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- 30e journée
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Griezmann : « Avec de la qualité et de la confiance, tu peux battre n’importe qui »
Flamboyant sur l'aile gauche de sa Real Sociedad, Antoine Griezmann ne fait ni dans la fausse modestie ni dans l'arrogance. Conscient des forces de San Sebastián, il espère tâter l'Europe la saison prochaine. Petit bilan avant une rencontre capitale face à Málaga.
Raconte-nous ce deuxième but face à Valladolid.Zurutuza me met un long ballon depuis notre camp. À chaque fois, je le chambre parce qu’il ne fait jamais cette passe derrière la défense. Pour le coup, sa passe est parfaite. Je n’avais plus qu’à contrôler et à la mettre au fond. C’est ce qui est arrivé.
La passe était certes parfaite, mais ton enchaînement n’est pas mal non plus. Il y a un peu de Dennis Bergkamp dans ton geste, non ?C’est marrant ce que tu dis puisque j’ai beaucoup regardé des vidéos de Bergkamp, mais aussi de Zidane, avec son fameux contrôle porte-manteau. Sur l’action, mon contrôle est plutôt beau. Le ballon va un peu derrière et j’essaye alors de me l’emmener avec la tête. Ensuite, je n’avais plus qu’à battre le gardien. Quand j’y repense, c’est vrai que c’est plutôt un beau but.
Ce match face à Valladolid (victoire 4-1) n’est-il pas l’illustration parfaite du football que vous tentez de produire chaque week-end : entre exploit individuel et action collective ?En effet, c’était vraiment un super match. Le quatrième but (après un enchaînement à une touche de balle emmené par Griezmann, Xabi Prieto conclut, ndlr) représente bien notre style de jeu et ce que l’on travaille tous les jours à l’entraînement. On aime énormément jouer entre nous et ça se voit.
Philippe Montanier nous avait déclaré que le match déclic de votre série actuelle (une défaite lors des 19 dernières rencontres) était l’aller à Málaga. Au sein du vestiaire, comment avez-vous pris conscience de ce potentiel ?Après la victoire à Málaga (victoire 2-1), on s’est rendu compte que l’on pouvait battre n’importe qui. Surtout qu’avant ce match, cela faisait très longtemps que l’on n’avait pas ramené ne serait-ce qu’un point à l’extérieur. Quand les victoires s’enchaînent, la confiance grandit. Le coach nous avait aussi préparé une vidéo des bonnes choses que l’on peut faire en match. On les a juste répétées plus souvent.
À tel point qu’aujourd’hui, beaucoup considèrent votre jeu comme le plus beau d’Espagne…Beaucoup de journalistes disent qu’après Barcelone, on produit le meilleur football d’Espagne ou, au moins, qu’on n’en est pas loin. C’est gratifiant parce que c’est ce que l’on recherche à travers notre forte possession. Surtout que l’on se procure beaucoup d’occasions. Tous ces ingrédients font qu’aujourd’hui, on pointe à la quatrième place du classement.
Vous êtes également capable de faire preuve de maturité et de vous adapter à votre adversaire. Prenons votre victoire à l’Atlético de Madrid comme exemple…On est arrivés au Vicente Calderón alors que l’Atlético y avait remporté tous ses matchs depuis le début de saison. On était préparés à souffrir, à leur laisser le ballon dans notre camp. D’autant plus qu’en contre-attaque, avec la vitesse qu’on a, on savait que l’on pouvait leur faire mal. Et c’est ce qui c’est passé.
« L’Europe, c’est un rêve qui est devenu un objectif »
Malgré une équipe très jeune, vous affichez une belle régularité dans les performances et dans les résultats. D’où vient-elle ?On est beaucoup à sortir du centre de formation, et nous, les jeunes, avons apporté un vrai plus à l’équipe. Ce n’est pas très compliqué : on a confiance en nous, on essaye de ne pas trop se prendre la tête, on se dit que nous aussi on peut pratiquer du beau football… Pour le moment, voilà ce que ça donne.
Cette maturité est d’autant plus surprenante que, Real mis à part, vous ayez déjà battu tous les gros du championnat…Barça, Atlético, Valence… On n’y pense pas trop et, comme je te disais, on essaye seulement de développer ce qu’on sait faire. À partir de ce moment-là, avec de la qualité et de la confiance, tu peux battre n’importe qui. Ce samedi, on a encore un gros match et, devant notre public, j’espère qu’on prendra les trois points.
Justement, tu parles de ce rendez-vous face à Málaga, un concurrent direct pour la Ligue des champions avec Valence…(Il coupe) Ça serait bien de les voir un peu plus loin pour prendre une bonne avance pour la quatrième place. Mais il n’y a pas de pression. On prend tout ce qu’il y a à prendre. Au début de saison, l’objectif du club était de se maintenir en Liga et il a été acquis depuis longtemps. Tout ce qui arrive, c’est tout simplement du bonus pour nous et notre public. Un public qui nous a beaucoup aidés. Par exemple, lorsque l’on perdait 1-0 à la mi-temps face au Betis, il nous a ovationnés.
En parlant d’Europe, Philippe Montanier botte toujours en touche lorsque le sujet est abordé. Dans le vestiaire, le sujet ne semble pas aussi tabou…L’Europe, c’est un rêve qui est devenu un objectif. Jouer la Ligue des champions avec ton club formateur, c’est magnifique. Il nous reste neuf matchs, neuf finales pour pouvoir la décrocher.
Votre effectif affiche d’ailleurs trois quarts des joueurs formés au club…Le dernier match contre l’Espanyol, je crois que l’on était dix des onze titulaires à avoir été formés au club. On est dans un club qui fait énormément confiance aux jeunes joueurs. Par exemple, le coach n’a pas eu peur de lancer Rubén Pardo, qui a un an de moins que moi, l’an dernier face au Real ou de l’aligner d’entrée face à Séville où il marque. Ce qui aide encore plus, c’est que désormais les jeunes jouent de la même manière que les pros. Tu te doutes que ça facilite énormément l’intégration.
Dans ton cas, les centres de formation français t’avaient fermé la porte car tu étais trop petit. Tu leur fais un beau pied-de-nez.Ce n’est pas vraiment une revanche, mais ça montre à tous les autres « petits » qui sont refusés à l’entrée des centres de formation qu’il est toujours possible de s’imposer. Peut-être en allant dans un autre pays, mais c’est possible de s’imposer grâce à sa technique plus que grâce à son physique.
Considères-tu que cette saison est ta plus aboutie ?Clairement, c’est ma saison la plus complète : je suis pour le moment à sept buts, mon record personnel. Il me reste neuf matchs pour en mettre plus. Au niveau du jeu, j’ai gagné en expérience et en régularité : je fais des matchs plus complets.
Qu’est-ce que t’a apporté Philippe Montanier dans ta progression ?Il m’a surtout amené de la sérénité. J’ai plus confiance en moi et, grâce au jeu qu’il nous demande de produire, je m’épanouis. Le jeu de possession, de changement de rythme, c’est fait pour mes qualités.
Justement, il n’a pas encore prolongé son contrat avec la Real Sociedad. Ce flou quant à son avenir ne vous dérange pas trop au sein du vestiaire ?Pas trop pour le moment parce qu’on a la tête dans le guidon et on ne pense qu’au prochain match. On sait qu’il est bien ici, qu’il prend du plaisir et il sait que nous aussi prenons du plaisir avec lui. Pourquoi ne continuerait-il pas ? Ce serait vraiment dommage qu’il ne poursuive pas l’aventure. Cette bonne saison, c’est grâce à lui.
Et ton avenir, tu le vois du côté d’Anoeta ?Je ne pense pas trop à mon avenir. La seule chose à laquelle je pense, c’est ce match face à Málaga. J’espère continuer à prendre du plaisir ici et accrocher une place en Ligue des champions. Ce qui serait magnifique sachant qu’en Espagne, si tu ne fais pas partie du Real ou du Barça, tu ne peux pas jouer le titre.
Propos recueillis par Robin Delorme