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Gulácsi, un nouveau Király ?
Même tonsure précoce. Même émergence en Bundesliga. Même nationalité. Même taille. Même poste. Seul le falzard crado sépare Gábor de son successeur dans les filets ayant longtemps attendu son heure. Leader étonnant avec Leipzig, Péter Gulácsi, l’ancien de la réserve d’Anfield révélé à Salzbourg, savoure sa réussite entre sauvetages héroïques, risettes sur Instagram et sentiment d’être enfin pris au sérieux.
À dix-huit ans d’intervalle, Gábor Király et Péter Gulácsi ont quitté l’anonymat en sortant un penalty. Le premier en mars 1998 pour ses débuts chez les A face à Polster, six mois après avoir rejoint le Hertha. Le second mi-novembre 2016, remettant Leipzig dans la partie, alors que Leverkusen menait 2-1, avant de perdre 3-2 au finish. Dans les deux histoires, « Gabi » et « Gula » justifient leur recrutement en Allemagne et prouvent aux supporters qu’ils ont les tripes pour compter à l’avenir. Mais l’avenir appartient désormais à Gulácsi. Coach Bernd Storck a décidé de lui confier les cages du « Nemzeti 11 » pour pallier le départ de Gábor, le quadra aux cent huit capes. Dénes Dibusz du Ferencváros ? Coincé en Hongrie malgré un appel du pied berlinois. Balázs Megyeri ? Parachuté au Greuter Fürth (modeste écurie de D2 teutone) faute d’avoir pu s’imposer à Getafe. Ádám Bogdán ? Plombé par un claquage au genou qui stoppe sa résurrection, consécutive à une saison noire chez les Reds.
Portier pensant
Gulácsi, c’est l’alliage palmarès/expérience manquant à ses concurrents. Jugez plutôt : cinq années anglaises incluant une arrivée à Liverpool au seuil de la majorité, puis des apparitions appréciées en Football League One et en Championship, troisième de la Coupe du monde 2009 des U20 avec la Hongrie sauvant six pénos sur dix durant la compétition (mieux que Goycochea au Mondial 90), deux doublés ÖFB-cup/championnat (2014-2015) et des sollicitations en Ligue Europa avec le Red Bull Salzbourg. Dans la ville de Mozart, le Magyar s’est imposé maestro des montants, lui qui n’a jamais connu la Ligue 1 de son pays d’origine. Formé par le club cheminot du BVSC comme son camarade milieu défensif Ádám Pintér, tous deux introduits en sélection le même soir face au Danemark le 22 mai 2014, le Budapestois a été happé par Albion à dix-sept piges sans laisser le MTK l’aligner en Nemzeti Bajnokság.
À cet âge-là, le Király pré-jogging perçait timidement au sein de l’effectif pro du Szombathelyi Haladás. « De mon point de vue,« Gula » appartient à la catégorie des portiers pensants, estimait pendant l’Euro l’ex-sentinelle maison Zsolt Petry, interviewé par la chaîne DigiSport. Il comprend ce qui se passe sur le terrain et décortique parfaitement les situations, à l’instar de Sommer qui anticipe et déblaie sa surface ou de Szczęsny qui fonce au contact, tandis que Dibusz est plus branché réflexes et duels, comme 80 % de ses confrères aujourd’hui » , complète l’actuel entraîneur des gardiens du Hertha.
Cuir de kangourou et reine de beauté
Des Alpes à la Saxe, la success-storyGulácsi suit celle des deux franchises énergisantes tutoyant les sommets de part et d’autre de la frontière germanique. Comme Schmitz, Bernardo, Sabitzer, Keita et Ilsanker, « Gula » est un produit de la filière taurine autrichienne. Une composante du plan destiné à booster les équipes estampillées Red Bull. En six ans, Leipzig a gravi quatre échelons jusqu’à la Bundesliga. « Gula » et ses Nike Tiempo Legend fabrication cuir de kangourou veulent bondir vers le Meisterschale. Le manager de Leipzig complimente allègrement son nouveau chouchou, suppléant de Fabio Colcorti propulsé titulaire depuis la blessure du rempart helvète. « Péter n’est pas le genre de gardien qui enchaîne les parades spectaculaires, mais on peut constamment compter sur lui. Il défend mieux que ce qu’il prétend quand il analyse ses prestations. C’est pour ça que je l’aime. Il est calme, équilibré et mène sa barque tranquille » , confiait récemment Ralph Hasenhüttl au site web du magazine Kicker.
Si discrètement qu’il attire encore peu les flashs, malgré sa WAG reine de beauté tartinant le bonheur du couple sur Instagram, et réalise à peine que le petit Leipzig trouble les gros. Avec dix pions pris en douze journées, Gulácsi tient aussi bien ses perches que Neuer à deux unités près. Il ne soulèvera probablement jamais de Coupe du monde comme le Bavarois, mais aimerait lui chiper le titre teuton. Et devenir « Gula » le gourou aussi idôlatré que Király à l’Olympiastadion ? Possible. Même sans jogging.
Par Joel Le Pavous