque de fantaisie peine encore à en faire une pépite adulée de tous. Bien que sali, Harry ne rencontre toutefois pas ses détracteurs une fois les prés foulés. Car son objectif reste le même : cadrer, marquer, le plus possible, en club, comme en sélection. Un pragmatisme dont les Three Lions auraient bien besoin.
Harry fait du bien
D’ailleurs, Harry Kane n’a pas pour habitude de céder à l’euphorie. Juste après avoir appris sa convocation, l’arme fatale des Spurs a retourné Leicester en inscrivant son premier triplé en Premier League, son deuxième avec Tottenham. Face à Tripolis en novembre dernier, le jeune Anglais se fendait déjà de la même performance, au grand damn de Papa Khalifa Sankaré, défenseur adverse ce soir-là : « Il est super intelligent, surtout quand tu vois les appels qu’il fait et son âge. Il doit avoir un entraîneur individuel qui lui fait bosser ça. Sur ce match aller, Adebayor était en pointe et j’ai eu moins de problème qu’au match retour où c’est lui qui a joué attaquant de pointe » . Pourtant, Kane est souvent jugé « lent » .
Une tare dans le football moderne où l’attaquant de pointe est attendu sur son explosivité, mais que le Londonien sait compenser avec brio : « On en a connu plein des attaquants qui ne sont pas rapides. On va en citer un qui vient d’arrêter, c’est David Trezeguet. Il n’était pas rapide, mais devant le but c’était quelque chose ! Après, il peut quand même prendre les défenseurs de vitesse » , tranche Hameur Bouazza, son ancien partenaire à Millwall. Depuis, Kane va à peine plus vite. Mais son efficacité face aux bois, elle, explose. Du gauche, du droit, de la tête, Kane dispose de cette faculté à ne jamais perdre du vue le rectangle gagnant. Efficace à défaut d’être sexy, peut-être trop soudain pour s’ancrer dans les esprits, Kane a forcé la décision grâce à un exercice 2014-2015 plus abouti que jamais. Reste à savoir si armé de sa voix « de mongol » , comme le signalaient avec à propos les supporters de West Ham, Harry pourra mettre les cœurs anglais à ses pieds.
Harry à la rencontre du Royaume
Car les interrogations subsistent. Adoubé par White Hart Lane, Kane n’a pas encore conquis le Royaume. Pourtant, le terreau est parfait. Rooney vieillissant, Welbeck et Sturridge loin d’être aussi prolifiques, le gaillard d’1m88 pourrait rapidement dépasser ses concurrents sur le front de l’attaque. Mais outre-Manche, les espoirs trop vite nourris ont souvent été déçus. Alors, la prudence règne vis-à-vis de ce nouvel étalon à la soif de buts. Dans le Daily Mail, Hodgson affirmait le 6 mars dernier : « La question que vous posez est de savoir si le joueur a la qualité et le talent que nous recherchons et s’il y a de la place pour lui ? Je ne peux pas inclure tout le monde malheureusement. Ce n’est pas toujours une question de qualité, c’est parfois aussi une question de place sur le moment » . S’il a depuis écarté ce doute en l’intégrant aux 24, le sélectionneur reste sur sa réserve. Une réserve qu’ils sont nombreux à ne pas partager, préférant louer le talent et la probable longévité de Kane. Pochettino en soutien, Pelé en encenseur public, le jeune Harry dispose de renforts de poids lorsqu’il s’agit d’écarter les doutes entourant sa personne.
Kane, futur n°1 d’Angleterre ? Cameron Lancaster, son coéquipier à l’académie de Tottenham, écarte d’un revers de main les interrogations subsistantes : « Vous n’avez qu’à regarder les statistiques des attaquants anglais en Premier League et vous avez votre réponse » . Jonathan Téhoué qui a assisté à l’éclosion de Kane à Leyton Orient (2011), analyse : « Je ne suis pas surpris de son évolution. Ce qu’on voit aujourd’hui, on pouvait le voir par rapport à ses prédispositions. Mais peut-être pas aussi vite, parce qu’on sait qu’à Tottenham, il y a du monde, ils ont de l’argent pour acheter des attaquants étrangers, ils ont l’argent pour acheter de bons joueurs. Mais ensuite, on a vu qu’Andros Townsend, qui est également passé chez nous, a été appelé en équipe d’Angleterre, et on s’est dit « Pourquoi pas Harry ? » Honnêtement, on savait qu’il allait aller loin » . Après avoir écarté les millions, Kane se verrait ainsi bien écraser la concurrence du passeport. Et foutre un sacré coup de semonce dans la hiérarchie des avants anglais, dont le leader ne s’est pas encore fait connaître.
Le portrait de Harry Kane est à retrouver dans So Foot Junior #10, actuellement en kiosques.
Par Raphael Gaftarnik