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Guerre en Ukraine : Le foot assume-t-il désormais sa force politique ?

Par Nicolas Kssis-Martov
Guerre en Ukraine : Le foot assume-t-il désormais sa force politique ?

La guerre en Ukraine aura clairement changé la donne dans le football qui joue un rôle inédit dans ce conflit et, pour une fois, de manière complètement assumée. UEFA, FIFA, clubs, tout le monde s’est positionné. L’exclusion de la Russie des compétitions internationales - et donc du Mondial 2022 - est l’inévitable conséquence de cette prise de conscience. Et ensuite ?

Le football a toujours été politique. Il ne s’agit pas d’en discuter. Les divers régimes ou courants idéologiques ont toujours su embrigader le ballon rond à leur profit ou au service de leur propagande. Pour ne citer que ce cas d’actualité, personne ne peut douter de la place du football dans le maintien du sentiment national ukrainien sous l’URSS tout comme dans la construction de l’État ukrainien après 1990. Avec aussi ses zones d’ombre, comme par exemple les groupes ultras d’extrême droite dans certaines tribunes du pays. En face, l’apolitisme ne constituait souvent qu’un argument vaguement hypocrite que les grandes instances de ce sport dégainaient pour justifier leurs compromissions, à l’image des Coupe du monde de 1934 en Italie et de 1978 en Argentine. Cette « neutralité » concernait aussi les conflits armés : que ce soit lors de l’intervention militaire soviétique en Hongrie en 1956, en Tchécoslovaquie en 1968, en Afghanistan en 1979 ou plus récemment au Moyen-Orient, rien ne venait fondamentalement déranger la table du football international. Or l’invasion russe en Ukraine a de toute évidence ouvert une nouvelle séquence. Le foot est apparu comme l’un des fronts de cette guerre. Point le plus important, cette fois, de gré ou contraint, l’ensemble des acteurs en place ont choisi de sanctionner le football russe – et dans une moindre mesure biélorusse – au nom de considérations « extra-sportives » (ce que souligne en retour la fédération russe, qui veut porter l’affaire devant le TAS, et le Kremlin). Cette politisation assumée du football couvait depuis un certain temps.

Football for Ukraine

Oui, depuis le début de la crise et de l’invasion russe, les lignes ont bougé. Dans un premier temps, la FIFA a tenté sa tactique habituelle, temporiser, maintenant les sélections russes et biélorusses sous le seul pavillon de leur fédération. Cette astuce si souvent employée n’a pas tenu devant la gravité de ce qui était en train de se dérouler du côté de Kiev et la multiplication des réactions au sein même du monde du football. Puis l’UEFA a délocalisé la finale de la Ligue des champions en France. Des clubs ont renoncé à leurs sponsors russes comme Schalke avec Gazprom. Des joueurs, ukrainiens, mais pas seulement, ont exigé publiquement l’exclusion des équipes russes. Dans les stades, les manifestations et gestes de sympathie envers le peuple ukrainien se sont multipliés. Sans parler du bruit de fond sur les réseaux sociaux. Même les termes dans les communiqués officiels, comme celui de l’UEFA « condamnant fermement l’invasion militaire russe », dépassaient les habituelles rhétoriques vaguement éthiques.

Conséquence : Gianni Infantino a dû plier, car l’ensemble du foot européen l’y a obligé. Résultat, la mise sous quarantaine du football russe a incarné un plus gros affront reçu par Vladimir Poutine pour qui, à l’image de « son » Mondial 2018, ce sport incarnait l’une des démonstrations de la renaissance impériale de la Russie éternelle. Par ces biais, le foot a clairement indiqué qu’il assumait son rôle dans ce monde, au nom de considérations qui dépassent les seules limites du rectangle vert. Il a assumé son importance sociale, culturelle et diplomatique qui implique en retour d’endosser les responsabilités qui en découlent. Le foot est intervenu dans un conflit dont il aurait pu simplement se contenter d’attendre la fin et l’accalmie, comme par le passé, où il l’avait fait sans attendre ou suivre les embargos instaurés par la communauté internationale (à l’instar de la Yougoslavie en 1992).

Les prémices d’une jurisprudence ?

Désormais la question piège : est-il possible de revenir en arrière ? Cette guerre se déroule en Europe, ce qui explique grandement cette soudaine prise de conscience. C’est plus près de nous, donc c’est forcement plus grave, tel est le message envoyé. L’Ukraine va-t-elle forger une jurisprudence ? Que se passerait-il si les USA renouvelaient une intervention dans leur pré carré sud-américain (rappelons-nous Panama en 1989). De même si la Chine appliquait ses menaces d’annexion de Taïwan? Et au-delà des débordements impérialistes des grandes puissances, que dire de la Palestine, des Ouïghours, du Yémen… Ou sera placé le curseur, le point de bascule désormais ? Le seul droit international ? De quelle manière cette politisation du football se manifestera-t-elle, puisque FIFA et UEFA ne « simulent » plus, et qu’elles ont découvert qu’il leur était possible de contrarier un pays puissant et autoritaire ? Il ne faut pas s’y tromper : en acceptant de devenir un acteur politique, le football, dans toute sa diversité, vient d’entrer dans une arène où, jusqu’à présent, il faisait simplement mine d’être un spectateur impartial.

Par Nicolas Kssis-Martov

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