- Ligue 1
- J35
- Guingamp-Caen
Guingamp-Caen, règlement de comptes à Roudourou
À quatre journées de la fin de saison, Guingamp reçoit Caen, samedi soir, dans une rencontre décisive dans la course au maintien. Mais au-delà de l'énorme enjeu sportif, les deux clubs vont se retrouver après trois semaines agitées en coulisses, entre les soupçons d'irrégularités autour du match Caen-Angers pointées par Bertrand Desplat et les réponses cinglantes de Rolland Courbis.
Le printemps est souvent le bon moment pour voir naître des rivalités éphémères. Rien à voir avec les traditionnels derbys et les conflits historiques, ces duels à distance – sauf le temps d’un match parfois – sont souvent le fruit d’une lutte pour les places européennes ou bien pour le maintien. Surtout pour le maintien. Tout le monde se souvient des passes d’armes entre Pascal Dupraz et Hervé Renard quand l’Évian Thonon Gaillard et Sochaux se livraient une concurrence féroce pour rester en Ligue 1 en 2014, avant de se retrouver sur le terrain lors de l’ultime journée. Cinq ans plus tard, c’est au tour de Guingamp et Caen de se retrouver sur le devant de la scène. Depuis plusieurs mois, les deux équipes n’ont pas quitté la charrette et se battent pour espérer au moins accrocher une place de barragiste.
A priori, pas de quoi faire éclore une vraie rivalité, tant la situation est classique. Sauf que Bertrand Desplat s’est chargé d’ajouter un peu de piment dans cette lutte à deux – tout en laissant Dijon, Amiens et Monaco grappiller les points de leurs côtés – le week-end du 13 avril. Avant une rencontre opposant Caen à Angers, le président guingampais prévient la LFP que des rumeurs font état d’un possible arrangement entre les deux équipes, après avoir été alerté par plusieurs joueurs du club costarmoricain. Résultat : Angers s’impose finalement à Caen (0-1). La fin des soupçons ? Pas vraiment, l’affaire n’étant toujours pas classée aujourd’hui, alors que Bretons et Normands doivent se retrouver sur le terrain, samedi soir, à Roudourou pour un match qui risque de faire parler la poudre.
La mèche Desplat, les étincelles Courbis
Et la mèche a donc bien été allumée par le président de l’EAG, qui ne s’est pas gêné pour entretenir cette nouvelle flamme dans les médias quelques jours après cet épisode, se définissant comme un « lanceur d’alerte » dans les colonnes de L’Équipe. « Mon joueur m’a dit des choses qui m’ont paru étranges, donc j’ai alerté la Ligue, affirmait-il dans le quotidien français la semaine suivant Caen-Angers. J’ai été respectueux des institutions et je pense que tous les présidents devraient le faire. » Des arguments pouvant s’entendre. Ainsi, la commission de discipline a rapidement ouvert une enquête et une instruction afin qu’un rapport soit étudié au courant du mois de mai. Mais la semaine dernière, sans vraiment le vouloir, Desplat a remis un peu d’huile sur le feu, son courrier à la LFP – pour ne pas dire coup de pression – ayant fuité. Sa demande ? Ne pas dévoiler l’identité des témoins salariés de l’EAG dans cette affaire : « Je précise, dans une volonté de prévenir plutôt que de guérir, qu’en cas de manquement grave de la LFP, ou de qui que ce soit parmi ses membres ou ses commissions, aux principes de l’anonymat des témoins et plus globalement du secret de l’instruction, l’EAG ne manquera pas de se montrer solidaire des poursuites judiciaires qui pourraient être engagées par les victimes de telles déviances. » Compris ?
Mais le dirigeant breton a trouvé à qui parler avec le fameux Rolland Courbis, arrivé au chevet du SMC en février et connu pour sa grande gueule face aux médias. Depuis le début de cette affaire, le technicien ne cesse d’envoyer des petites (ou grosses) piques à Desplat. « Nous remercions le président de Guingamp de nous avoir remobilisés et remotivés alors qu’on était pratiquement KO, lâchait-il sur les ondes de RMC dimanche dernier. On aura l’occasion de lui dire de vive voix qu’on le remercie lors du prochain match à Guingamp. » Et forcément, il ne s’est pas gêné pour en remettre une couche à deux jours du match en conférence de presse : « Qu’est-ce que vous voulez que je rajoute de plus ? Qu’il nous a perturbés, qu’on est vraiment mécontents et que Guingamp est un club certes sympathique, mais surtout un faux petit club ? Pour se permettre de faire ce qu’il(Bertrand Desplat)fait, il faut avoir de sacrées relations, et je ne sais pas où s’arrêtent ses relations ! Après, je noircis peut-être anormalement le tableau… » Bonne ambiance.
La vérité du terrain
Alors, cette guerre en coulisses a-t-elle vraiment relancé les Caennais plutôt que de les déstabiliser ? En tout cas, la bande à Mercadal a fait un carton plein depuis cet épisode, prenant six points en deux matchs contre Nice et Dijon et se repositionnant à une place de barragiste tant convoitée. Dans le même temps, Guingamp a enchaîné deux larges défaites contre l’OM et Nice pour se retrouver encore une fois lanterne rouge et voir l’espoir d’un maintien dans l’élite s’éloigner un peu plus. Autant dire que cette rencontre face au SMC à Roudourou est plus que jamais décisive, puisqu’une défaite condamnerait quasiment l’EAG à la Ligue 2. En conférence de presse, Jocelyn Gourvennec a préféré relativiser, tout en refusant d’évoquer les tensions entre les deux clubs : « On était morts et enterrés mi-novembre avec 7 points en 13 matchs, mais on est toujours à la bagarre, on est toujours vivants et c’est aussi l’ADN de Guingamp de réussir à exister dans ces moments-là. » L’enjeu est donc énorme et l’enceinte costarmoricaine pourrait être à guichets fermés, sachant que le club normand a décidé de payer le déplacement en Bretagne à près de 800 supporters caennais. Enfin, l’heure n’est plus aux courriers, aux déclarations chocs ou aux petites provocations : place au terrain !
Par Clément Gavard