- 80 ans de Guy Roux
Guy Roux : « Si j’avais eu un vélo de course à 15 ans, je n’aurais pas fait de foot ! »
S’il n’avait pas été footballeur, puis entraîneur, Guy Roux serait peut-être devenu coureur cycliste. Le vélo, une passion qui l’habite depuis sa plus tendre enfance. Entretien avant le top départ de ce 104e Tour de France.
Que représente le Tour de France pour vous ?Enfant, j’ai écouté à la TSF lors de la dernière étape du Tour de France 1947 avec l’exploit de Jean Robic. Je peux même vous réciter le classement : un, Robic ; deux, Fachleitner ; trois, Brambilla.
D’où vous vient cet amour pour le vélo ?Si j’avais eu un vélo de course à quinze ans, j’aurais fait du vélo et pas du foot. C’est pour dire que j’aime ça !
Vous auriez été sprinteur, rouleur, grimpeur, baroudeur ?À cette époque, j’étais très, très maigre. Je faisais 63 kilos pour 1m75. J’aurais pu grimper à mon avis. J’avais un cœur assez lent. La preuve, j’ai gagné le championnat universitaire de cross à Limoges. J’étais endurant. J’aurais pu faire du vélo.
Une étape que vous auriez aimé remporter ?Une longue étape avec trois, quatre cols. Le Vars, l’Izoard et puis une arrivée à Briançon par exemple.
Et dans quelle équipe auriez-vous couru ?J’ai commencé enfant avec les équipes nationales. En 1948 et 1949, il y avait Coppi, Bartali, donc j’aurais aimé être dans l’équipe de France, évidemment. Même pas en tant que leader, mais comme un simple membre dévoué. Un équipier qui aurait eu de temps en temps une permission de se glisser dans une échappée pour aller gagner une étape. C’est un de mes rêves d’enfant. (Rires.)
Le coureur de vos rêves ?Louison Bobet m’a fait rêver quand j’étais petit. Il n’avait pas de moyens extraordinaires, mais il était d’un grand courage. Un très bon tacticien, tout le temps présent aussi bien dans les classiques que lors des courses par étapes. Il n’y avait pas de spécialisation comme aujourd’hui. Enfin, je reconnais que, intrinsèquement, Anquetil, Hinault, Merckx et Coppi avaient plus de moyens que Bobet.
Pourquoi nos Français ont-ils autant de mal à s’imposer sur le Tour ?Pendant longtemps, il y a eu l’Américain (Armstrong, N.D.L.R.). La lutte antidopage est beaucoup plus stricte, les punitions beaucoup plus lourdes en France que dans tous les autres pays. Ça empêche les coureurs français d’atteindre le niveau de certains autres. Armstrong a gagné six ou sept fois sans qu’on ne l’ait jamais attrapé durant l’épreuve. Ce n’est pas que les Français n’ont pas envie de gagner…
Vous avez un chouchou pour ce Tour ?Comme tout le monde, je suis pour pour Thibaut Pinot. Je regrette qu’il ne soit pas à 100% champion cycliste, qu’il ne mène pas une vie totalement saine en dehors du vélo. Ça l’empêche d’aller au bout de ses possibilités qui sont énormes, et ça l’empêchera peut-être de gagner un jour un grand tour. Sinon, j’aime bien les sprinteurs français, Démare et Bouhanni, lorsqu’ils ne tombent pas.
Votre avis sur Christopher Froome ?Je le préfère à Armstrong, il est plus sympathique. J’ai aussi beaucoup d’estime pour lui parce que le jour où la route a été barrée, il a franchi la difficulté en courant. C’était une attitude de champion.
Avez-vous côtoyé des cyclistes durant votre carrière ?Je suis ami avec Raymond Poulidor parce que j’ai joué à Limoges et parce qu’on est de la même génération. Sinon, je suis proche de Raymond Riotte qui est très malade en ce moment. Un coureur de l’Yonne qui a porté le maillot jaune durant une semaine. Il a gagné plusieurs étapes après avoir fait la guerre d’Algérie. C’est un garçon remarquable. Il est couché en ce moment, j’espère que ça va bien se passer pour lui.
Propos recueillis par Flavien Bories