Guy Roux : «On est en république…»

Suite aux échanges de banderoles entre des supporters critiquant à chaque match amical la direction du FC Nantes et le staff technique réclamant qu’on lui foute la paix ( « Laissez nous bosser » ont demandé samedi Gernot Rohr et ses adjoints aux supporters contestataires), Pascal Praud, directeur général délégué du club, était dimanche soir l’invité d’Europe 1, pour un moment de radio aussi exceptionnel qu’inattendu.

Tout commença pourtant de manière classique. Le journaliste d’Europe 1, dont nous tairons ici pudiquement le nom, servit allègrement la soupe à Pascal Praud. La cause était entendue d’avance : les gentils dirigeants du FCN sont injustement harcelés par une petite minorité active de méchants “pseudo-supporters”. Quelles sont les raisons de la grogne de ces supporters ? Que reprochent-ils à l’équipe dirigeante menée par Waldemar Kita ? Qui sont précisément ces fans contestataires ? Trop occupé à passer les plats, le journaliste ne fournit aux auditeurs aucun élément permettant de situer dans leur contexte les récents événements. Tout juste osa-t-il une question impertinente : Pascal Praud n’aurait-il pas eu tort de déclarer vouloir rompre avec le passé du club ?

Parfait communicant, Pascal Praud avait anticipé la critique en concédant des erreurs mineures, en rappelant que la nouvelle direction n’est là que depuis deux ans, en admettant qu’il avait pu se faire mal comprendre, en légitimant son action etc. Cette posture lui permit de défendre efficacement sa cause tout en laissant entrevoir, de manière implicite, les causes profondes du conflit.

C’est alors que Guy Roux, toujours à l’affût sur Europe 1, fut invité à donner son avis. A-t-il connu une telle situation à Auxerre ? Oh que non ! « Dès qu’une banderole critique était déployée à l’Abbé-Deschamps, j’envoyais quatre gros bras l’enlever et le lundi, le responsable de la banderole était dans mon bureau » s’exclama en substance notre Guy Roux national. Il s’apprêtait à généraliser son expérience et à donner de vigoureux conseils à Pascal Praud quand soudain, dans un éclair de lucidité, il se rappela qu’il y avait comme une couille dans le potage : « Oui, mais on est en République… » . Ah, ben merde alors. La liberté d’expression, ça existe encore un peu. Les milices, c’est pas bien. Donc on ne peut pas faire n’importe quoi pour réduire au silence les supporters. Eh oui, les bons conseils du terroir se heurtent parfois à quelques grands principes démocratiques.

Toujours aussi habile, Pascal Praud saisit la balle au bond et tira de l’embarras le grand manitou auxerrois en se plaçant illico du côté de la légalité. Il affirma haut et fort avoir demandé à tous les acteurs du club d’être exemplaires afin de ne pas tomber dans la provocation, les “pseudo-supporters” n’attendant que ça pour que le conflit dégénère.

Pendant ce temps-là, Guy Roux pouvait se ressaisir et répéter d’un ton las « On est en République… » en s’efforçant de persuader qu’il s’en réjouissait.