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Gourcuff/OL, un divorce prévisible
Ça y est, c'est fini. Après cinq ans, l'Olympique lyonnais et Yoann Gourcuff ont décidé de ne pas prolonger leur relation. Une décision plutôt sage, lorsque l'on regarde le bilan de leur idylle. Certaines histoires sont impossibles, et, parfois, il est préférable de se dire adieu. Et puis, comme le chantait Joe Dassin, ça ne va pas changer le monde.
« Ça va s’arrêter, oui. C’est avec un peu de nostalgie. C’est un grand joueur qui n’a pas su s’intégrer. » C’est donc par ces mots que Jean-Michel Aulas a confirmé, sur les antennes de Canal +, samedi soir, ce que tout le monde soupçonnait depuis quelques semaines déjà : Yoann Gourcuff ne sera plus lyonnais la saison prochaine. Après cinq années d’un amour à sens unique, l’OL s’est résolu à laisser partir l’homme qui ne lui a jamais vraiment rendu toute son affection. Un homme qui n’a pas su, n’a pas pu, donner le meilleur de lui-même, la faute à des blessures à répétition. La faute à un mental fragile, à une âme blessée. Car difficile de croire que les pépins physiques ont été les seuls responsables de ses trop longues absences. La vérité, c’est que Yoann n’a jamais su s’intégrer dans un groupe, dans un club qui misait pourtant énormément sur lui. Son potentiel hors du commun promettait un mariage en feu d’artifice avec un club soucieux de retrouver ses années de gloire. Le feu d’artifice n’a jamais eu lieu, l’artificier n’avait pas le goût à la fête.
Attendu comme une star
À l’heure de faire le bilan sur les cinq saisons lyonnaises de Yoann Gourcuff, difficile de trouver quelques aspects positifs. Difficile de défendre celui qui a toujours paru se soucier plus de sa propre personne que des intérêts de son club. Difficile de trouver des circonstances atténuantes à cet échec. Difficile de juger. Difficile de pardonner, aussi. Pourtant, c’est peu dire que l’OL et ses dirigeants ont tout fait pour que cette relation réussisse. Un transfert record, 22 millions d’euros, un salaire de star, 7,6 millions d’euros annuels, une présentation en forme de show. Bref, tout était réuni pour que le natif de Ploemeur devienne le guide. Celui qui ramènerait le club vers les sommets. Mais après cinq saisons, le constat est là, sans appel, le milieu de terrain n’a rien fait. Ou si peu. Souvent blessé, souvent absent, souvent triste, souvent décevant. La réalité est celle-là, celle d’un énorme gâchis.
La relation entre Gourcuff et l’OL devait être belle, intense, mais elle n’aura finalement été qu’un échec. Un amour raté, parsemé de quelques passages fusionnels, toujours noyés sous un flot de déception. Les raisons, personne ne les connaît vraiment. Peut-être que même lui, au fond, ne peut pas s’expliquer ces années passées à errer, loin de son talent et de sa forme d’antan. Bien sûr, on pourrait parler de la fracture de Knysna, cet épisode controversé de l’histoire des Bleus, duquel Gourcuff ne serait jamais vraiment revenu. Des embrouilles avec Ribéry, des joueurs qui ne veulent pas jouer avec lui, des prestations mitigées, l’ancien Bordelais n’a plus jamais été le même joueur depuis son retour d’Afrique du Sud.
Un homme fragile
Si le joueur a été fortement marqué par l’épisode sud-africain, il n’empêche qu’il n’a jamais donné l’impression de se donner à 100% pour le bien de son équipe. Pour Gourcuff, les blessures ont toujours été, semble-t-il, les conséquences d’un mal être plus profond, moins perceptible. Le joueur n’a jamais semblé réellement impliqué dans la vie de son futur ex-club, toujours loin des autres, il n’a sans doute pas fait les efforts nécessaires, pas donné le meilleur de lui-même. Au niveau de son implication, du moins, car sur le terrain, le peu de fois où il a pu s’exprimer, le garçon l’a bien fait, notamment lors de la période septembre-octobre, cette saison, où il a été l’un des grands artisans du retour de l’OL. Avant de rechuter, évidemment.
En cinq saisons, Gourcuff n’a disputé que 90 matchs de championnat, dont 23 dans leur intégralité. Des chiffres qui se suffisent à eux-mêmes pour résumer son expérience à l’OL. Tiburce Darou, préparateur physique, s’est occupé un temps du joueur après l’une de ses nombreuses blessures, mais même lui n’avait pas trouvé la solution, et quand il parle du beau gosse du foot français, son jugement est sans appel : « Moi, je m’occupe du physique. Pour soigner Yoann, il faudrait faire de la psychiatrie, et je ne suis pas psychiatre. » Cruel verdict pour juger un joueur avec de l’or dans les pieds. Mais un or fragile, délicat, qu’il ne faut surtout pas brusquer. Pour résumer, le champ lexical de son poème lyonnais serait celui de la souffrance, celui du mal-être, de la dépression presque. Son parcours est celui d’un corps fragile. Un esthète aux épaules trop frêles pour assumer la pression du crack qu’il était censé être. Dommage.
Par Gaspard « Pat » Manet