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Gourvennec, le carré breton

Par Maxime Brigand
Gourvennec, le carré breton

Un point de départ comme de bascule : Rennes, le début des années 1990, son club de foot et son université. Si Jocelyn Gourvennec affirme qu'entraîner a toujours été « ancré » en lui, « comme une évidence, une conviction forte », son choix de ne pas rejoindre un centre de formation à l'adolescence pour poursuivre ses études aura été un révélateur. Retour sur les fondations de « Joce ».

Chez Jocelyn Gourvennec, les notions du destin et de la destinée ne sont pas de simples mots. Comme si l’entraîneur des Girondins de Bordeaux s’interrogeait en permanence sur le commencement des actes, la maîtrise des événements et qu’il souhaitait en toutes situations sectionner les racines qu’on dit impossible à arracher des plantes symbolisant le destin. Gourvennec est un homme qui pense à tout, aux détails insignifiants, qui trace la destinée d’un groupe selon « un cheminement d’un point A à un point B » et qui ne laisse rien passer. Il contrôle. Son histoire ne dit pas autre chose : convaincu que l’homme se définit par ses actions et ses paroles, le coach qu’il a toujours voulu être exige au moins autant de ceux qui transforment en actes ses idées. Au moment d’évoquer le déplacement de son groupe à Rennes cette semaine, Jocelyn Gourvennec a alors augmenté le volume : « Il est évident que dans une période comme celle que nous traversons (Bordeaux reste sur quatre matchs consécutifs sans victoire en Ligue 1 dont trois défaites, ndlr), il faut en faire plus. Cela veut dire aller au charbon, mettre le bleu de chauffe. Le jeu réclame cela d’une façon générale.(…)Il faut que les joueurs reprennent leur destin en main. » La raison aux chevilles, Gourvennec lutte en silence comme il l’a toujours fait.

L’Humanité et la brèche

Dans le bouillon médiatique qu’est devenu le foot depuis le début des années 1990, on l’a toujours présenté différent, presque en décalage. Une curiosité que les médias se sont amusés à étiqueter intello depuis qu’il a débarqué dans le circuit professionnel avec le Stade rennais. Né de parents enseignants qui buvaient le café en salle des profs avec le Christian Gourcuff mathématicien, petit-fils de cordonnier, Jocelyn Gourvennec a toujours détesté ce catalogage. Le Breton de Brest a simplement voulu prendre le volant de sa destinée et a refusé le destin qu’on voulait lui dicter. « Il y a plusieurs chemins pour y arriver, à partir du moment où il y a un environnement stable, où on a des repères, dit-il à L’Humanité, en janvier 1999. J’ai pu m’épanouir tant sur le plan du foot qu’en ce qui concerne ma personnalité.(…)J’ai le sentiment d’avoir vécu pleinement ma jeunesse. » Vivre et se construire : il joue de la flûte traversière, découvre Beck, Jeff Buckley, se fabrique au FC Lorient et est insensible aux battements de cils des clubs pros qui viennent le chercher à treize ans. « Physiquement, j’aurais explosé. Tu es sans arrêt sur la brèche. Tu vis comme un adulte » , raconte-t-il dans un entretien donné à Libération.

Le temps libre sert alors à la mise en place d’autres repères. À Lorient, Gourvennec s’imbibe en regardant les séances de l’entraîneur-joueur Christian Gourcuff et obtient rapidement son bac tout en commençant à fouler les terrains de D2 avec les Merlus. Le temps des allers-retours entre la faculté des sports de Rennes la semaine – où il reçoit également l’autorisation de s’entraîner deux fois par semaine avec la réserve du Stade rennais de Patrick Rampillon – et les matchs avec Lorient, en D3, le week-end. Le même Rampillon qui va finalement le convaincre de s’installer définitivement à Rennes lors de l’été 1991. « On le suivait depuis quelque temps et on l’a pris, car j’ai ressenti quelque chose de rare en le voyant, de l’ordre de ce que j’ai pu sentir pour un joueur comme Gourcuff ou Marveaux, situe le formateur rennais. Ce que j’ai vu, c’est de l’intelligence, de la justesse, une faculté à être efficace pour l’équipe et à simplifier le jeu, ce que j’appelle avoir la qualité d’être à l’origine de la qualité de jeu d’une équipe. Comme il avait le souci de continuer ses études, qu’à Lorient il n’y avait pas les facs qu’il souhaitait, venir à Rennes était une évidence : il avait tout. » Patrick Rampillon s’entend alors avec la fac de Rennes pour adapter les cours « avec un système de tutorat » , histoire que « le foot ne lui mange pas tout » et qu’il puisse aussi avoir accès à « un niveau d’entraînement élevé » .

« Il voulait comprendre »

Mais alors, pourquoi Gourvennec est-il devenu entraîneur de foot ? La question pourrait également se poser différemment : pourquoi le joueur qu’il était, classe, organisateur, passeur de plats reconnus, a-t-il décidé d’y consacrer l’intégralité de « son énergie » ? « Quand j’étais jeune, je voulais être joueur, mais j’étais dès le départ convaincu qu’après ma carrière, je serais entraîneur. Ça a toujours été ancré en moi, comme une évidence, une conviction forte. Je ne peux pas l’expliquer. Mes parents étaient enseignants. Ça a sans doute joué dans ma vocation » , répond-il il y a quelques mois lors d’un entretien donné à L’Équipe. Le temps passé dans les études au début de sa carrière a alors avant tout servi à lui donner « un équilibre » qu’il a concrétisé par un mémoire portant sur l’analyse des déplacements de ses coéquipiers d’attaque, plus ceux de Nicolas Ouédec. On le dit alors enfermé dans une bulle, que son ancien coéquipier en Bretagne, Laurent Huard, éclate : « Au contraire, il faisait un maximum d’efforts pour s’ouvrir sur plein de choses. Il avait une vie d’étudiant, sortait tout en rentrant à 23h-00h. Il vivait dans le quartier étudiant de Rennes, à Villejean, alors qu’il aurait pu vivre plus dans le centre-ville s’il voulait être plus tranquille. Je dirais plutôt qu’il y avait une forme de décalage de génération avec les jeunes, qui était plutôt de la jalousie parce qu’ils voyaient bien qu’il allait réussir. Avec les anciens, Loïc Lambert, François Denis, Michel Sorín, il échangeait davantage. »

Une clé : Gourvennec échange, il absorbe. « Je ne notais pas les séances, mais je les retenais dans un coin de ma tête » , avoue-t-il un jour dans Ouest-France là où Coco Suaudeau, son entraîneur à Nantes, racontera qu’avec « Jocelyn, pour la moindre explication, il me fallait une heure ! Je devais avoir de solides arguments pour le convaincre.(…)Il voulait comprendre. » Comprendre pour ensuite transmettre, comprendre pour briller davantage sur un terrain où il dégageait « une prestance naturelle, avec la tête droite, le regard à l’horizon, le buste bombé » et où il sera le pilier de la remontée rennaise en D1 au bout de la saison 1993-1994 dont il sortira meilleur joueur. « On était attirés par son élan, son charisme technique » , complète Huard. Dans le même temps, Gourvennec complète ses références avec Notheaux, Le Milinaire. Suivront Suaudeau, Denoueix, Le Guen et les autres. Les fondations de « Joce » ont été posées et le voilà de retour vendredi soir, là, dans une ville étape de sa destinée. « Il voulait réussir sa vie après le foot, c’est bien parti » , conclut Rampillon. Gourvennec, lui, ne s’estime qu’au début du voyage.

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