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Gündoğan, du bleu roi au bleu ciel
Ce mardi soir (21h), İlkay Gündoğan reçoit Schalke 04, un club par lequel il est passé à l’âge de huit ans. Pas de quoi lui laisser un souvenir impérissable, même s’il ne tarit pas d’éloges sur son enfance au cœur de la Ruhr.
Au moment d’apprendre que Manchester City héritait de Schalke 04 pour les huitièmes de finale de la Ligue des champions, deux Citizens avaient un petit sourire en coin : Leroy Sané et İlkay Gündoğan. Pas forcément pour les mêmes raisons cela dit. Pour le premier, cela signifiait rejouer dans le stade du club qui l’a révélé. Pour le second, c’était tout simplement rentrer chez lui.
Six petits mois et puis s’en va
Gündoğan est en effet un enfant de Gelsenkirchen, la ville qui le voit naître en 1990. Ses parents sont des immigrés turcs venus chercher une vie meilleure dans la Ruhr. Pour eux, pas question de jouer la carte du communautarisme, İlkay se le rappelle bien : « Je suis reconnaissant que mes parents aient eu le courage de vouloir s’intégrer dans la société allemande dès leur arrivée, bien qu’ils ne connaissaient pas la langue au début. Il y avait beaucoup de familles turques qui vivaient ensemble dans le quartier. C’est difficile pour les adolescents de s’impliquer pleinement dans la société allemande. Mes parents ont toujours préféré vivre dans des environs majoritairement peuplés d’Allemands, rembobine-t-il. J’ai donc été forcé de parler allemand avec mes camarades de jeu. Grâce à mon bon niveau et à ma passion pour le football, j’ai toujours ressenti de la reconnaissance. »
Le football justement, Gündoğan commence à le pratiquer dès son plus jeune âge. Mais pas dans le quartier de Schalke, d’où est originaire le club du même nom. Sa première licence, il la signe au Hessler 06, l’équipe de son district. Mais son talent ne passe pas inaperçu et lorsqu’il a huit ans, son coach, en partant pour le géant voisin, décide de l’emmener avec lui. « Au début, j’y ai passé de très bons moments. Mais tout a changé lorsque j’ai commencé à ressentir des douleurs au niveau du tendon d’Achille, à cause de ma croissance. J’ai été interdit de sport pendant six mois. Ce n’est donc pas surprenant que j’ai été écarté de l’équipe à la fin de la saison.(…)Pour moi, cela a été une immense déception.(…)Je m’y sentais vraiment bien et mes amis m’admiraient parce que je jouais à Schalke. Et tout s’est arrêté et je suis retourné dans mon premier club. » Quelques années plus tard, les Königsblauen reviennent frapper à sa porte pour lui offrir une seconde chance, qu’il décline : « J’étais encore un peu rancunier. Je voulais plutôt rester avec mes amis proches à jouer sur les terrains du quartier plutôt que de retourner dans une académie. »
La Turquie plutôt que la Buli
Rancunier, İlkay ? Même pas. Quand on lui demande s’il a déjà été fan de Schalke, le gamin de Gelsenkirchen répond tout de go : « Pas vraiment. Mais j’avais plein d’amis qui supportaient Schalke 04. Dans mon enfance, je regardais davantage le football turc que la Bundesliga. En revanche, ma première fois au stade, c’était bien à Schalke, à sept ans, dans l’ancien Parkstadion. » En dépit de son intégration totale dans la société allemande, Gündoğan n’en reste pas moins attaché à la culture de ses parents et cela se manifeste avant tout à travers le football : « C’est pour cela que j’ai de la sympathie pour toutes les équipes turques qui jouent en Coupe d’Europe. Mais c’est normal, j’ai été influencé par ma famille et je supporte les clubs que mes proches soutenaient. »
Lorsqu’il a quinze ans, İlkay Gündoğan finit par réintégrer une académie. Celle de Bochum, là où sa carrière va véritablement commencer. Toujours dans la Ruhr, sa région, celle où il a grandi et s’est formé à la vie. Son père, chauffeur-livreur pour une brasserie, l’emmenait d’ailleurs avec son frère pendant leurs vacances scolaires pour lui filer un coup de main. « Quand tu es ado, tu n’as pas vraiment envie de faire ça. On était un peu forcés.(…)Si on avait eu le choix, on ne l’aurait pas fait. Et puis j’ai eu la chance que le football prenne une place de plus en plus significative dans ma vie, jusqu’à ce que j’intègre le centre de formation de Bochum » , se souvient İlkay. « Mon frère n’a pas eu cette chance. Et cela voulait dire : « İlkay, tu restes à la maison, tu dois t’entraîner. Toi İlker, tu viens. Tu es libre, tu peux m’accompagner au travail. » Cela impliquait aussi de se lever à 5 heures et trimer jusqu’à 18-19 heures. » Pour la seconde moitié de son duel face à Schalke, Gündoğan aura forcément une pensée pour ces vacances passées à porter des fûts et des bacs de bières. Pour cette couleur bleu roi aussi, avec laquelle il n’a jamais percé. Et pour le bleu ciel de Manchester City, avec lequel il s’est bien consolé après coup.
Par Julien Duez
Propos de IG recueillis par la FAZ, Kicker et Sport Bild.