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Granit Xhaka, de paria à pierre angulaire d’Arsenal
Après plusieurs années de galère, Granit Xhaka est enfin devenu cette saison le milieu de terrain fiable et indispensable qu’espérait Arsenal lors de son arrivée, en 2016. Un avènement quasi inespéré.
« Mes sacs étaient faits. Les passeports étaient sortis. J’en avais fini avec Arsenal. Il y avait un contrat sur la table d’un autre club, et tout ce que j’avais à faire était de signer. J’avais parlé avec ma femme, Leonita, et nous avions décidé de partir. » Ce discours remonte à tout juste un an. Engagé dans un sprint final pour la Ligue des champions, que les Gunners manqueront de peu, Granit Xhaka décidait de se livrer à cœur ouvert dans The Players’ Tribune, un média qui propose aux sportifs un espace pour s’ouvrir au public. Un jeu auquel se prête à fond l’international suisse (113 sélections, 13 buts). Il évoque alors d’emblée son faux départ d’Arsenal en décembre 2019, quelques semaines après le déferlement de haine qu’il a subi pour avoir jeté son maillot au sol à la suite d’un changement et des sifflets de l’Emirates Stadium. Qui aurait pu croire, trois ans et demi plus tard, que Xhaka serait toujours à Arsenal et unanimement adulé ?
Moteur 100% fiable
Ce revirement de situation, Xhaka le doit déjà à un impact beaucoup plus important sur le terrain. Sur les 32 journées de championnat écoulées depuis le début la saison, il en a disputé 31, dont 30 en tant que titulaire et 22 dans leur intégralité. Son seul match loupé ? C’était il y a cinq jours, pour une réception de Southampton pas vraiment glorieuse (3-3). Malade, le Suisse a été annoncé forfait de dernière minute et a laissé un trou béant au milieu de terrain où son remplaçant, Fábio Vieira, a réalisé une piètre prestation à côté de Thomas Partey, dans un rôle qui ne sied certes guère au Portugais. Surtout, Xhaka devrait, d’ici la fin de saison, atteindre son deuxième plus haut total de matchs joués après la saison 2017-2018 (38 matchs joués).
Cette régularité retrouvée après plusieurs saisons autour des 30 rencontres disputées, il la doit à sa discipline (quatre biscottes et aucune expulsion jusqu’ici, son plus faible total depuis son arrivée dans le nord de Londres), ainsi qu’à ses performances sur le terrain. Cantonné à un rôle de numéro 6 jusqu’à l’année dernière, Xhaka évolue désormais plus haut, apporte sa justesse technique, un surnombre systématique sur le flanc gauche avec Gabriel Martinelli et Oleksandr Zinchenko, ainsi que ses projections dans la surface adverse. Un plan tactique qui paye sur le plan comptable personnel (cinq buts et cinq passes décisives en championnat) et collectif, Mikel Arteta ayant trouvé un équilibre et un rôle adapté à son ex-capitaine, qui n’a rien perdu de son influence dans le vestiaire.
Bien plus qu’un relais d’Arteta
Lors de son coup de sang il y a un peu plus de trois ans, Xhaka avait perdu son brassard de capitaine, et son départ semblait inéluctable. Ce qui l’a convaincu de rester ? Arteta, évidemment. « Lorsque je prends une telle décision, il est très difficile de me faire changer d’avis, précisait Xhaka dans The Player’s Tribune. Mais Mikel a commencé à dire que je faisais partie intégrante de ses projets. J’ai aimé sa chaleur. Il était honnête, droit. Des plans clairs. J’ai senti que je pouvais lui faire confiance. Il m’a dit de lui donner six mois pour me prouver que j’avais tort, et que si je voulais toujours partir, aucun problème. J’ai dit à Mikel : “Ok.” J’ai appelé ma femme et mes parents et leur ai dit : “On reste.” Trois ans plus tard, le plan fonctionne parfaitement. « J’ai connu beaucoup d’entraîneurs dans ma carrière, mais je n’en avais jamais eu un comme lui, avouait Xhaka en janvier dernier, au moment de recevoir son trophée de Meilleur joueur de l’équipe de Suisse en 2022, à Berne. Il est vraiment très, très spécial. […] Humainement, il est top, et tactiquement, le terrain parle pour lui. »
La réhabilitation a pris du temps, mais aujourd’hui, le Suisse est applaudi à chaque fois qu’il foule la pelouse de l’Emirates Stadium, pour le plus grand bonheur de son coach. « Il le mérite, lâchait le coach espagnol après une victoire contre le PSV en octobre dernier, dont l’unique buteur était Xhaka. Il a dû affronter des moments difficiles, mais son éthique de travail, sa personnalité, la façon dont il traite chaque membre du club et l’amour qu’il porte à Arsenal et son métier ne soulèvent aucun débat. Il mérite amplement tout cela, et je suis simplement heureux de le voir épanoui. » D’autant qu’il n’a rien perdu de son aura auprès de ses coéquipiers. Leader charismatique dans le vestiaire, il est également le premier à rassembler l’équipe en plein match après chaque but. Son retour, attendu ce mardi soir contre Manchester City (coup d’envoi à 21 heures), s’annonce clairement déterminant pour les Gunners, dans cette finale pour la course au titre.
Par Fabien Gelinat