- International
- Gambie
Avant la CAN, les déboires de la Gambie
Un match amical au Maroc annulé tardivement, un bras de fer entre les internationaux et le gouvernement pour des histoires de primes, et enfin un départ en Côte d’Ivoire retardé après un grave accident technique de l’avion transportant la délégation gambienne. Les derniers jours ont été particulièrement agités chez les Scorpions.
On la tient, notre première affaire de primes liées à la participation d’une sélection nationale à la Coupe d’Afrique des nations. Sympas, les Camerounais, qui furent pendant des années les grands animateurs de cette story devenue rituelle, ont abandonné leur premier rôle à d’autres, depuis que Samuel Eto’o, le président de la fédération (FECAFOOT) a décidé de mettre de l’ordre dans cette question génératrice de conflits. Cette année, ce sont les Gambiens qui ont dégoupillé les premiers.
Mais les Scorpions auraient pu ne jamais profiter des 500 000 euros de prime collective obtenue du gouvernement, après qu’ils ont annulé l’entraînement public prévu le 9 janvier à l’Independance Stadium de Bakau – provoquant la colère des supporters, dont certains ont commis des actes de vandalisme – et menacé de ne pas se rendre en Côte d’Ivoire pour la phase finale de la CAN. Les joueurs souhaitaient que cette somme correspondant à la prime de qualification pour la compétition soit versée dans les plus brefs délais. L’État s’est exécuté sur les hautes instructions d’Adama Barrow, le président de la République, absent ce jour-là du territoire national pour cause de déplacement à l’étranger, et désireux de s’épargner un clash malvenu avec les joueurs juste avant la compétition.
Le chef de l’État gambien a vite calmé le jeu
Au lendemain de ce bref mais vigoureux conflit, les Scorpions sont donc montés dans un avion de la compagnie Air Côte d’Ivoire afin de rejoindre – via Abidjan – Yamoussoukro, où deux de leurs trois matchs du premier tour, face au Sénégal (15 janvier) et à la Guinée (19 janvier), sont programmés (le troisième aura lieu à Bouaké face au Cameroun le 23). Mais après dix petites minutes de vol, le commandant de bord a demandé à faire demi-tour et à poser son zinc sur le tarmac de l’aéroport international de Banjul, la capitale gambienne. La cause de cette urgence ? Un problème d’alimentation en oxygène dans la cabine, qui aurait pu avoir des conséquences dramatiques.
C’est ce qu’a expliqué Tom Saintfiet, le sélectionneur belge des quarts-de-finalistes de la CAN 2022 au Cameroun. « Nous nous sommes tous endormis. D’ailleurs, après l’atterrissage, tous les joueurs ne se sont pas réveillés immédiatement. Nous avons failli être intoxiqués au monoxyde de carbone. Si l’avion avait continué à voler 30 minutes de plus, nous serions tous morts », a déclaré à la presse gambienne le Flamand, forcément marqué par ce grave incident. Au lendemain de ce gros coup de frayeur, la fédération locale a souhaité que Saintfiet, son staff et les joueurs s’installent dans le même avion. Mais ni le sélectionneur ni le capitaine Omar Colley, soutenus par l’ensemble de l’effectif n’ont accédé à cette demande. Contacté par So Foot, l’ex-coach de Malte et du Yémen a confirmé les dernières informations qui circulaient à propos du voyage des anglophones.
« Nous aurions pu tous mourir… Nous sommes marqués pour longtemps »
« Nous avons effectivement refusé de prendre le même avion (après les réparations effectuées). Nous sommes marqués par ce qui s’est passé, nous avons eu très peur et cela va rester longtemps en nous. Nous avons demandé qu’une autre solution soit trouvée, et le chef de l’État a discuté avec le président de la République ivoirienne (Alassane Ouattara), et celui-ci a envoyé un autre appareil d’Air Côte d’Ivoire. On va donc faire un vol direct Banjul-Yamoussoukro, car nous voulons bien finir notre préparation », a expliqué Saintfiet quelques minutes avant d’embarquer dans un Airbus A-319. Ouattara a même permis à l’avion de se poser directement à Yamoussoukro, la capitale ivoirienne, plutôt qu’à Abidjan.
Après cet incident qui aurait pu très mal finir, les Scorpions ont bouclé une semaine particulièrement agitée. Car en plus de ce problème d’avion et de prise de bec avec le gouvernement à propos des primes, la fédération gambienne avait annulé tardivement le match amical prévu le 7 janvier à Rabat contre le Maroc. « Nous avions commencé notre stage avec tout notre effectif en Arabie saoudite (où les joueurs avaient chacun reçu 5000 euros de prime de présence, NDLR) le 2 janvier, et nous aurions été obligés de partir le 5 ou le 6 pour le Maroc, avant de repasser par la Gambie. Cela faisait trop de voyages et ce n’était pas idéal pour la préparation », avait précisé Tom Saintfiet, dont la sélection sera donc la seule des 24 qualifiées à n’avoir disputé aucune rencontre de préparation avant la CAN.
Un désistement de dernière minute que les Marocains n’ont que très modérément apprécié, obligeant la fédération royale à modifier les plans des Lions de l’Atlas et à leur trouver d’urgence un nouvel adversaire. Walid Regragui et ses joueurs ont finalement rallié Bouaké plus vite que prévu et y ont affronté jeudi soir la Sierra Leone (victoire 3-1), présente dans la deuxième ville la plus peuplée de Côte d’Ivoire et déjà essorée le 6 janvier par les Éléphants (1-5). Pour la Gambie, rendez-vous lundi face au Sénégal pour que le terrain repasse au premier plan.
Par Alexis Billebault
Propos de Tom Saintfiet recueillis par AB, sauf mentions