- CDM 2018
- Qualifs
- France-Pays-Bas (4-0)
Griezroud, mais peroxydé
Au terme d’une prestation aboutie, la France s’est rassurée à Saint-Denis. Si on retiendra le match XXL de Lemar, la paire Griezmann-Giroud devient désormais indéboulonnable en équipe de France. Un duo qui pourrait bien marquer l’esprit de pas mal de défenses à l’avenir.
On disait l’un en manque de temps de jeu du côté d’Arsenal, avec un rôle réducteur de remplaçant de luxe, à gratter des minutes par-ci par-là au bon vouloir de Tonton Arsène. On disait l’autre en manque de temps de jeu avec l’Atlético de Madrid, la faute à une altercation avec le corps arbitral et le mot « trouillard » qui le condamnait à la tribune pour les deux prochains matchs de Liga des Colchoneros. On se posait des questions sur l’état de forme de l’un et de l’autre, à trop vouloir s’asseoir sur une position de titulaire en équipe de France, bénéficiaires d’un totem d’immunité que Denis Brogniart, incarné ce soir par Didier Deschamps, aurait pu leur donner avant ce match crucial pour aller au Mondial. Mais les totems, les deux hommes ne les regardent que sur TF1 le vendredi soir. Car sur le terrain, ce tandem fait la paire comme Laurel et Hardy, ou plus créatif : Griezroud.
Vole comme le papillon, pique comme l’abeille
Symbolique, le coup d’envoi donné depuis le centre du terrain par Antoine Griezmann était à l’image de son match : une feinte pour faire reculer l’adversaire et commencer à lui taper sur le système. Très tôt dans la rencontre, Grizi a montré qu’il avait des jambes pour permuter entre sa droite et sa gauche, des pieds pour dévier ou dribbler, et surtout un cerveau pour penser sous sa tignasse de blond platine/bombe latine/DJ. Par ses déplacements, sa vivacité et son agilité, Griezmann a prouvé aux Pays-Bas qu’il allait leur donner de sacrés maux de tête en sortie de combat. Non pas à l’aide de coups directs, mais plus par des petites piqûres qui sapent le moral : un but de renard pour commencer (13e), mais aussi de la malice, comme ce tacle d’attaquant mal maîtrisé qui se solde par un avertissement (17e). Pas très fair-play diront les plus cartésiens, mais bien utile pour frustrer un peu plus l’attaque oranje, pour une fois en situation favorable. Ensuite ? Griezmann harcèle, vient emmerder Cillessen dans ses relances au pied, fout la pression dans une équipe qui cherche des repères. Idéal pour que l’équation batave soit impossible à résoudre. En guise de coup de grâce, le natif de Mâcon fait les choses bien : un énième dribble sur Kevin Strootman, déjà averti et donc expulsé. Résultat ? Une certaine amertume du milieu de l’AS Rome à l’égard de Toto à la suite de cette mauvaise blague. Les Pays-Bas sont KO, déjà.
Irrite comme la lacrymo, perce comme l’antiémeute
Le KO de la défense hollandaise en fin de match, c’est aussi le travail d’un homme de l’ombre. Ovationné par le public du Stade de France qui ne s’est pas trompé quant à sa prestation malgré son absence de but, Olivier Giroud est un puncheur né, un bulldozer qui avance face à tout et ne recule devant rien. Plus costaud que son acolyte, son taux de duels aériens face à la paire De Vrij-Hoedt doit être aussi élevé que la cote actuelle de Thomas Lemar sur le marché des transferts. Giroud, c’est le cauchemar du défenseur moderne. Un colosse avec lequel il faut se battre sur chaque ballon, doté d’une protection de balle impressionnante. Une arme offensive redoutable sur coup de pied arrêté, aussi bien de la tête que du tibia. Mais une option à laquelle l’équipe de France n’a pas trop fait appel ce soir, la faute à un Pogba trop gourmand (70e) et à une sortie quelque peu prématurée. Un changement qui a dû réjouir la charnière centrale adverse, avant qu’elle ne fasse connaissance avec son remplaçant. Un certain Kylian Mbappé, mais passons. Ensemble dès le départ, Griezmann et Giroud ont démontré leur capacité à transformer une défense en poussière pour laisser les autres s’occuper des finitions. Au vu de la copie offensive rendue ce soir, une chose est sûre : la Dèche n’est pas près de penser le contraire.
Par Antoine Donnarieix, au Stade de France